Научная статья на тему 'LE DIALECTE ET LES SCRIPTA FRANCIENS: PARTICULARITÉS DE SCRIPTA FRANCIENNES'

LE DIALECTE ET LES SCRIPTA FRANCIENS: PARTICULARITÉS DE SCRIPTA FRANCIENNES Текст научной статьи по специальности «Языкознание и литературоведение»

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Ключевые слова
HISTOIRE DE LA LANGUE FRANçAISE / DIALECTOLOGIE HISTORIQUE / SCRIPTOLOGIE / DIALECTE / SCRIPTA

Аннотация научной статьи по языкознанию и литературоведению, автор научной работы — Stanovaïa Lydia A.

Le fonds de textes manuscrits franciens est suffisant pour les recherches approfondies. L’opinion paradoxale de certains chercheurs affirmant l’absence totale d’attestations écrites du francien, est liée à la localisation imparfaite et souvent discutable de plusieurs manuscrits français, y compris de franciens. Les traits importants de scripta franciennes sont les suivants: (1) la coexistence de deux normes scripturales (étymologique et analogique) dans la représentation graphique de la déclinaison nominale; (2) l'homogénéité de l’usage linguistique, assurée par l’emploi majoritaire de formes franciennes; (3) le respect de protographes que les copistes franciens modifiaient avec modération.

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FRANCIEN DIALECT AND SCRIPTA: FEATURES OF FRANCIEN SCRIPTA

The corpus of francien manuscripts is sufficient for an in-depth study of the francien scripta. The paradoxical opinion of certain researchers affirming the total absence of written attestations of Francien, is linked to the imperfect and often discutable localization of several French manuscripts, including franciens. The important features of francien scripta are the following: (1) coexistence of two scriptural norms (etymological and analogical) of the graphic representation of the nominal declension; (2) homogeneity of language usage, ensured by the majority use of francien Forms; (3) respect of protographs that francien copyists modified with moderation.

Текст научной работы на тему «LE DIALECTE ET LES SCRIPTA FRANCIENS: PARTICULARITÉS DE SCRIPTA FRANCIENNES»

Международный информационно-аналитический журнал «Crede Experto: транспорт, общество, образование, язык». № 2 (29). Июнь 2021 (http://ce.if-mstuca.ru)

УДК 811.133.1

DOI 10.51955/2312-1327_2021_2_108

ФРАНСИЙСКИЙ ДИАЛЕКТ И ФРАНСИЙСКИЕ СКРИПТЫ: ОСОБЕННОСТИ ФРАНСИЙСКИХ СКРИПТ*

Лидия Анатольевна Становая, доктор филологических наук, профессор заведующая кафедрой романской филологии Российский государственный педагогический университет имени А. И. Герцена, наб. реки Мойки, 48 Санкт-Петербург, 191186, Россия lida_stan@mail.ru

Аннотация. Количество франсийских рукописных текстов достаточно для полноценных исследований. Парадоксальное мнение некоторых исследователей, утверждающих полное отсутствие письменных свидетельств франсийских диалекта и скрипты, связано с несовершенной и спорной локализацией многих французских рукописей, в том числе и франсийских. Важными особенностями франсийских скрипт являются: (1) сосуществование двух скриптуральных норм (этимологической и аналогической) графического представления именного склонения; (2) однородность языкового узуса, обеспеченная преимущественным употреблением франсийских форм; (3) уважительное отношение к протографам, которые франсийские переписчики изменяли умеренно.

Ключевые слова: история французского языка, историческая диалектология, скриптология, диалект, скрипта.

*Статья написана в рамках исследования при финансовой поддержке гранта Российского фонда фундаментальных исследований (РФФИ). Проект №19-012-00297 «Французские скрипты (региональные письменные традиции) IX-XIV вв.: имя и глагол», выполняемый в Российском государственном педагогическом университете имени А. И. Герцена. Руководитель проекта - Л. А. Становая.

