Научная статья на тему 'Identite et appartenance religieuse (l 'apport de Vladimir Soloviev)'

Identite et appartenance religieuse (l 'apport de Vladimir Soloviev) Текст научной статьи по специальности «Языкознание и литературоведение»

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Текст научной работы на тему «Identite et appartenance religieuse (l 'apport de Vladimir Soloviev)»

22 См.: Пинскер Л. Автоэмансипация. Призыв русского еврея к своим соплеменникам. СПб.: Тип. Х.Брауде, 1898. С. 16; Hess M. Rom und Jerusalem. Die letzte nationalitAtsfrage. Wien und Berlin: R.Löwit Verlag, 1919. S. 20-21.

23 Трубецкой E. Миросозерцание Вл.С.Соловьева. Т. I. С. 30.

MARYSE DENNES

Université Michelde Montaigne, Bordeaux, France

IDENTITÉ ET APPARTENANCE RELIGIEUSE (L'APPORT DE VLADIMIR SOLOVIEV)

Dans sa conférence sur le "Principe d'identité", prononcée le 27 juin 1957 devant les facultés réunies de Fribourg en Brisgau1, Martin Heidegger renvoyait à Parménide pour souligner le rapport de l'être à l'identité par 2l'intermédiaire de la pensée. L'expression est connue to gar auto noein estin te kai einai que Heidegger traduit:"le même, en effet, est percevoir (penser) aussi bien qu'être"2. Cela signifie, pour lui, que l'être et la pensée se rencontrent dans "le même" (to auto), qu'ils participent d'une "unité" qui ne se réalise et ne s'appréhende que par leur interdépendance. L'identité en question ne signifie donc en aucun cas, nous dit-il, "le vide de ce qui, privé en soi de toute relation, persiste et s'obstine dans une fade uniformité"3. Elle est habitée et dominée par une "médiation" qui n'est autre que la relation du même avec lui-même4: "II faut reconnaître, écrit- il encore, qu'à l'aube de la pensée, longtemps avant qu'on n'en vînt à formuler un principe d'identité, l'identité elle-même avait parlé, dans une sentence qui affirmait: la pensée et l'être ont place dans le même et se tiennent l'une l'autre à partir de ce même"5.

C'est cette approche de l'identité que nous aurons en vue dans la prise en considération du thème: "Identité et appartenance religieuse".

Posant de prime abord l'identité comme un retour sur soi de l'être par l'intermédiaire de la pensée, comme un mode de rassemblement de l'étant et d'engagement dans l'histoire, nous nous demanderons de quelle façon l'appartenance religieuse peut être

impliquée par cette problématique. Et plus précisément, prenant en compte la religion chrétienne, en tant qu'elle s'est trouvée, d'une façon ou d'une autre, mise en rapport avec un mode de pensée philosophique, hérité de la Grèce antique, nous chercherons à comprendre dans quelle mesure le Christianisme a pu participer de l'affirmation autant que de la reconnaissance d'une identité qui marquait une histoire; comment ce qui donnait sens à une histoire, ce que M. Heidegger nomme l'"être de l'étant", pouvait correspondre à un appel de l'identité et renvoyer simultanément à une appartenance religieuse originelle. Comment, dans ce cas, le Christianisme, du fait de son rapport essentiel à la manifestation de cette identité dans l'histoire, pouvait révéler une nature historíale.

L'exemple que nous choisirons sera celui de la Russie. Le thème proposé acquerra, par rapport à cet exemple, toute sa pertinence. Dans l'expression "identité et appartenance religieuse", le "et" cessera de n'être qu'un simple mot de liaison, neutre et modifiable, pour désigner cette relation de conjonction où les termes se co-déterminent, et nous diriger vers la nécessité d'envisager le Christianisme sous son aspect historial, en tant que susceptible de produire une Histoire et de révéler une identité. La Russie nous apparaîtra comme le type même d'une entité historiale, marquée, en son identité, par son appartenance religieuse. De ce fait, elle nous permettra de saisir, autant au niveau d'un peuple qu'au niveau d'une personne, les conditions de réalisation d'une identité chrétienne, de distinguer, par là-même, l'appartenance religieuse de l'appartenance nationale, et de montrer enfin qu'existe, à côté des voies occidentales, une autre manifestation de l'identité chrétienne dans l'histoire, plus intégrale et plus humble à la fois, mais telle que l'homme puisse encore s'y reconnaître, en son essence propre.

L'identité comme lien entre l'historicité et l'appartenance religieuse de la Russie

Alors que M. Heidegger, revenant sur plus de deux mille ans d'histoire, reconnaissait, dans l'énoncé parménidéen de l'identité de l'être et de la pensée, la seule origine du devenir spécifique de l'Occident,- donnant ainsi primordialement à l'Occident un fondement philosophique -, N. Berdiaev, lui, issu d'une autre tradition de pensée

et se retournant sur l'histoire de son pays, enracinait ce devenir historique dans le fondement religieux du Christianisme. Il rattachait ainsi l'identité de la Russie à son appartenance religieuse. A la suite de V. Soloviev qui affirmait que "l'idée d'une nation n'est pas ce qu'elle pense d'elle-même dans le temps, mais ce que Dieu pense d'elle dans l'éternité 6, N. Berdiaev introduisait son ouvrage sur l'Idée russe en notant:"II n'y a que l'amour qui puisse saisir le mystère de toute individualité(...).Ce qui m'intéressera sera non pas tant de savoir ce qu'empiriquement la Russie a été, que de découvrir ce que le Créateur a voulu qu'elle soit..."7.

