Anna Belova
Institut d'études orientales près l'Académie des sciences de Russie (Moscou); [email protected]
Isoglosses sud-arabiques archaïques
L'article ci-dessous expose les faits lexicaux découverts dans les langues sémitiques, notamment l'arabe classique de la poésie préislamique et des textes des premiers siècles de l'Islam (Arab), les dialectes arabo-yéménites modernes (Yém), les langues sud-arabiques épigraphi-ques (ESA), les langues sud-arabiques modernes (MSA). Les correspondances avec d'autres langues sémitiques et non-sémitiques peuvent également être ajoutées. Les exemples d'isog-losses cités et examinés ci-dessous montrent des vestiges du substrat sud-arabique présemi-tique (non-sémitique) et des traces de l'héritage afro-asiatique commun.
Mots-clés : langues sémitiques, arabe classique, dialectes arabo-yéménites, langues sud-arabiques épigraphiques, langues sud-arabiques modernes, isoglosses, substrat.
Dans cet article, il sera question de certaines isoglosses lexicales reliant l'arabe classique précoce, les dialectes arabo-yéménites et les langues sud-arabiques épigraphiques et modernes dont la sémantique est révélatrice de la vision du monde des ethnies porteuses de ces langues. Il s'agit, en premier lieu, de quelques verbes, parfois dénominatifs, ayant développé des sens spécifiques.
Dans le lexique des langues sud-arabiques modernes ainsi qu'anciennes, on peut discerner des isoglosses particulières. Celles-ci sont représentées : (a) par des verbes de « spécification » ; (b) par des termes mythologiques qui ne sont connus que des langues à usage oral.
Nous ajoutons à notre analyse lexicale une notion de « spécification » (on peut aussi utiliser le terme de « spécialisation » du sens), un terme pertinent pour distinguer ce phénomène sémantique dans nos langues, d'autres faits connus comme « restriction du sens d'un mot ». Habituellement, on considère la restriction du sens comme un processus historique. Or, dans notre cas, nos données sont clairement en faveur d'une dérivation synchronique. Les verbes spécifiés comportent deux sèmes, par exemple : « action + temps d'action », « mouvement + orientation/but d'action », etc. Le verbe peut remonter à une racine nominale monosémique. Dans le lexique arabe moderne, on peut observer l'extension (généralisation) du sens des verbes spécifiés, par exemple Arab. wrd (v.) « descendre la pente pour aller à l'eau, à l'abreuvoir » > « arriver » ; sbh (v.) « faire qqch. (« venir, manger, boire » etc.) au matin » > « devenir » (par exemple « devenir peintre »).
La plupart des verbes spécifiés peuvent être définis comme verbes dérivés, verbes dénominatifs. Pourtant, il existe également des verbes spécifiés dont l'origine reste inconnue. À la différence du premier groupe lexical (a), les termes mythologiques ne sont pas des dérivations : au contraire, ils présentent des thèmes nominaux primaires. Ces termes sortent des limites sud-arabiques et forment une isoglosse afro-asiatique.
Il faut souligner un fait remarquable : la plupart des unités arabes examinées dans l'article sont déjà tombées en désuétude ou bien leur sens et leurs fonctions ont changé tandis que leurs correspondances dans les langues sud-arabiques modernes restent en usage et sont attestées dans les dictionnaires au XXème siècle.
Journal of Language Relationship • Вопросы языкового родства • 13/2 (2015) • Pp. 79—89 • Belova A., 2015
La vie nomade
1.0. Le temps d'action
1.1. « matin/morning » — *sbh
Arab. subh-lsabah- (n.) : sbh (v.) « faire quelque chose au matin : venir, se trouver quelque part ; manger, boire », etc. aussi Ilème et IVème thèmes [BK I : 1303 — 1304] ;
ESA : Sab. sbh (v.) « faire quelque chose de grand matin » [SD : 140] ;
Éthiosém. : Gz. sabah 'morning' [Leslau 1987 : 545]: les correspondances du lexème sont aussi attestées dans la plupart de langues éthiosémitiques modernes : Tna. sabbah (Kane 2000: 2575), Tgr. sdbdh, sdbhat (Littmann — Höfner 1962: 639), Amh. täbat, tabat, twat (Kane 1990: 2140), Arg. tawwah (Leslau 1997: 224), Zay tab, Muh., Gog. tabä, Muh. tabena, Sod. täbtät, tätbät (Leslau 1979: 608), Gaf. säbbä « faire jour » (Leslau 1956: 233) ;
MSA : Mhr. a-söbah, Jibb. e-söh 'to take the goats/cows out for a while in the morning; to come to s-o in the morning'; Mhr. ha-sbah, E., C. e-sbâh 'to be / become / go in the morning' [Johnstone 1987: 356—357], Soq. sbah et ?esbah « entrer dans la matinée, devenir tel ou tel le matin » [Leslau 1938 : 344].