LE DIALECTE ET LES SCRIPTA FRANCIENS: PARTICULARITÉS DE

SCRIPTA FRANCIEN^S*

Lydia A. Stanovaïa, Docteur d'Etat ès Lettres, Professeur Professeur, Directeur du Département de Philologie Romane Université d'Etat Pédagogique de Russie Herzen,

48, quai Moïka St-Pétersbourg, 191186, Russie lida_stan@mail.ru

Résumé. Le fonds de textes manuscrits franciens est suffisant pour les recherches approfondies. L'opinion paradoxale de certains chercheurs affirmant l'absence totale d'attestations écrites du francien, est liée à la localisation imparfaite et souvent discutable de plusieurs manuscrits français, y compris de franciens. Les traits importants de scripta franciennes sont les suivants: (1) la coexistence de deux normes scripturales (étymologique et analogique) dans la représentation

© Л.А. Становая, 2021

graphique de la déclinaison nominale; (2) l'homogénéité de l'usage linguistique, assurée par l'emploi majoritaire de formes franciennes; (3) le respect de protographes que les copistes franciens modifiaient avec modération.

Mots-clés: histoire de la langue française; dialectologie historique; scriptologie; dialecte;

scripta.

* Cet article est préparé dans le cadre du projet scientifique № 19-012-00297 soutenu par le Fonds Russe de Recherches Fondamentales.

FRANCIEN DIALECT AND SCRIPTA: FEATURES OF FRANCIEN

SCRIPTA

Lydia A. Stanovaïa Doctor of Philology, professor Head of the department of Romance philology Herzen State Pedagogical University of Russia,

48, Moika embankment St-Pétersbourg, 191186, Russie lida_stan@mail.ru

Abstract. The corpus of francien manuscripts is sufficient for an in-depth study of the francien scripta. The paradoxical opinion of certain researchers affirming the total absence of written attestations of Francien, is linked to the imperfect and often discutable localization of several French manuscripts, including franciens. The important features of francien scripta are the following: (1) coexistence of two scriptural norms (etymological and analogical) of the graphic representation of the nominal declension; (2) homogeneity of language usage, ensured by the majority use of francien Forms; (3) respect of protographs that francien copyists modified with moderation.

Keywords: history of the French language; historical dialectology; scriptology; dialect;

scripta.

A mes parents

1. Introduction

Le présent article constitue la deuxième partie de notre ouvrage «Le dialecte et les scripta franciens». Dans la première partie, nous avons établi la zone francienne scripturale, laquelle réunit les scripta de Paris, de l'Orléanais, de Soissons, de Senlis et de Compiègne [Stanovaïa, 2021]. La deuxième partie vise à décrire: (1) le corpus de textes manuscrits franciens conservés, que nous avons étudié; et (2) les traits particuliers de scripta franciennes.

2. Corpus de textes manuscrits franciens

2.1. Absence de textes manuscrits franciens avant 1200

Il ya plus d'un siècle que F. Brunot, réfléchissant aux problèmes de la formation de la langue française et au rôle du francien dans ce processus, a remarqué: «L'absence de manuscrits franciens rend très difficile l'examen de cette question, qui ne peut se résoudre que par des raisonnements» [Brunot, 1966, p. 327].

En effet, il n'y a pas de textes manuscrits français exécutés en Île-de-France avant 1200. Les premiers manuscrits en français apparaissent dans les scriptoriums et

les ateliers du centre de la France, y compris l'Île-de-France, seulement au XIIIe siècle. Cela signifie que tous les linguistes qui nient l'existence du dialecte francien en vertu de l'absence de manuscrits franciens avant 1200, ont raison. Cependant, parmi les textes manuscrits français exécutés avant le XIIIe siècle, il n'y a ni normands, ni wallons, ni bourguignons, ni beaucoup d'autres, ce qui n'a pas empêché les linguistes de distinguer les dialectes normand, wallon, bourguignon et d'autres.

En revanche, il y a des textes manuscrits anglo-normands du XIIe siècle, mais la distinction du dialecte anglo-normand a suscité des discussions animées: par exemple, G. Paris, F. Brunot, N. A. Katagoshchina, J. Wuest, et d'autres, ont refusé de distinguer le dialecte anglo-normand, car ils estimaient incorrect de qualifier de 'dialecte' le parler d'un petit groupe social, ou bien la langue écrite littéraire d'une partie de l'Angleterre, quelles que soient ses caractéristiques particulières.