Pour N. Berdiaev, comme pour V. Soloviev, il s'agissait d'adapter la recherche sur l'histoire de la Russie à la nature spécifique de cette histoire qui trouvait son fondement dans l'accueil de la Révélation chrétienne. Chez l'un comme chez l'autre, la pensée se retournait sur l'être pour en saisir son mode de présence-au-monde, et elle le rencontrait simultanément sous sa forme théologale. La religion prenait, pour eux, une valeur à la fois ontologique et heuristique. Et pour découvrir la nature de l'identité de l'être et de la pensée ayant produit une histoire spécifique, enracinée dans une appartenance religieuse, ils adoptaient un mode de pensée théologique, seul apte à saisir le fondement religieux de l'identité de l'être et de la pensée qui avait produit cette histoire. La question de l'identité et de l'appartenance religieuse se trouvait expérimentée, au sein de la civilisation chrétienne, dans sa forme la plus essentielle et la plus reculée. Le contact avec l'Occident avait renvoyé la Russie à une quête de son identité chrétienne et c'est en se retournant sur leur passé que les penseurs russes découvraient ce mode d'être par appartenance religieuse qui, régissant simultanément leur démarche de pensée et le devenir de la Russie, les rendait aptes, plus que quiconque, à révéler, à travers l'histoire de leur pays, comment l'identité pouvait être, pour l'homme aussi, essentiellement liée à l'appartenance religieuse.

Le premier constat porté à partir de l'histoire de la Russie, fut celui de la possibilité d'un enracinement fondamental dans la Révélation chrétienne. Par son baptême, en 988, à l'époque du prince Vladimir, la Russie donnait l'exemple d'une nation qui avait accédé à la civilisation par le seul intermédiaire de la religion chrétienne. Ce qui s'était constitué à Byzance jusqu'au deuxième concile de Nicée,

l'ensemble de la Tradition patristique de l'Église indivise, elle l'avait accueilli comme son fondement d'existence, comme la référence à partir de laquelle pouvait se développer une histoire. Avant d'être nationale, l'appartenance était d'abord religieuse et c'était par référence à cette appartenance religieuse que se forma le sentiment d'une identité. On pourrait dire aussi que le sentiment d'identité nationale provenait de l'appartenance religieuse et que, de cette façon, l'on ne pourrait parler, pour la Russie, de fidélité à son identité que dans l'approfondissement et la réalisation de sa nature fondamentalement chrétienne. L'exemple du joug mongol est, à ce propos, très significatif. Il s'exerça, sur la Russie, pendant plusieurs siècles, de 1230 à 1480, et alors que, pendant un certain temps, la Russie n'exista plus en tant que nation, ce fut par l'intermédiaire de son appartenance religieuse qu'elle parvint à maintenir son identité. Dans son ouvrage sur l'itinéraire religieux de la conscience russe,8 Mme Danzas donne un aperçu de cette situation: "En Russie, écrit-elle, la notion de l'État avait sombré dans le chaos qui suivit le refoulement vers le Nord, le morcellement en principautés virtuellement indépendantes, et l'invasion tatare. Ce fut dans cette période tourmentée entre l'effondrement de Kiev et l'affermissement de Moscou que s'effectua la fusion complète de l'Église non avec l'État, mais avec le peuple ou plutôt avec l'âme russe. L'Église incarnait le seul idéal, le seul élément de beauté au milieu de l'atroce dévastation. Sans elle, le peuple serait revenu à l'état sauvage (...). Ce fut l'Église qui sauva la langue russe; ce furent les rites qui présentèrent les seules formes d'art pendant des siècles; ce furent ses chants qui devinrent la seule expression des souffrances du peuple et de ses espoirs"9.

On pourrait aussi renvoyer à une autre époque, au début du XVIIème siècle, quand la Russie se retrouva sous domination polonaise. Dans un cas comme dans l'autre, si l'État avait cessé d'exister, l'identité russe n'en avait pas moins été préservée par son appartenance religieuse. Dans un cas comme dans l'autre, au XIVème comme au XVIIème siècle, c'est dans l'Église qu'avait survécu la Russie.

Dans le premier cas, au XIVème siècle, au coeur du joug mongol: c'est pendant cette période que l'on voit surgir les grandes figures annonciatrices de la réaffirmation future de l'identité

culturelle et religieuse de la Russie. Le grand peintre d'icônes, André Roubliev, et le grand Saint de la Russie, Serge de Radonège, fondateur du monastère de la Trinité furent contemporains. Ils permirent à la Russie dévastée de bénéficier, par son Église, des nouvelles influences méridionales qui apportaient les premières traces de la renaissance byzantine et du renouveau spirituel du Mont Athos10. Progressivement, pendant plusieurs siècles, la Russie pourrait se ressourcer dans le mouvement hésychaste et, quand elle le ferait, y trouver la force essentielle lui permettant de résister à toutes les déviations de son identité chrétienne.

Quant à la deuxième période que nous avons mentionnée, celle du début du XVIIème siècle, elle est aussi un exemple de l'identité enracinée dans l'appartenance religieuse. Ce fut en effet du soubassement spirituel de la Russie que surgirent alors les armées de libération. Des régiments populaires furent rassemblés au monastère de la Trinité, celui-là même qui avait été créé au XIVème siècle par St Serge de Radonège, et de là, ils marchèrent sur Moscou, avec, à leur tête, Minine et Pojarski, et ils reprirent la capitale aux Polonais. Une nouvelle dynastie put s'installer, celle des Romanov, qui, supplantant celle des Riourikovitch, devait rester sur le trône des Tsars jusqu'en 1917.