1.2.1. « nuit/night » — *gmd
Arab. gmd (v.), VlIIème thème « entrer dans la nuit, dans l'obscurité » [BK II : 501] ;
MSA : Jibb. o-göd Mhr., Jibb. ga-gmöd 'to go at sunset' ; 'to be / come in the early evening', Soq. â'mad, Hars. a-gmod 'to pass the night' [Johnstone 1987: 137—138].
1.2.2. « nuit/night » — *ghm
Arab. ghm (v.), IVème thème « être sombre », VIIIème thème « s ' en aller dans la partie de la nuit dite gahm-at- ; gahm-at- (n. f.) « la partie la plus obscure de la nuit, c.-à-d. soit minuit, soit la troisième partie de la nuit » [BK I : 346—347] ;
MSA : Mhr. gdhem, E. ghem, C. gehem 'to go in the morning', s-thème: sa-ghöm, C. sa-ghim 'to come at the end of the night' [Johnstone 1987: 116 — 117]. Voir encore Soq. gehem « faire quelque chose à midi, arriver à midi, se reposer » [Leslau 1938: 103].
1.2.3. « obscurité, ténèbres » — *tlm
Arab. îadlama IVème thème « se trouver dans l'obscurité ; voyager dans l'obscurité » [BK II : 140 — 141] ;
MSA : Mhr. a-thème a-dölam 'to take camels out at night', E. edulm, C. edulm 'to go out late at night'; Mhr. a-dalöm 'to go (livestock) out to night pasture' [Johnstone 1987: 84]. Voir encore Soq. telim « manger le soir » [Leslau 1938: 204]. (Sém. *çlm « obscurité, ténèbres »).
1.2.4. *twy est attesté en arabe comme thème nominal :
Arab. 'a-twa'- (n. pl.) « parties, heure de la nuit » [BK II : 125 — 126]' cf. Yém. talyi-tï (imperf.) «(herunter) kommen» [Behnstedt : 792 — 793].
MSA : Mhr. tawü 'to come, visit at night', hd-twü, E., C. e-tbë, Hars. a-twö 'to bring at night' [Johnstone 1987: 413];
Deux exemples cités ci-dessous présentent d'autres thèmes verbaux en Arab. et en MSA dont
les correspondances nous échappent.
1.2.5. *trq
Arab. trq (v.) « venir de nuit chez qqn / dans un lieu ; sortir de nuit ; faire une incursion de nuit » ; tariq- (prt. act. du 1er thème) « qui voyage / qui rôde pendant la nuit » > « hôte de nuit » ; « étoile » [BK II : 75 — 78]. Cf. arabe moderne taraqa-t-tarïq « cheminer, voyager, marcher », ou tarïq- (n.) « chemin, route (en général) » [Dozy 2, 1881 : 38]. Le thème verbal trq « venir de nuit » n'est attesté pour ce sens que dans le lexique arabe. Il semblerait que ce verbe ne soit pas dénominatif.
1.2.6. Voir encore dans MSA : Mhr. bûr/yd-bâr (v. < *b'r) 'to go by night, be out at night', Soq. bo'or 'to come / go / happen at night' [Johnstone 1987: 41, Leslau 1938: 92].
1.2.7. *nfs
Arab. nfs (v.) 'the sheep/goats/camels pastured by night / dispersed themselves by night' [Lane I, VIII: 2829—2830];
MSA : Mhr. nëfus, Jibb. enfés 'to take the goats to pasture in the afternoon; to take away in the afternoon, early evening' [Johnstone 1987: 285], Soq. nofos « aller dans l'après-midi, le soir » [Leslau 1938: 272]. Dans les textes de [SE, VII]: Jibb. nfos ad be-enheg, Soq. nôfôs 'af yhe be-filigoh «er ging am Nachmittag als er auf dem Hochweg war» [SE, VII: 24, № 10(3)].