Il y a donc une certaine discordance dans les raisonnements. Si on prétend que le dialecte francien n'a jamais existé parce qu'il n'y a pas de manuscrits franciens avant le XIIIe siècle, il faudra alors conclure que d'autres dialectes de l'ancien français n'ont pas existé non plus pour la même raison - l'absence de manuscrits avant le XIIIe siècle. Sinon, il faudrait admettre que la distinction d'un dialecte n'est pas conditionnée par la présence ou l'absence de manuscrits, et par suite, il faudrait suggérer d'autres raisons de la 'mythicité' du dialecte francien et de son rôle dans l'histoire de la langue française.

2.2. Etape monastique de l'écriture en France:les textes manuscrits français avant 1200

Le français des IXe-XIIe siècles est représenté par les manuscrits conservés de façon inégale tant chronologiquement que géographiquement.

Les premiers textes manuscrits français des IXe-XIe siècles sont peu nombreux: il n'y en a que quatre (la Séquence, ou Cantilène de Sainte Eulalie, ms Valenciennes 150, fin IXe-début Xe s., s.; la Vie de Saint Léger; la Passion du Christ, ms Clermont-Ferrand 240, fin Xe-début XIe s.; les Serments de Strasbourg, ms P., B.N., lat. 9768, fin Xe-début XIe s.), et leur localisation provoque des discussions infinies.

Il est à préciser qu'il s'agit justement de textes français, non pas de griffonages, gloses, mots ou phrases isolés, fixés dans les manuscrits latins ou autres, ni de bribes ou fragments textuels en français. Si on prend en compte toute trace du français, la quantité de manuscrits serait autre: par exemple, selon Chr. Rubi, M. Careri [Careri, Rubi, 2015], il y a une dizaine de manuscrits des IXe-XIe siècles.

Certainement, toute attestation écrite de l'ancien français est importante, surtout si elle permet de préciser quelque changement linguistique ou quelque mot (forme) particulier. Mais, pour établir les systèmes linguistique et discursif de l'ancien français de sorte que «la compréhension linguistique» coïncide «avec la connaissance interprétative», c'est-à-dire, «connaissance de la langue dans ses plus intimes structures» [Klock-Fontanille, 2018, p. 206], pour décrire le processus de l'évolution interne de la langue et celui de l'élaboration de la langue littéraire, il faudrait se baser sur le matériel de recherche plus représentatif.

Les manuscrits du XIIe siècle sont en majorité anglo-normands: selon Br. Woledge et I. Short [Woledge, Short, 1981], parmi les 59 manuscrits exécutés sûrement au XIIe siècle, 40 sont anglo-normands. Selon Chr. Rubi, M. Careri [Careri,

Rubi, 2015], il y a 140 manuscrits du XIIe siècle, dont une quantité de «manuscrits de transition», c'est-à-dire, de manuscrits de la fin du XIIe-début du XIIIe siècle. Parmi ces 140 manuscrits, 87 sont anglo-normands, 39 français, 7 occitans.

Dommage, mais pas tous ces manuscrits anglo-normands peuvent être utilisés dans les recherches approfondies: plusieurs ne contiennent que quelques mots, lignes ou fragments de textes. De même, parmi les manuscrits, exécutés à la fin du XIIe siècle sur le territoire de la France 'continentale', il n'y a que quatre textes proprement dit (Dialogus anime conquerentis et rationis consolantis, ou Dialogue de l'âme de Saint Isidore, ms. Epinal 209, exécuté dans la Lorraine, supposément à l'abbaye du Saint-Mont; Chronique des ducs de Normandie, ms. Tours 903, exécuté supposément à l'abbaye de Marmoutier près de Tours; Li sermon Saint Bernart, ms. B.N., f.fr.24768, contient 152 f. de texte incomplet de la fin, s'est trouvé à l'abbaye Feuillants à Paris, d'où sa dénomination «ms. des Feuillants», le lieu d'écriture n'est pas établi: selon DEAF, c'est la Lorraine, Metz; selon A. Henry [Henry, 1996], la Wallonie; selon G. Fallot [Fallot, 1839, p. 454], la «Bourgogne»; 2. Nantes, Musée Dobrée, ms. 0005, «manuscrit de transition», contient les 44 premiers sermons sur 86, le lieu d'écriture n'est pas établi).