Face à ces deux exemples pris dans l'histoire de la Russie, une question nous vient à l'esprit: qu'en est-il de la situation actuelle, de cette nouvelle période chaotique que traverse la Russie? Le peuple pratiquement indifférent à la question de savoir qui le gouverne, réaffirme son identité par son adhésion à l'Église, et les articles abondent dans les revues philosophiques sur le thème de cette même identité et de son rapport à l'appartenance religieuse. On revient actuellement à ces penseurs russes du XIXème et du XXème siècles qui se sont interrogés sur la spécificité chrétienne de la Russie. On cite V. Soloviev, N. Berdiaev presque comme l'on citait Lenine. La Russie cherche à se reconnaître après s'être oubliée, ou plutôt après s'être affirmée d'une façon qui ne correspondait plus à sa véritable identité.

Le risque du détournement

- Authenticité et responsabilité: Vladimir Soloviev.

Cette forme d'affirmation contre nature, par déviation ou détournement de la vocation religieuse, V. Soloviev l'avait déjà

soulignée comme étant le risque inhérent à l'existence chrétienne de la Russie.

Dans son discours sur l' Idée russe, prononcé à Paris, en 188811, il avait insisté sur le fait que toute entité relative à l'humain, -qu'elle fût une nation ou un individu - était un être moral et qu'elle s'avérait donc douée d'une faculté de choix. Il avait écrit alors: "II est évident que le devoir peut être ou non accompli, il peut être accompli bien ou mal, il peut être accepté ou rejeté"12. Et considérant que le devoir correspondait à l'idée que Dieu se faisait de l'entité humaine envisagée, il en avait conclu que l'accomplissement du devoir équivalait à une affirmation de soi en Dieu. Nous pourrions dire, en accord avec notre sujet et dans ce contexte de réflexion solovievienne, que l'accomplissement du devoir correspondait à la manifestation de l'identité de l'être et de la pensée, dès lors que celle-ci se trouvait rapportée au projet de Dieu sur l'homme et à la réalisation de l'homme en Dieu.

V. Soloviev avait écrit: "La pensée de Dieu qui apparaît comme une fatalité absolue pour les choses, pour un être moral, est seulement un devoir"13 ; et il avait ajouté: "La vocation, ou bien cette idée particulière que la pensée de Dieu fait reposer sur chaque être moral - individu ou nation - et qui s'offre à la conscience de cet être comme son devoir supérieur, - cette idée agit dans tous les cas comme une puissance réelle, elle détermine dans tous les cas l'être de la personne morale, mais elle le fait de deux façons opposées: elle apparaît comme loi de la vie quand elle est accomplie, et comme loi de la mort quand cela n'a pas lieu. Un être moral ne peut jamais se libérer du pouvoir de l'idée divine, qui se donne comme le sens de son être, mais c'est de lui que dépend le fait de porter cette idée dans son coeur et son destin comme une bénédiction ou bien comme une malédiction"14.

Pour V. Soloviev, la Russie qui avait reçu de son Baptême le droit à exister dans l'histoire, était, au même titre qu'un individu, un être moral. C'est pour cette raison qu'il parla, à la fois, de son identité chrétienne et de son devoir devant Dieu. Mais simultanément, il fut conduit à dégager un risque inhérent à l'existence chrétienne de la Russie, un risque de malédiction correspondant à une déviation, à un détournement de la vocation chrétienne, à une interprétation erronée de son identité.

"Le peuple russe, - avait-il écrit -, est un peuple chrétien et par conséquent, pour connaître la véritable idée russe, il ne faut pas se demander ce que doit faire la Russie pour elle-même, mais ce qu'elle doit faire au nom du principe chrétien reconnu par elle et pour le bien du monde chrétien dans son entier"15.

Par ces quelques extraits, l'idée de V. Soloviev nous est déjà claire. Ce qui prévaut, pour lui, dans la réalisation de l'identité de la Russie, c'est son appartenance religieuse et non son être national; et ce n'est que dans la mesure où elle se déterminera selon sa nature chrétienne et non selon son aspiration nationale que la Russie sera en accord avec elle-même, fidèle à son identité en Dieu.

Par cette démarche, V. Soloviev a décelé la raison que l'on pourrait appeler "théologale" des errances et des erreurs de la Russie: ce qui l'a conduite à s'oublier, à ne plus être elle-même, à perdre son identité par mauvaise compréhension du rapport essentiel que cette identité entretenait avec l'appartenance religieuse. Pour V. Soloviev, la Russie avait dévié de sa vocation chrétienne dès lors qu'elle avait inversé, dans son histoire, la dépendance de l'appartenance nationale par rapport à l'appartenance religieuse. Le nationalisme était, pour lui, la marque indéniable de cette déviation; il l'était d'autant plus qu'il s'était affirmé par revendication d'une appartenance religieuse. Son texte et clair:

"L'esprit de l'égoïsme national ne se sacrifie pas si facilement. Chez nous, il a trouvé moyen de s'affirmer sans se démarquer ouvertement du caractère religieux, inhérent à la nationalité russe. On ne reconnaît pas seulement que le peuple russe est un peuple chrétien, on déclare emphatiquement qu'il est peuple chrétien en priorité et que l'Église est le fondement véritable de notre vie nationale. Et tout cela seulement pour affirmer que c'est chez nous exclusivement qu'il y a une Église et que nous avons le monopole de la foi et de la vie chrétienne"16.