Remarque: La plupart des verbes cités (1.2.1. — 1.2.7) chez les tribus nomades arabiques se rapportent au temps de la nuit. Cela ne semble pas étonnant puisque ce temps est le plus favorable pour faire paître le bétail, le plus propice au voyage, aux incursions, etc.
2.0. Façon d'agir, but de l'action
2.1. *ragad- (n.) « vie dans l'aisance »
Arab. ragad- (n.) « vie aisée au sein de l'abondance », rgd (v., caus. IV. thème) « laisser paître librement les bestiaux » [BK I: 888; Lane I, III: 1112] ;
MSA : Mhr. a-rogdd (caus) 'to leave camels somewhere by themselves', Jibb. e-rogud 'to spoil a child', Hars. regâd 'left unattended' [Johnstone 1987: 319].
2.2. *zml « charge d'une bête de somme »
Arab. ziml-/zamil-/zamïl- (n.) « qui est en croupe ; qui monte une monture derrière un autre ; charge d'une bête de somme » [BK I : 1013] ; verbe : zml 'to ride behind another on a camel and to carry the food, household goods' [Lane I, III : 1252 — 1253]2.
Yém. zml (v.) 'to carry a load on large cattle; to sing zâmïT [Piamenta: 204—205]; «singen bei Marschieren» [Behnstedt: 508]; Hadr. zaml « bât (pour monter à dos de chameau) » [Landberg Hdr : 67, 94, 599];
MSA : Mhr. zdmùl (v.) 'to put the pack-saddle-girth on a camel's back', E., C. zol 'to put grass-filled pads on a camel's back and tie this on with a long rope', Soq. zômdl 'to follow the pastures'; Mhr. zdmul (n.) 'camel-gear' [Johnstone 1987: 468].
1 Dans le Qur'an [81 — 1, 3] wa s-sama'i wa t-tariqi « [je jure] du ciel et de l'étoile du matin ! » Selon le commentaire traditionnel : at-târiq — an-nagmu z-zahir laylan / at-târiq — « c'est une étoile qui paraît la nuit » (voir aussi [Krackovskij 1963 : 484, 630]).
2 Cf. arabe moderne : zamïl- (n.) « compagnon de route ; collègue » [Wehr 1952 : 346 ; Baranov 1976 : 334].
2.3. *rahl- « selle de chameau »
Arab. rahl- (n.) « selle de chameau » ; verbe du Vème thème « bâter un chameau ; se mettre en route » [BK I : 836] ;
ESA : Sab. rhl « équipement (e. g. saddle) » [SD : 116] ;
Éthiosém. : Gz. rahala 'to saddle, put equipment (on a beast)' [Leslau 1987: 466];
Syr. rahl id. [Zammit : 191].
Remarque: En plus du sens général du thème, rhl Arabe et MSA ont le même thème verbal au sens spécifié. Arab. *rhl (v.) et Mhr. rahal (v.) 'to bring water from a distance (use by camel)' [Johnstone 1987: 321]. En arabe un vestige de la spécification est attesté dans la forme nominale dérivée mi-rhal- « homme chargé du service d'eau nécessaire pour les voyageurs » [BK I : 838—839].
2.4. *sdr — antonyme à Sém. *wrd « descendre à l'eau, à l'abreuvoir »
Arab. sdr (v.) « retourner de l'abreuvoir » [BK I : 1318 — 1320] ;
Yém. : Dof. sdr (v.) «vom Wasser, Tränke zurückkehren, emporsteigen» [SE, X: 33];
MSA : Mhr. sadür 'to come up from water', E., C. sodor id., H. sadör id.
2.5. *kbwl*kbb
Arab. kbwlkbb (v.) « tomber le visage contre terre ; renverser » [BK II : 856] ;
Yém. kbb (v.) 'to lean ; recline' [Piamenta: 423];
Dof. kbw (part.) «kopfhängerisch: mit der Nase im Staube»; kbb (IVème thème) «sich bücken» [SE X: 51];
MSA : Mhr. kbb (v.) 'go down / sich beugen, verbeugen', Hars. kbüb Jibb. ekbéb 'to stoop, lower (head)'. Mhr. kâttab (dériv.) 'to lie face down' [Johnstone 1987: 201].