La quantité aussi restreinte de premiers textes manuscrits français des IXe-XIIe siècles (l'étape monastique de l'écriture) est liée au fait connu: en France, aux cours des siècles, c'était le latin qui était la langue d'écriture. Dès le début de la romanisation de la Gaule, on se servait du latin dans les activités littéraires, scientifiques et administratives. Le processus d'intégration de la langue française dans les domaines différents se passait lentement, et la quantité de manuscrits en latin dépassait considérablement celle en français. Pour le démontrer, notons, en particulier, 74 190 manuscrits du IXe siècle comme résultat manifeste de la 'Renaissance carolingienne', et 197 831 manuscrits du XIIe siècle [Buringh, van Zanden, 2009, p. 42]: la quantité infime de textes manuscrits en français est en effet frappante!

A la fin du XIIe-début du XIIIe siècle, commence l'étape laïque de l'écriture en France, conditionnée par le rôle croissant des villes dans la vie politique et économique du pays. L'écriture a cessé d'être le privilège du clergé, et on voit apparaître plusieurs écoles laïques, les premières universités, les premiers ateliers de production de manuscrits, etc.

Les manuscrits du XIIIe siècle constituent le corpus essentiel des recherches en ancien français. Au XIIIe siècle apparaissent les premiers manuscrits présentant les textes administratifs. Cependant, la quantité de chartes devient suffisante pour les études approfondies de l'ancien français administratif, seulement vers la fin du XIIIe siècle, à partir des années 1270-1280.

Par suite de ce bref examen, il serait évident qu'on pourrait nier l'existence de presque tous les dialectes français avant le XIIIe siècle, se basant juste sur l'absence de textes manuscrits. En même temps, cela signifie que tout dialecte français avant le XIIIe siècle serait la même «chimère» [Ludtke, 1972, p. 435] ou l'«ectoplasme» [Cerquiglini, 1993, p. 116-119] que le francien avant le XIIIe siècle, à condition que la raison reste la même - l'absence de textes manuscrits avant 1200. C'est juste la confusion des œuvres avec des textes manuscrits qui a permis aux chercheurs de

proposer plusieurs théorisations sur les dialectes français existants aux IXe-XIIe siècles et sur leur rôle exclusif dans l'élaboration de la langue française littéraire au XIIe siècle et même aux époques antérieures [cf.: Stanovaïa, 2019].

2.3. Textes manuscrits franciens après 1200

Face aux discussions sur la quantité, la classification, la situation géographique de dialectes et de scripta, les contours de zones dialectales et scripturales (décrites dans la première partie [Stanovaïa, 2021]), et en conséquence, sur la localisation de textes manuscrits, on comprend mieux les déclarations de certains chercheurs sur l'absence totale de manuscrits franciens. Nos études, au contraire, prouvent qu'il y a beaucoup de textes manuscrits franciens.

Au début de nos études purement grammaticales, consacrées au système substantival de l'ancien français, nous avons choisi quelques textes de genres différents, afin d'analyser les phénomènes grammaticaux correspondants. Mais, ensuite, bloquée par plusieurs questions paradoxales, dont par exemple: pourquoi Gautier de Coinci a composé un miracle avec une déclinaison exemplaire, 'comme dans les manuels' (c'est l'allusion à l'idée de J. Bédier: «les règles de la déclinaison n'apparaissent en toute leur pureté que dans les Grammaires modernes de l'ancien français» [Bédier, 1927, p. 248]), et un autre - avec une déclinaison presque complètement détruite, voire sans déclinaison? - nous étions obligée de nous plonger dans l'océan de problèmes textologiques, dialectologiques et scriptologiques. En conséquence, nous étions obligée de distinguer les 'textes d'œuvres' (littéraires ou autres) vs les 'textes manuscrits', et ensuite, de réviser et de vérifier la localisation de tous les textes manuscrits examinés.

Par suite de cette étude, nous avons constaté que la localisation de plusieurs manuscrits, y compris de franciens, n'est pas toujours convaincante. Découragée et même insatisfaite par la localisation discutable des textes manuscrits examinés, nous avons élaboré et utilisé encore deux méthodes d'étude et de localisation de textes manuscrits - 'horizontale' et 'verticale' [Stanovaïa, 2013].