Il est évident que V. Soloviev pensait alors aux difficultés qu'il avait rencontrées, dans son activité oecuménique personnelle, face au nationalisme religieux de l'autocratie tsariste à son époque. Mais son texte renvoyait aussi à ce qui avait constitué le drame de l'identité chrétienne de la Russie.

L'exemple le plus signifiant de cette errance religieuse de la Russie, - parce qu'il eut des conséquences dans l'histoire de ce pays

jusqu'à l'époque actuelle et qu'il risque encore d'en avoir dans l'avenir - fut celui de la récupération, par le pouvoir d'État, d'une idée qui à l'origine n'était qu'à visée morale et spirituelle, l'idée de "Moscou -troisième Rome".

Pour en comprendre toute la signification religieuse, et même, dans le cas de la Russie, la signification à la fois ontologique et théologique, il est nécessaire d'en ressaisir le contexte.

- Une déviation de la vocation religieuse: l'idée de "Moscou troisième Rome"

Tout d'abord cette idée apparut en Russie au début du XVI"eme siècle, au sein de l'épître que le moine Philotée envoya au Tsar Basile III. L'extrait où elle apparaît est le suivant:

"Écoute et souviens-toi, Tsar très pieux, que tous les royaumes chrétiens se sont réunis dans ton royaume, que deux Romes sont tombées, mais que la troisième est debout et qu'il ne saurait y en avoir de quatrième: ton royaume chrétien ne sera par nul autre remplacé"17.

La formule en vieux-russe est connue: Dva Rima padosa tretij stoit, certvortomu ne byti.

Or, l'épître dans laquelle se trouvait cet extrait n'était point à visée politique. Elle était dirigée contre les astrologues. Dans le contexte général de l'époque où les chrétiens orthodoxes autant que les hérétiques de Novgorod se sentaient tous menacés par la fin du monde18, l'épître de Philotée cherchait à rappeler au Prince de Moscou son devoir de Chrétien. Alors que Constantinople était tombée aux mains des Turcs en 1453, alors que Rome était considérée comme hérétique, pour Philotée, c'était Moscou qui devait maintenir les conditions de la vraie foi jusqu'à ce que survînt la fin des temps. Il ne s'agissait point, dans l'esprit de Philotée, d'inciter le Prince moscovite à dominer toute la Chrétienté. Il s'agissait bien au contraire de l'éveiller à une terrible responsabilité morale: celle de redresser les mœurs afin que la Chrétienté dans son ensemble fût sauvée et non point confiée au pouvoir de l'Antéchrist. La raison de cette épître était eschatologique et non millénariste. Dans son ouvrage sur "les voies de la théologie russe"19, Georges Florovski explique:

"L'image de la Troisième Rome s'y dessina sur un fond de fin du monde. "Nous espérons qu'après nous, il y aura un royaume éternel". Philotée rappelait la mise en garde apostolique selon laquelle "le jour du Seigneur viendra comme un voleur la nuit" (1 Thés., 5.2)"20 ;

et plus loin:

"Si Moscou est la Troisième Rome, elle est la dernière, c'est-à-dire qu'elle constitue le dernier royaume de ce monde, puisque la fin est proche. Il convient donc de conserver la pureté de la foi et l'observance des commandements avec crainte et humilité. Dans sa lettre au Grand Prince de Moscou, Philotée le met en garde, le menaçant même, sans aucune flagornerie"21.

Mais la fin du monde ne survint pas! Le successeur de Basile III fut Ivan le Terrible. Le pouvoir tsariste et la puissance moscovite se renforcèrent et l'empire russe s'étendit à tel point que le Tsar se crut investi d'une mission divine: la Russie se posa en Royaume de Dieu sur la terre. L'aspect apocalyptique de la théorie de Moscou -troisième Rome se transforma, nous dit encore Florovsky, "en vision originale du millénarisme officiel"22 et ce fut à l'époque du Tsar Théodore (1584-1598), le fils d'Ivan le Terrible et le dernier des Riourikovitch, que cette version fut conduite à son accomplissement: "On tira, - nous dit encore Florovsky -, des conséquences décisives sur les plans politique et ecclésial, de la Théorie de Moscou-troisième Rome qui, à cette époque était passée du mystère apocalyptique à l'idéologie gouvernementale. L'instauration du Patriarcat moscovite témoigne plus de l'indépendance et de la primauté de la royauté russe que de celle de l'Église. Ce fut avant tout un acte politique qui fut ressenti comme tel dans les tréfonds de l'âme populaire, ce fut le renoncement définitif à Byzance"23.

A la lumière de ce que nous avons extrait de l'œuvre de V. Soloviev, nous comprenons que s'était alors produite progressivement, tout au long du XVIème siècle, une déviation de la vérité chrétienne qui marquait l'identité culturelle et spirituelle de la Russie. L'aspect national avait pris le dessus sur l'aspect chrétien de cette identité et lorsqu'un siècle plus tard survint, à l'époque du Tsar Alekseï Mikhaïlovitch et du Patriarche Nicone, le schisme intérieur à l'Église russe, ce fut à cette interprétation détournée de l'identité russe

que les vieux-croyants s'attachèrent lorsqu'ils prônèrent, jusqu'au sacrifice de leur vie, la supériorité de la foi russe.