De la spécification à l'extension (généralisation) du sens :
2.6. *mrk
Arab. mrq (v.) « percer (d'un coup de lance) » ; VIIème thème « traverser de part en part au point de sortir de l'autre côté (une flèche) » [BK II : 1094—1095] ;
MSA : Mhr. maruk, E., C. mérok 'to go in and out, through; to stick out' [Johnstone 1987: 269].
3.0. Le domaine de la vie quotidienne
3.1. l'adoption et l'élevage — *rbb
Arab. rbb (v.) Ier et IIème thèmes « élever, donner l'éducation à un enfant » ; rabb- (pzt.) « beau-père », rabb-at- (f.) « belle-mère », rabïb- (adj. pass.) « esclave élevé ; beau-fils, fils adoptif (rabïb- id. f.) » [BK I : 798]. Voir encore Nab. rbb 'foster-father' (< arabe?) (HJ 1052) ;
Yém. rabïb (m.), rabïb-a(t) (f.) «Stiefsohn, Stieftochter» [Behnstedt : 422], 'stepson (from wife)' [Piamenta: 172]; Dof. rbb (v.) IIème thème «erziehen; Tier halten, aufziehen» [SE, X, II: 21].
ESA : Sab. rbb (n.) « otage/hostage », '-rbb-w (n. pl.) « protégé / person under protection »; rbb (v.) « posséder / own, possess » [SD : 114].
MSA : Mhr. rdbltd-rbüb (v. f.) '(she-camel) to become disoriented, accept a "tulcan" as substitute for a lost young one', E. réb, C. rbe (v. f.) id.; Mhr. ha-rbüb (caus.) 'to induce a she-camel to take a young one not her own and rear it', C. e-rbéb id. [Johnstone 1987: 311].
Remarque: Voir encore: Arab. rabb- (n.) « maître, seigneur ; possesseur, propriétaire d'une chose » [BK I : 798— 800] ;
Yém. rabb «Herrgott» [Behnstedt : 421—422] ;
ESA : Sab. rb-m (n.) 'Lord (divine title)' [Biella : 475] ; '-rbb-w (n. pl.) «Eigentümer, Schiffseigner» [Müller 2010: 199];
MSA : Mhr., E., C. rab 'Lord' [Johnstone 1987 : 310], probablement un arabisme ;
Éthiosém. : Gz. rabbi 'teacher' (< Hbr. rabbi) [Leslau 1987: 460]; Amh. räbbi 'teacher' (< Hbr. rabbi) [Kane 1990: 390], Tna. räbi 'the Lord, God' (< Arb. rabbi) [Kane 2000: 262], Te. rabbi 'God' (< Arb. rabbi) [Littmann — Höfner 1962: 152] ;
Aussi Sém. : Akk. rabu (in Titel) [KB 868], rabbû [CAD R 16], rabû 'large; main, principal, chief; elder, senior; adult; important; great, weighty, grievous' (CAD R 26—27), Hbr. rab «Oberst, Anführer» [KB : 868], 'zahlreich, viel' [KB 1092]; rbb «zahlreich sein/werden; gross sein (Js 6:12)» [KB 1096], raba «zahlreich werden, sich mehren» [KB 1097] ;
Ug. rb 'great, large' [DUL 727], 'chief, sheikh, grandee' (DUL 728), Pho. rb 'chief' (T 298), 'great' (T 300); rb 'many; greatly' (T 300), Aram. Anc. rbh 'master, sir' [HJ 1052], rb 'head, chief, commander; numerous; big, large; important, great' (HJ 1047—51), rby 'to be great, to become great' [HJ 1053], rbw 'greatness, magnificence' (HJ 1052), Syr. rba(7) 'magnus evasit; crevit; adolevit; auctus est' (Brock. 707), rab 'magnus evasit, fuit', rabbä(J) 'magnus' (Brock. 706) ;
Arab. raba « augmenter, s'accroître; gravir une hauteur, une colline; grandir, être élevé » (BK I 813), dérivé de la racine sémitique commune « être grand ».
Par conséquent, le thème 3.1. rbb « possesseur / possession » peut entrer dans le champ sémantique plus large du Sém. *rbb/rbV « être grand ».