2.3.1. Les manuscrits franciens examinés, localisés à la base de faits extralinguistiques

La localisation d'un manuscrit selon ses particularités paléographiques et codicologiques, la «critique diplomatique» (mot de L. Carolus-Barré [Carolus-Barré, 1964, p. LXXI]), les faits historiques, etc., qui permettent d'établir le lieu et l'époque de l'exécution de manuscrits, semble la plus objective. De ce point de vue, les chartes, dont plusieurs comportent les indications de la date et du lieu de l'exécution, sont souvent conçues préférables par rapport à ceux de textes littéraires.

Cependant, la localisation d'un manuscrit selon le lieu d'écriture, infaillible à première vue, dépend en réalité de points de vue de chercheurs. On tourne toujours dans le cercle vicieux de problèmes interdépendants: classification de scripta et de dialectes - contours de zones scripturales et dialectales - localisation de textes manuscrits.

Par exemple, nous avons considéré comme franciens le manuscrit P., B.N., f.fr. 25532, exécuté au scriptorium de l'abbaye de Saint-Médard de Soissons dans la deuxième moitié-fin du XIIIe siècle, lequel contient les Miracles de Gautier de Coinci (1177-1236), clerc de l'abbaye; et le manuscrit P., B.N., f.fr. 2163, exécuté en 1266 à

l'abbaye de Morigny près d'Etampes, lequel, lui aussi, contient plusieurs Miracles de Gautier de Coinci. Nous avons considéré ces manuscrits comme franciens, tenant compte de la zone francienne scripturale établie. Mais, si on situe Soissons dans la zone picarde, le manuscrit P., B.N., f.fr. 25532 serait picard (comme, par exemple, selon DEAF); si on distingue l'orléanais, le manuscrit B.N., f.fr. 2163 serait orléanais.

D'autre part, il y a des manuscrits dont la localisation a été changée par suite de nouvelles recherches. Par exemple, le manuscrit P., B.N., f.fr. 794, contenant cinq romans de Chrétien de Troyes, Le roman de Troie de Benoît de Sainte-Maure, Le roman de Brut de Wace, et al., exécuté par le copiste bien connu Guiot, normalement identifié avec Guiot de Provins, ou Guiot le Provençal [Walters, 1985], vers le premier tiers-milieu du XIIIe siècle, a été localisé d'abord à Paris: c'est ainsi qu'on a traité l'adresse du copiste, fixée par lui-même dans le manuscrit (devant Nostre Dame del Val Est ses ostex). On a conclu que Guiot était un copiste parisien, et que son langage appartient à quelque pays aux limites de l'Île-de-France et de la Champagne [Roques, 1952]. Il n'y a donc rien d'étonnant qu'à l'époque, E. Metzke [Metzke, 1880] a étudié le dialecte de l'Île-de-France selon les œuvres de Guiot de Provins, Gautier de Coinci, Chrétien de Troyes et Jean de Meung.

Plus tard, on a découvert qu'il s'agit d'une autre Notre-Dame du Val qui s'est trouvée à Provins, capitale des comtés de Brie et de Champagne. Donc, on a conclu que Guiot était un copiste champenois, et que le manuscrit est aussi champenois [Roques, 1952]. Par suite, actuellement, on s'adresse à ce manuscrit champenois afin d'étudier l'oeuvre de Chrétien de Troyes, identifié comme champenois, bien qu'il n'y ait aucun renseignement attesté sur le lieu de sa naissance.

Examinant les critères choisis par A. Lodge [Lodge, 2002], nous nous sommes adressée aux romans de Chrétien de Troyes, fixés dans le manuscrit en question, et nous y avons trouvé un mélange de formes avec/sans les consonnes épenthétiques: par exemple, parmi les formes du verbe prendre, c'est la minorité (13,4%) qui est sans -d-, au contraire, parmi les formes en -r- du verbe venir, c'est la majorité (55,6%) qui est sans -d-. Cela signifie que la remarque de premiers chercheurs sur le langage aux limites de l'Île-de-France et de la Champagne est tout à fait juste: on pourrait trouver des preuves linguistiques tant pour la première localisation abandonnée (Paris), que pour la seconde (Provins), surtout si on se base sur les «données brutes».

Il s'ensuit que la localisation de manuscrits selon le lieu d'écriture n'est pas aussi infaillible qu'elle semble. Même les chartes, «matière première de qualité» (mot de L. Carrolus-Barré [Carolus-Barré, 1964, p. LXXXI]), demandent la localisation.