Je citerai encore G. Florovsky pour illustrer ce dernier point:

"Ce fut là, - nous dit-il -, la source du désenchantement des schismatiques. Leurs rêves portaient sur la Ville d'ici-bas, la Ville terrestre, sur l'utopie théocratique, sur le millénarisme. Ils voulurent croire que ce rêve s'était réalisé, que le royaume était déjà là sous l'aspect de l'État russe. Même si les quatre patriarches demeuraient en Orient, c'est à Moscou que vivait l'unique tsar orthodoxe (...). L'espérance avait tout à coup volé en éclats..."24. Et Florovsky de citer le diacre Théodore qui avait écrit en 1669: "Maintenant, il n'y a plus de tsar. Il y avait un tsar orthodoxe sur cette terre, mais il manqua de circonspection et, comme de noirs nuages, les hérétiques occidentaux ont éteint le soleil de la Chrétienté "25. Pour les vieux-croyants l'histoire sainte avait pris fin non par la fin du monde mais en cessant simplement d'être sainte. Le monde se trouvait dorénavant confié au pouvoir de l'Antichrist.

A partir de notre analyse, nous pouvons comprendre ce qui S'était passé: on avait atteint le comble du détournement de la vérité chrétienne de l'identité russe. Le lien à la tradition patristique et apostolique était rompu. Dans la mentalité russe s'implantait l'idée que la Russie était dépositaire de la vérité et qu'elle devait la défendre contre toutes les agressions extérieures, montrer sa supériorité, s'enorgueillir même de sa puissance nationale. Indépendamment des conséquences extrêmes que les vieux-croyants avaient tirées de l'idée de Moscou-troisième Rome, une tendance s'installait, consistant à utiliser la religion pour faire une interprétation nationaliste de la situation politique de la Russie. Une tendance qui, à certains moments de l'histoire de la Russie, allait se faire prédominante jusqu'à engager le pays sur des chemins d'errance où devait être, par déviation excessive, oubliée, rejetée même parfois, - comme pendant la période soviétique -, la signification, pour l'homme et pour la nation, de l'identité d'abord religieuse de la Russie.

Dégagement d'une façon d'être spécifique de la Russie dans le Christianisme: l'impact de la pensée de Vladimir Soloviev

A tout cela V. Soloviev opposait une solution enracinée dans la nature chrétienne de la Russie. Pour un pays chrétien, essentiellement

chrétien même comme la Russie, défini en son identité par son appartenance religieuse, le devoir consistait, - au contraire de ce qui s'était produit dans l'histoire -, à ne pas se dire seul dépositaire de la Vérité, à ne pas s'enfermer dans son nationalisme et son extrémisme, mais à se reconnaître partie de ce grand tout qu'est l'Église Universelle. L'Église, nous dit V. Soloviev, est "le rocher indestructible de l'unité universelle et de la solidarité"26. Si la Russie s'affirme dans son identité chrétienne, elle doit avant tout retenir du Christianisme ce qui est essentiellement chrétien, c'est-à-dire le Christ lui-même. Elle doit, comme le Christ, être capable de renoncer à soi pour les autres, et c'est ainsi seulement, en faisant preuve de courage dans l'abnégation, que s'affirmera sa véritable identité.

"Nous devons envisager l'humanité comme un tout, - écrivait-il-, comme un être immense et rassembleur ou un organisme social, dont les membres vivants sont les différentes nations. De ce point de vue, il est clair qu'aucun peuple ne peut vivre en soi, par soi et pour soi, mais la vie de chaque peuple représente seulement une participation particulière à la vie générale de l'humanité. La fonction organique qui repose sur telle ou telle nation dans cette vie universelle - voilà sa véritable idée nationale, établie de toute éternité dans le plan divin"27.

Si, par ces prises de position, V. Soloviev s'opposait à l'attitude prédominante de l'Église russe à son époque et s'attirait les foudres des autorités, il n'en demeurait pas moins dans la ligne d'une tradition de pensée qui n'était pas nouvelle en Russie. Déjà, à travers leurs écrits sur Pouchkine, d'autres grands écrivains russes comme Gogol et Dostoïevski, avaient relevé cette aptitude de la nature russe à s'identifier à toutes les autres nations, à être russe par le fait de son universalité. Mais V. Soloviev était le premier à envisager cette question sans a priori nationaliste, et à la rapporter à l'essence même du Christianisme. Il donnait ainsi une approche en profondeur du cheminement historique de la Russie. Enracinant le sens de l'histoire dans l'être de l'homme, il s'accordait déjà à la démarche de quelques grands philosophes du XXème siècle qui, comme Husserl et Heidegger, allaient engager, sur des bases transcendantales, des interprétations de l'histoire de l'Occident. Mais à l'avance, il se démarquait déjà d'eux aussi, en tant qu'il était un penseur de la Russie. En tant que russe et en tant que s'interrogeant sur l'histoire