3.2. 'll < gll « substituer quelque chose pour calmer, consoler quelqu'un »
Arab. 'll (v.) (i, u) « tenir lieu d'une autre chose (se dit de toute nourriture, d'un amusement qui fait que l'enfant ne pense plus au lait de sa nourrice, de tout objet qui distrait la pensée d'une autre chose) » ; Ilème thème « calmer un enfant qui pleure en lui donnant quelque chose pour l'amuser ; distraire quelqu'un de ses pensées, de ses soucis » ; thème V. « être allaité (aussi : nourri, apaisé) par qqch. donné en guise de lait (de l'enfant à qui on a donné à téter pour le calmer) » ; « s'occuper de quelque chose et s'en contenter au point de se distraire et de ne plus songer à autre chose » [BK II : 334—336] ;
Yém. 'll ('ala) 'to libel, accuse falsely' [Piamenta: 336]. Voir encore Arab. gll3 (v.) « tromper, frauder » [BK II : 487] ;
ESA : Sab. y-gl-n (v. imp.) « s'approprier, retenir frauduleusement » [SD : 53] ;
MSA : Mhr. gdl (v.) 'to console a (crying) child', C. gell id. ; 'to be happy and as a result neglect duties' (aussi — formes verbales dérivées) [Johnstone 1987: 135].
Remarque: Nous y observons l'exemple du développement sémantique « substituer qqch. pour calmer, consoler qqn » > « tromper ».
On peut ainsi citer des exemples de la spécification dans deux directions :
3.3. Sém. *plg « fendre en deux »
ESA : Sab. h-flg « creuser un chenal pour l'eau » [SD : 44] ;
Arab. flg (IIème thème) « faire espace entre les dents (pour être belle) » ; MSA : Mhr. földg (v.) '(woman) to make a separation between the teeth (for cosmetic reasons)' [Belova 2010: 276, № 1.0 — 1.1].
4.0. Nom d'un objet matériel et ses dérivés
4.1. *nsb/*ncb ndb < *nçb (n.) « arc, flèche; matière brute »
Arab. ta-ndub- (n.) « sorte d'arbre à épines qui croît dans le Hedjaz et dont on fait des flèches » ; ndb (v.) du IVème thème « tirer à soi la corde de l'arc au point qu'elle rende un son » [BK II : 1278 ; Lane I, VIII : 2805] ;
3 L'alternance consonantique (phonétique) '/g en arabe mérite également d'être mentionnée [Yuchmanov (1938) 1998 : 143 — 148 ; Majzel' 1983 : 165].
Yém. (Datina) mi-ntablmi-ntab (où t < d) n. « arc qui est hors d'usage ; actuellement, il est usité comme un jouet pour enfants » [Landberg Dat : 2770] Yém. (est) mi-ntab «Schleuder, catapult» [Behnstedt : 1218] ;
MSA : Mhr. md-nsdb-ët, E., C. ntob, Hars. ndsïb-dt 'bow' ; nasawb 'to shoot an arrow', E., C. ntob id. [Johnstone 1987 : 303], Höbyot ma-ntöb id. [Nakano 2013 : 83].
Remarque: Voir encore en Arab. (avec un réflexe latéral s < *s) nussab- (coll.) « flèches en bois » [BK II : 1257]4. On peut supposer ici l'alternance des consonnes latérales *s/ç.
5.0. Termes du rite ancien (ordalie)
Dans cette cérémonie, on peut mettre en valeur certains termes qui sont d'origine locale.
5.1. *rb' « protection ; aide, secours ». Sur la base de cette racine, un large champ dérivationnel s'est formé en Arabie Méridionale, en produisant des termes spécifiques.
Yém. ta-rbï' 'an ordeal by a red-hot rod of iron on which the accused passes his tongue three times' [Piamenta: 173 — 174] et — nom d'agent mu-rabbi' (prt. act. du IIème thème) « personne autoritaire qui exécute le tarbï' ; qui sait établir un criminel (ou — le trouver) » ; Voir encore Yém. mi-rabbi' «Sterndeuter» [Behnstedt : 428]. La spécification des termes revient au sens plus général : Yém. Hadr. rb' 9v.) IIème thème « protéger ; demander protection ; demander à être le « rabï' » (n.) de qqn » ; rabï' « voisin, compagnon » [Landberg Hdr : 582—585] ; Yém. d'ouest, Tihama rab' (n.) «Schutzsuchender» [Behnstedt : 426]. Le développement sémantique : « demander protection contre un crime, un criminel » donne en résultat certains termes du métier particulier.