Ch.-Th. Gossen [Gossen, 1962, p. 292-293] a décrit une charte exécutée en 1238 à Avesnes qui comporte deux versions d'un texte, rédigées et transcrites dans la même chancellerie, supposément par le même copiste, mais selon les normes scripturales différentes. Ch.-Th. Gossen a déterminé une version comme «française», l'autre - comme «franco-picarde», et il a conclu que «les scribes savaient qu'il existait des systèmes de scripta différents» et que «Le ou les scribes étaient parfaitement conscients des équivalences» de graphies et de formes dans les

«systèmes de scripta différents» (sur les chartes lorraines et picardes de ce type-là cf.: [Gossen, 1979]).

Nous avons analysé une autre charte de ce type - wallonne, rédigée à Liège, à l'abbaye de Flon, en 1248 [Wilmotte, 1888, p. 221-222], qui comporte deux textes écrits en deux versions, celle du signataire et celle du destinataire, différant par la structure, graphies, formes, etc.

A. Dees a renoncé d'analyser les chartes de ce type-là [Dees, 1980, p. X], tandis que L. Carolus-Barré [Carolus-Barré, 1964, p. LXXX] a remarqué à cet égard que la détermination du lieu d'écriture d'une charte doit être toujours suivie et confirmée par l'étude de ses caractéristiques linguistiques. P. Videsot a précisé «que c'est surtout le 'rédacteur' - donc l'institution responsable pour la rédaction de l'acte - qui détermine la langue du document et non pas le lieu où un scribe se trouve physiquement au moment de la redaction» [Videsot, 2013, p. 16).

Cependant, en cas de chartes, munies de tous les renseignements nécessaires sur le lieu et la date de la rédaction, il ne s'agit plus de la localisation de manuscrits, proprement dit, mais des explications possibles de la variation des scripta de la même région. Pour nous, c'est un moyen d'accès à la mentalité des sujets parlants et écrivants qui, tout en s'en rendant compte, rédigeaient le même texte selon les normes scripturales différentes.

En cas de manuscrits littéraires, leur localisation, efféctuée à la base de l'étude paléographique, codicologique, historique, etc., serait suffisante à condition que les contours de toutes les zones dialectales et scripturales soyent moins discutables qu'actuellement.

2.3.2. Les manuscrits franciens examinés localisés à la base de faits linguistiques

Plusieurs textes manuscrits examinés au cours de nos recherches, sont définis par leurs éditeurs comme normands, wallons, lorrains, etc., sans commentaires ou presque, dont, par exemple, les manuscrits franciens: P., B.N., Arsenal 6562 (Moniage Guillaume; Moniage Rainouart), exécuté au nord de l'Île-de-France au début du XIIIe siècle (vers 1225) et défini par les éditeurs comme francien mélangé du picard (le mélange de formes est expliqué par les éditeurs par la combinaison du picard, 'dialecte de l'auteur', avec le francien, 'dialecte du scribe', c'est pourquoi, nous avons considéré ces textes manuscrits comme présentant une scripta francienne); P., B.N., f.fr. 1449 (le Coronement Looys; les Enfances Vivien; la Prise d'Orange); P., B.N., f.fr. 2137 (les Sept Sages de Rome) et al. Mais, selon DEAF, sans commentaires non plus, le manuscrit P., B.N., Arsenal 6562 serait picard, le manuscrit P., B.N., f.fr. 1449 - francien, le manuscrit P., B.N., f.fr. 2137 - non localisé.

D'autres textes manuscrits sont définis comme franciens à cause de leur «caractère français fort prononcé», ou du français «commun», «correct», n'ayant «aucune couleur dialectale», ou «régionale», par exemple: P., B.N., f.fr. 860 (Gaydon; Ami et Amile); Arsenal 3142, ancien 175 (Li Romanz de Berte aus Grans Pes); P., B.N., f.fr. 1447 (Floire et Blancheflor; Li Romanz de Berte aus Grans Pes); P., B.N., f.fr. 371, ancien Cangé 68 (Le Roman de Renart), et al. Mais, selon DEAF, le manuscrit P., B.N., f.fr. 860 serait lorrain (par suite de notre étude 'verticale', nous

avons défini ce manuscrit comme francien); P., B.N., f.fr. 1447 - parisien; P., B.N., f.fr. 371 - non localisé.