chrétienne de la Russie, c'était à l'être chrétien de l'homme qu'il s'adressait, à l'être humain en tant qu'il est chrétien. Pour Soloviev, -et ce sera aussi le cas pour N. Berdiaev -, il s'agissait de développer une vision de l'homme adéquate au sens profond du devenir de la Russie, mais par là-même, il s'agissait aussi de mettre au jour, face à l'Occident, l'approfondissement d'une façon d'être, au sein du Christianisme, autre que celle qui avait, en priorité, marqué l'Occident dans son histoire. Et de même que la Russie en tant que nation chrétienne et l'homme russe en tant que personne chrétienne se trouvaient appelés à s'ouvrir à l'Occident et à échapper ainsi au danger inhérent à leur être chrétien - celui du nationalisme et de l'extrémisme religieux -, de même l'Occident et l'homme occidental pourraient-ils, du fond de la différence ainsi assumée par la Russie au sein de la civilisation chrétienne -trouver, dans cette autre façon d'être, une réponse à l'aporie de leur propre devenir historique face à la crise de l'identité provoquée, à l'époque de la cybernétique, par l'immanence de l'homme à un réel sans délimitation fixe, ouvert à tous les possibles, face à la solitude et au désarroi moral de l'homme qui a accepté, pour lui-même, l'idée de ne plus avoir besoin de recourir à la transcendance de l'être28, face enfin à cet aboutissement extrême d'un devenir historial qui s'est développé sous l'appel constant de l'identité de l'être et de la pensée, mais qui n'a toujours utilisé son appartenance religieuse qu'à ses propres fins29, face à tout cela, l'homme occidental ne pourrait-il pas, en s'ouvrant au mode d'être spécifique de la Russie, prendre conscience qu'existe pour lui, en tant que personne humaine, une façon d'affirmer son identité autre que celle qui a prédominé dans l'histoire de l'Occident? Ne pourrait-il pas, pour lui-même, en tant que personne, faire une autre approche de l'identité, non distincte de l'appartenance religieuse, rattachée à elle, au contraire, de telle façon que l'ouverture à la transcendance se donne comme affirmation de son essence humaine? Des voies de cette ouverture possible de l'homme occidental à une affirmation de l'identité de l'homme par référence à l'appartenance religieuse ont déjà été tracées par quelques philosophes et théologiens, tout au long de l'histoire de l'Occident. De St Thomas à Pascal, de Barth à Rahner, de Kierkegaard et Blondel à Mounier, c'est le même pressentiment qui s'exprime, le même besoin de rattacher l'homme à une

appartenance religieuse afin que la réalisation de l'essence humaine ne débouche pas dans une impasse.

Lorsque N. Berdiaev rencontra, en France, dans les années 30 et 40 du XXème siècle, les représentants du courant personnaliste, c'est une entente fondamentale sur l'identité chrétienne de l'homme russe et occidental qui se fit jour alors. Aux philosophes français d'orientation chrétienne comme Emmanuel Mounier ou Gabriel Marcel, qui refusaient d'admettre la solitude ou la volonté de puissance comme seule issue pour l'homme contemporain, N. Berdiaev apportait avec lui l'expérience d'un peuple qui avait ancré son identité, non point dans la seule référence à la raison, mais dans une tradition religieuse qui avait, à travers les Pères grecs, allié, de tout temps, la raison et la foi, l'expérience et la formulation d'une appartenance religieuse. Les dérives de l'État russe, nombreuses et encore contemporaines de Berdiaev, ne portaient pas atteinte à la vérité profonde dont étaient précisément porteurs des penseurs comme lui, car, s'étant eux-mêmes rendu compte, avant la révolution, de la faillite de l'orientation radicale (socio-révolutionnaire puis socio-démocrate), ils s'étaient très vite réclamés d'une expérience russe plus profonde, plus en retrait peut-être, mais qui les maintenait en contact avec la tradition chrétienne la plus ancienne. Aperçue à travers le prisme de la religion, la Russie devenait pour eux ce qu'avait été pour Platon, dans La République, la façon d'envisager la question de la justice dans la société: saisir "en plus grandes lettres"30 ce qu'elle était, "dans les caractères du plus petit"31, en chaque individu. Pour eux, la Russie témoignait "en grosses lettres", par le sens profond de son histoire, de ce qui, à travers chaque expérience individuelle, rattachait de façon fondamentale, la personne humaine à la transcendance divine. Elle révélait une histoire en tant qu'elle était, dès son origine, orientée par le Christianisme, - une identité en tant qu'elle se voyait désignée par une appartenance religieuse. Et simultanément, elle renvoyait à ce qui avait été, selon eux, progressivement oublié par une autre histoire, - celle de l'Occident -, trop dépendante de la seule raison humaine, trop déterminée par le seul rapport de l'être à la pensée; elle renvoyait à une approche particulière de la personne humaine: la personne humaine non plus réduite à ce que pouvait en dire et en faire un type de pensée destiné d'abord à connaître le monde, mais la personne humaine comme

ouverture à autre chose qu'elle-même, la transcendant et lui donnant sens, la personne humaine comme mouvement de dépassement, de "transcendement", disait Berdiaev: non plus une substance, mais une énergie. Une des idées principales retenues par le concile palamiste de 1351, se trouvait portée en gros caractères par l'histoire de la Russie: "l'homme peut s'unir à Dieu non par son essence mais par son énergie"32, ou en d'autres termes: l'homme "est" lui-même et signe son identité, non pas en se disant selon un mode de la pensée adéquat à la formulation de l'être, mais en se reconnaissant dans ce qui le dépasse, le met en mouvement vers quelque chose d'autre que ce qu'il a fixé dans le monde, dans ce qui, simultanément aussi, vient à lui, accepte de se donner, de se livrer, de se laisser dire, de se laisser rencontrer. Un mouvement que Grégoire de Palamas repérait déjà à travers la succession et l'alternance de F'adhésion" (sceplenie) et la "séparation" (rassceplenie)33. Un mouvement qui permet à l'homme de s'expérimenter en tant que se rapportant à Dieu, en tant qu'image et ressemblance de Dieu. Mais un mouvement qui peut marquer aussi une histoire en tant que devenir de la rencontre entre une communauté d'hommes et Dieu. Ainsi en est-il de l'histoire de la Russie, imprégnée de son appartenance religieuse et renvoyant, par le mouvement de fond qui l'habite, à ce qui révèle, en chaque homme, son appartenance divine.