MSA : Mhr. a-röba (< rb'), Hars. a-rbya 'to give s-o protection' [Johnstone 1987: 312];
ESA : On peut supposer que l'épithète de la divinité du panthéon sud-arabique RB'-n 'Quarter-moon' [Biella : 477] a un sens complémentaire de « protecteur ». Finalement, tous ces dérivés entrent dans le champ plus large de rab'-, rabï' — « hommes de la même tribu ». Cf. Sab. rb'-n (n.) « résidence » ; '-rb'-w (n. pl.) « groupe dans la population urbaine ; citadins » [SD : 113].
Arabe classique rab' « troupe d'hommes » ; rab'-lraba'-at- (n.) « habitation, village » [BK I : 807—810].
Remarque: Au Yémen, les termes spécifiques tarbï'/murabbi' ont les synonymes plus complets bas'-a(h) / ta-bsï' / mu-bassi' « ordalie ; personne qui exécute, tabsï', celui qui sait trouver un criminel » [Al-Baradünl : 55 — 56 ; Luqman : 21—22 ; Dostal 1990 : 200—201 ; 211 — 212] ; aussi : bs' (v.) du IIème thème «wahrsagen», mubassi' as-sarïgah «Wahrsager, der Diebstähle aufdeckt» [Behnstedt : 87 ; Piamenta : 32]. A la différence de RB', la racine BS' n'a aucune correspondance dans les autres langues sémitiques. Dans [DRS, I : 88], la base bassa' est marquée comme « méridionale ».
5.2. *mrt « chauffer, mettre sur le feu ; être chauffé au rouge/à blanc (se dit de la pierre, du fer) »
Yém (Dofar) mrt (v.) «glühen, weissglühen (vom Eisen, von Steinen)» [SE, X, II : 55] ;
MSA : Mhr. meratlyd-mröt, Jibb. mért, Soq. mérat 'to be heated red-hot, become red-hot' [Johnstone 1987: 270; 1981: 174; Stroomer: 290—291], Soq. mérot « chauffer, mettre sur le feu » [Leslau 1938: 251];
ESA : Qat., Min. mrt (n.) «Keramik/Terrakotta» [Sima 2000 : 299—301].
4 Les autres désignations de « flèche » en arabe sont sahm- et qadah-. Ils désignent des flèches de roseau.
Spécification : la racine verbale a ses dérivés avec le sens spécifique : « chauffer le fer pour réaliser l'ordalie ».
Yém. (Dofar) mrt v. IIème thème > prt. act. me-marrit / prt. act. du IVème thème mi-mrit. Cette forme nominale «bezeichnet den Mann, der das Eisen oder Messer glühend macht und der dieses Gottesurteil vollzieht» ; verbe du Xème thème «um dieses Gottesurteil gegen jemanden bitten» [SE, VIII : 34—35 ; SE, X, II : 55]. MSA : Mhr. hd-mrüt/yd-hd-mrüt, E., C. e-mrét, Soq. môrdt, Hars. a-mröt (caus.) 'to try by ordeal with a glowing iron' ; sd-mrüt (pass.) 'to be tried by ordeal with a hot iron' [Johnstone 1987: 270; 1981: 174]; il y a aussi des termes dérivés : md-hâ-mrdt 'ordeal giver, who lays a glowing blade on the tongue of a suspect', E. îmrdt, C. mû-mrdt id. [ibid.].
Par rapport à l'étymologie de la racine MRT, nous pouvons émettre deux considérations :
1) pour le sens étendu « chauffer qqch. », elle demeure une unité sud-arabique locale, tout à fait isolée ;
2) pour le sens plus spécifique « réaliser l'ordalie ; dévoiler un criminel », on peut lui trouver une correspondance avec évolution du sens. Éthiosém. : Gz. marat- (v.) 'foretell the future, divine' [Leslau 1987: 361], Amh. (a)mwarrätä 'prophesy, foretell, cast a spell to injure s-o' [Kane 1990: 187], mwart-änna 'foreteller of evil things; magician' [Kane 1990: 188] > Couch. (Qwmant amwarät 'foretell' [Conti Rossini 1912: 232, Leslau 1987: 362]). Selon [Leslau 1987: 362], cette racine est une formation secondaire du thème synonyme mry, mais on peut quand même y voir deux racines différentes.
Dans le cas (2), la racine MRT constitue une isoglosse sud-sémitique en présentant une unité commune de l'héritage sud-arabique. Dans le lexique arabe classique, la racine MRT n'est pas attestée au sens examiné ci-dessus5. Le sens essentiel de MRT « mettre quelque chose sur le feu » préservé dans MSA et dans les dialectes arabo-yéménites peut nous donner une explication supplémentaire pour le terme mrt dans ESA6.
Termes mythologiques
6.1. *buda
Yém. buda / bidah / bideh (f.) « elle peut transformer un homme en animal (âne, cheval). D'habitude, les buda sont des femmes de familles riches. Leurs grands-mères savent des secrets de magie » [Al-Baradùnï : 37—38] ; bidah, pl. bidat «eine Hexe» [Behnstedt : 64] ; bideh 'witch, sorceress, monster' ; biddäh 'a witch who transforms a person into an ass' [Piamenta: 23]; MSA : Ce terme spécifique n'est pas attesté.
Éthiosém. : Gz. buda 'one who causes harm by means of the evil eye' [Leslau 1987: 86]; Tna. buda 'sorcerer, person who can cast the evil eye' [Kane 2000: 1195], Amh. buda id. [Kane 1990: 934], Har. buda id. [Leslau 1963: 39], Gur. buda id. [Leslau 1979: 132], Te. bozzay (où
5 La racine arabe mrt « être nu, chauve » n'est qu'un homonyme consonantique.
6 La question de cette racine est traitée dans un contexte le plus large dans A. Sima [2000 : 299 —301]. A. Sima suppose que le terme mrt (selon l'auteur arabo-yéménite al-Iryani 1996) remonte au yém. — arab. murr- «von Erdmaterial, guter Ton... für guten Keramikgegenstände» [ib. 301]. Mais dans ce cas, il nous faut expliquer la forme mrt comme une dérivation avec le suffixe du genre féminin *mr-t. Compte tenu du sens du verbe mrt « mettre sur le feu », on peut en proposer une autre interprétation. ESA mrt remonte, quant à lui, à la racine trili-tère signifiant « argile cuite ».
d > z) 'magician' [Littmann — Höfner 1962: 291]; voir encore Leslau 1987: 86; Mondon-Vidailhet: 4—5.
Couch. : Bilin böda l bawda, Xamir, Qemant, Afar buda, Somali bida, Oromo bawda, Omot, Kafico, Bworo budo < *bawad « werewolf/loup-garou; sorcier, magicien » [Dolgopol'skij 1973: 238]; La reconstruction du tchadien de l'ouest : *bad « sorcier »; La reconstruction afro-asiatique : *bawVd « sorcier » [HSED, № 247: 62].
6.2. *zar (n.)
Yém. zar (n.) « une espèce de ginn qui provoque un accès d'épilepsie ». Selon une autre explication, « zar peut se transformer en beau garçon ou en belle fille » [Al-Baradûnï : 39] ; zar 'jinnis coming from the Red Sea and living in the plains of Tihämah' [Piamenta : 195] ; de même — on trouve sous la racine zwr 'a species of jinni that inflicts with epilepsy' ; IIème thème verbal — 'to cause epilepsy' [Piamenta : 208] ; MSA : Soq. (sous la racine verbale zrr) « user de sorcellerie » ; zehereh (n. f.) « sorcière » [Leslau
1938 : 151 — 152] ; également Soq. zer (v.) 'to cast a spell' [Johnstone 1987 : 468] ; Éthiosém. : Tna. zar 'a spirit that possesses people, possession by this spirit' [Kane 2000 1970], Te. zar 'evil spirit' [Littmann — Höfner 1962: 495], Amh. zar 'spirit which inhabits lakes, wilderness areas or trees and which possesses people' [Kane 1990: 1624], Gur. zar 'spirit that possesses a person' [Leslau 1979: 713] ; voir aussi Majzel' 1983 : 213.
Le monde des jinnis, invisible et imaginaire, existait en parallèle de toutes les religions et cultes en Arabie. Ce monde était plus ancien et archaïque que les panthéons complexes avec des temples, des objets sacrés et des statues. De plus, celui-ci reste toujours plus stable que ceux-là. Le nom de l'esprit maléfique peut être en rapport avec la racine signifiant « tourner, faire des détours » : Éthiosém. : Gz. zoralya-zur (< zwr) v. 'go around, turn around', Tna., Amh., Gur, Te., Arg. id.