Lorsque N. Berdiaev arrivait en France avec son expérience bien particulière de la liberté, c'est toute cette approche de la personne humaine ancrée dans la révélation divine qu'il apportait avec lui et dont il voulait témoigner. En Russie, sa voix n'était pas nouvelle, elle se rattachait à une longue tradition, héritée de la patristique et qui avait traversé toute l'histoire spirituelle de la Russie pour se retrouver comme sujet de réflexion (sujet et non point objet) chez des penseurs comme Khomiakov, Nesmelov, V. Soloviev. Elle disait que l'identité ne devait pas être recherchée dans une définition, mais visée dans l'ouverture de soi à l'autre, c'est-à-dire dans une vie de communion, de remise en cause et de perpétuelle auto-création. Berdiaev apportait avec lui l'idée que l'identité personnelle devait se penser en étroite liaison avec l'appartenance religieuse, à travers ce qu'elle n'était pas encore, ce qu'elle était apte à devenir. "La personne, écrivait-il, est autre chose que la nature, comme Dieu est autre chose que la nature et la personne est en étroite dépendance avec Dieu"34.

Cette idée, transportée de Russie en Occident, ne se faisait pas seulement l'écho de ce courant de pensée chrétienne que nous avons déjà évoqué et qui restait en retrait de l'option philosophique qui avait orienté jusqu'alors l'histoire de l'Occident. A une époque où cette histoire se retrouvait dans sa phase ultime35, inapte à donner à la personne humaine une véritable assise identitaire, elle venait poser, sous forme d'une rupture par rapport au mode d'être et de penser qui avait prévalu dans le devenir de l'Occident, un autre horizon de vie intérieure, une autre façon, aussi, d'approcher la question de l'appartenance religieuse à partir d'une forme de devenir dans l'histoire. La religion n'était plus ce qui, réduit à sa seule nécessité mondaine, pouvait être d'autant plus rejetée que s'affirmait en lui-même et par lui-même le savoir humain, quitte à couper l'homme de ses racines spirituelles. Elle apparaissait ainsi comme ce qui, reconnue dans sa dimension historiale, pouvait révéler à chaque individu son mode d'être essentiellement humain et le chemin d'une identité à découvrir et à réaffirmer sans cesse. La question de la vocation prenait, en ce sens, tout son relief. Et E. Mounier pouvait affirmer, comme en réponse à N. Berdiaev: "Ma vocation transcende mon existence comme l'éternel transcende le temporel"36. Avec lui, comme à travers l'histoire de la Russie, comme à travers l'expérience vécue et reconnue des penseurs russes, se dégagent encore deux horizons d'existence qui peuvent coexister, mais qui se trouvent confiés au choix afin que puisse être réellement orientée une histoire. L'acte de conscience réapparaît comme primordial. Dans le domaine russe, il nous renvoie de nouveau aux extraits où V. Soloviev s'appuyait sur l'idée de la liberté humaine en Dieu. Dans le domaine occidental, Karl Rahner est sans doute le théologien- philosophe qui représente le mieux le nouvel éclairage que la personne humaine peut recevoir de son appartenance chrétienne. Dans le traité fondamental de la foi, il reprend, pour indiquer à tout individu la voie de son affirmation personnelle, cette idée de mouvement de fond que nous avons déjà évoquée, propre au rapport de l'homme à Dieu, "C'est seulement, nous dit-il, là où règne l'infinité de l'être - se dévoilant et se dérobant - qu'un étant trouve la place et le lieu à partir duquel il peut s'assumer et répondre de soi"37. Et simultanément, il parle du "règne de ce à quoi... l'homme est ouvert"38, fondant ainsi, dans la

réalité personnelle de Dieu, son analyse de l'historicité du christianisme

Etonnamment, nous voyons se faire, dans la culture occidentale, un cheminement en sens inverse de celui qui s'est fait en Russie. On ne part pas de la nature de l'histoire pour lui rapporter, analogiquement, certaines caractéristiques de l'expérience humaine en quête d'identité, mais l'on part de l'homme et de son aspiration à ne point se réduire à ce qu'en a fait une histoire, pour projeter sur le devenir humain un regard ancré dans la liberté de l'homme en Dieu. Ce phénomène révèle et confirme encore la nature chrétienne de l'histoire culturelle de la Russie qui, pour s'instaurer, n'a pas eu besoin de se heurter, au sein du monde civilisé, à un autre horizon historique déjà là. C'est pour cette raison que nous avons pu déceler, grâce à l'histoire de la Russie et avec l'aide de quelques penseurs, historiens et theologiens russes, comment l'identité - quelle soit nationale ou personnelle - pouvait être penseé en lien étroit avec 1'appartenance religieuse. Karl Rahner pour 1'Occident renvoie à ce que dégageait V.Soloviev de 1'histoire chrétienne de la Russie. Au moment ou s'accomplit, en Occident, une forme de devenir historial, au moment ou se termine, en Russie, une dérive totalitaire, ces deux références philosophiques et théologiques simultanément, peuvent nous diriger vers une facon d'envisager l'identité qui ne soit pas séparée de 1'appartenance religieuse, mais qui, au contraire, dans le contexte de la civilisation chrétienne, la confirme comme pouvant être le lieu privilégié de la rencontre de 1'homme, en tant que personne, et de 1'histoire, en tant qu'universelle.