[Leslau 1987: 646]. Cf. Akk. Ass. zar-u 'to twist, turn round' [CDA: 445]. Couch. : *3AR (II) « nom d'un démon malfaisant / evil ghost » (données de Bilin, Xamta, Awi-
ja, Rendille et quelques autres) [Dolgopol'skij 1973 : 129]. Remarque: Professeur A. Dolgopol'skij a reconstruit une protoforme couchitique comme *3AR « divinité du ciel » (I) ; « esprit malin, démon malfaisant » (II), mais il considère les variantes des peuples Bilin, Xamta et Awija comme « amharismes » [ibid.]. Selon les données des ethnographes (Prof. M. Rodionoff, Prof. W. Doum), le terme zar est largement répandu dans toute l'Arabie, en Tihama et dans les dialectes arabes le long de la vallée du Nil.
En pleine conformité avec ce monde parallèle, son lexique et les noms de ses personnages nous font revenir aux temps les plus éloignés de l'époque historique. On peut supposer que certains lexèmes (verbes et noms) reflètent la situation présémitique. Les correspondances trouvées dans des langues africaines révèlent des traces de substrats anciens ou de contacts culturels historiques entre les habitants de l'Arabie Méridionale et ceux de l'Afrique orientale.
Abréviations
Akk — akkadien ; Amh — amharique ; Arab — arabe classique ; Aram — araméen ; Aram Anc — araméen ancien, Arg — argobba (Éthiosém) ; C — dialecte central du jibbali (MSA) ; Chad — tchadien ; Couch — couchitique ; Dof — dialecte arabe en Dofar (Yémen, Oman) ; E — dialecte oriental du jibbali (MSA) ; ESA — langues sud-arabiques épigraphiques ; Éthiosém — éthiosémitiques ; Gaf —gafat (Éthiosém), Gog — gogot (langue éthiosémitique gura-gué), Gur — langue éthiosémitique guragué ; Gz — guèze ; Hbr — hébreu ; Hadr — dialecte arabe de Hadramoût ;
Hars — harsusi (MSA) ; Jibb — jibbali (MSA) ; Mhr — mehri (MSA) ; Min — minéen ; Mnd — mandéen ; MSA — langues sud-arabiques modernes ; Muh — muher (langue éthiosémitique guragué) ; Nab — nabatéen ; Qat — qa-tabanique (ESA) ; Sab — sabéen (ESA) ; Sém — sémitique ; Sod — soddo (langue éthiosémitique guragué), Soq — langue soqotri (MSA) ; Syr — syrien (langue) ; Te — tigré (éthiosém) ; Tna — tigrigna (éthiosém) ; Ug — ugariti-que ; Yém — dialectes arabes du Yémen.
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Anna Belova. On some archaic lexical parallels between the languages of South Arabia
The paper discusses a number of lexical matches encountered between such Semitic languages as the classical Arabic of pre-Islamic poetry and early Islamic texts, modern Yemeni Arabic dialects, epigraphic
South Arabian and modern South Arabian languages. Correspondences with other Semitic and non-Semitic Afro-Asiatic languages are also suggested. It is shown that the parallels in question point both to traces of a pre-Semitic (non-Semitic) South Arabian substratum and to elements of common Afro-Asiatic heritage.
Keywords: Semitic languages, Classical Arabic, Yemeni Arabic dialects, Epigraphic South Arabic, Modern South Arabic, lexical isoglosses, substrate theory.
А. В. Белова. Некоторые архаические изоглоссы в южно-аравийских языках.
В ходе этимологической работы над лексикой арабского языка доисламского и раннеисламского периодов выявляются архаические южноаравийские изоглоссы, охватывающие древние и современные языки Южной Аравии и сопредельных районов. В статье рассматриваются две лексические группы: (а) лексика, связанная с кочевым образом жизни, скотоводством, семейным обиходом, местными обычаями; (б) лексика, связанная с древними поверьями, изоглоссы которой охватывают также языки Восточной Африки. Соответствия этой лексике обнаруживаются в кушитских и чадских языках.
Ключевые слова: Семитские языки, классический арабский, йеменитские диалекты арабского, южно-аравийские языки, южно-аравийские эпиграфические языки, изоглоссы, субстрат