Belonging to a Religion, an identity: Vladimir Solovieffs contribution

Man's identity discloses itself when man relates to the world. The identity of the West was disclosed by Heidegger as being stamped by historicity, the historicity of a process of growth. By reference to the same principle, we can look back on the history of Russia and attempt to think it out by means of what her thinkers said about it. V. Solovieff, in particular, may allow us to bring out its main point: Russia's aptness to authenticity or inauthenticity vis-à-vis

of that which is basically determining in her, which amounts to her belonging to a religion. A specific make within the world-wide Christian setting emerges, rooted as it is in the heritage of the patristic tradition, which may on that very account be a response to any man's confrontation with the aporiae of the history of metaphysics in the West.

1 Texte publié dans sa traduction française, in M. Heidegger, Questions I,

Gallimard, Paris, 1968, p. 257.

2 Ibid., p. 261.

3 Ibid., p. 259.

4 Ibid.

5 Ibid.

6 V Soloviev, L'idée russe (conférence prononcée en français par V. Soloviev, à Paris, dans le salon de la princesse L.I. Sayn-Wittgenstein, le 25 mai 1888), publiée dans sa version russe par la maison d'édition Zirn 's bogom Bruxelles, 1964, p. 8 (trad. du texte russe M.D.).

7 N. Berdiaev, L'Idée russe, problèmes essentiels de la pensée russe au XIX èmeet début du XXème siècle, trad. et notes de H. Arjakovsky, ed. Mame, Tours, 1969, p. 9.

8 Danzas, L itinéraire religiux de la conscience russe, Juvigny, 1936.

9 Ibid., p. 13,14.

10 A ce sujet, cf. de Pierre Kovalevsky, Saint Serge et la spiritualité russe, ed. du Seuil, Paris, 1958, col. Maîtres spirituels., et de Jean Meyendorff, Saint Grégoire de Palamas et la mystique orthodoxe, Seuil, Paris, 1959, col.. Maîtres spirituels.

11 Op. cit., note 6.

12Op. cit., p. 8 et 9. (Trad.M.D.).

13 Ibid., p. 8. (Trad.M.D.).

14 Ibid., p. 9. (Trad.M.D.).

15 Ibid., p. 16. (Trad.M.D.).

16 Ibid., p. 16, 17. (Trad.M.D.).

17 Cité dans 1'article de S. Averintsev, Moscou, Troisième Rome, Essence et prémisses d'une idée, trad. par J. Johannet in Histoire de la Littérature russe, des origines aux lumières, ed. Fayard, P. 1992.

18 Faute de ne pas s'être produite en 1492, la fin des temps avait été fixée selon le nouvel almanach de Scheffer, édité à Venise et répandu en Russie par le médecin catholique N. Bülow, en 1524. A ce sujet, cf. N. Ross, "L'attente eschatologique. La vision de l'achèvement des temps en Russie...", Istina, 3, 1875, p. 326, cité in Florensky, Les voies de la

théologie russe, trad. J.C. Roberti, Desclée de Brouwer, P., 1991, p.47, n.41.

19G. Florovsky, Les voies de la théologie russe, trad. J.C. Roberti, Desclee de Brouwer, Paris, 1991, col. Théophanie. T.1.

20 Ibid., p. 21.

21 Ibid.

22 Ibid., p. 16. (Trad.M.D.)

23 Ibid., p. 43.

24 Ibid., p. 103.

25 Ibid.

26 Ibid.

27 V. Soloviev, L' Idée russe, op.cit., p.8.

28 Situation que M. Heidegger homme l' «arraisonnement».

29 A ce sujet, cf. E. Jüngel, Dieu mystère du monde, T.I., Cerf, P., 1983.

30 Platon, La République ou de la justice, livre deuxième 368 e.

31 Ibid., p. 369 a.

32 Cité par S.S. Khoruzij, "Neopatristiceskij sintez i russkaja filosofija" (Synthèse néopatristique et philosophie russe), Voprosy filosofii (Questions de philosophie), 1994, n° 5, p.83.

33 Ibid., p. 85.

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34 N.Berdiaev, 5 méditations sur l' existence, p. 166.

35 A ce sujet, cf. M. Dennes Russie - Occident, philosophie d'une différence, ed. Mentha, 1991.

36 In J. M. Domenach, Emmanuel Mounier, Seuil, P., 1972., col. Écrivains de toujours..

37 K. Rahner, Traité fondamental de la foi, le Centurion , Paris, 1983, p. 48.

38 Ibid.

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ПРОБЛЕМА ЛИЧНОСТИ И ОБЩЕСТВА В ФИЛОСОФИИ ВЛАДИМИРА СОЛОВЬЕВА

Время преобразовательных процессов в социальной жизни актуализирует проблему личности в философии. Ныне в обществе сформировался устойчивый и долговременный спрос на творческого, свободного, критически мыслящего, инициативно-

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