Il arrive que la localisation linguistique de manuscrits est suivie par des études paléographiques: par exemple, J.-L. Leclanche [Leclanche, 1980] a confirmé l'origine francienne du manuscrit P., B.N., f.fr. 1447 par la conclusion que son décor était propre aux ateliers de l'Île-de-France de la première moitié du XIVe siècle.

Cependant, cela arrive assez rarement, et plusieurs manuscrits examinés sont localisés différemment, dont par exemple:

(1) le manuscrit du XIIIe siècle Londres, B.L., R 20DXI est localisé en Île-de-France par C. Wahlund et H. von Feilitzen, éditeurs des Enfances Vivien, et par M. Tyssens [Tyssens, 1967] qui a étudié la Geste de Guillaume d'Orange dans les manuscrits cycliques; en Aisne, par L. Schosler [Schosler, 1995] qui a étudié le Charroi de Nîmes; en Picardie, par Cl. Régnier [Régnier, 1966], éditeur de la Prise d'Orange. Selon DEAF, le manuscrit est «probablement» parisien. Par suite de notre étude 'verticale', nous avons défini ce manuscrit comme francien;

(2) le manuscrit P., B.N., f.fr. 375, qui contient les textes de plusieurs Fabliaux, de la Chastelaine de Vergi, des Dis de Jean Bodel, de Miracles de Gautier de Coinci, et al., a été défini comme francien par les éditeurs des textes examinés. En revanche, selon A. Dees [Dees, 1987], les textes différents fixés dans ce manuscrit, ont été exécutés dans les régions «Somme», «Oise», «Aisne». Selon DEAF, tout le manuscrit est picard. En effet, ce manuscrit volumineux (219 f.), composé de deux unités codicologiques de même format, mais complètement distinctes, pose beaucoup de questions. Tout d'abord, selon ses caractéristiques paléographiques, le manuscrit est exécuté entre 1289-1317, malgré la date fixée «le 2 février 1288». Ilya des discussions sur la quantité de copistes (5 ou 6) qui ont exécuté ce manuscrit, étant donné que Perrot de Nesle et Jehan Madot se sont indiqués en auteurs et transcripteurs. Les textes que nous avons examinés selon ce manuscrit (la Chastelaine de Vergi, des Dis de Jean Bodel, Floire et Blancheflor, quelques Fabliaux) se trouvent dans l'unité 2 et sont exécutés par trois copistes. Selon plusieurs traits dialectaux picards, le manuscrit est associé aux copistes d'Arras. Par suite, contrairement aux éditeurs, nous avons considéré les textes manuscrits examinés comme picards;

(3) le manuscrit de la deuxième moitié du XIIIe siècle P., B.N., f.fr. 837, qui contient les textes de la Cour de Paradis, de plusieurs Fabliaux, de la Chastelaine de Vergi, et d'autres, est localisé par les éditeurs de textes différents en Île-de-France, Picardie, Touraine, Normandie; selon A. Dees [Dees, 1987], les textes différents fixés dans ce manuscrit, ont été exécutés dans les régions: «Normandie (Eure)» (Fabliaux 1, 2, 4, 23, 29) et «Yonne» (Chastelaine de Vergi);

(4) le manuscrit de la fin du XIIIe siècle P., B.N., f.fr. 1448, qui contient les textes de plusieurs chansons épiques, en particulier, les Enfances Vivien et la Prise d'Orange. Le manuscrit est exécuté par trois œpistes, mais les textes examinés des Enfances Vivien et de la Prise d'Orange - par un seul. Le manuscrit est localisé en Île-de-France par M. Tyssens [Tyssens, 1967] et par C. Wahlund et H. von Feilitzen, éditeurs des Enfances Vivien; en Lorraine, par Cl. Régnier [Régnier, 1966], éditeur de la Prise d'Orange, et dans «Meuse» par А. Dees [Dees, 1987].

Selon DEAF, le manuscrit P., B.N., f.fr. 837 est francien, le manuscrit P., B.N., f.fr. 1448 - lorrain. Par suite de nos études 'verticales', nous avons défini le premier manuscrit comme francien et le deuxième - comme lorrain.

Par suite de ce bref examen, on peut conclure que les textes manuscrits franciens sont nombreux, et leur quantité est suffisante pour les recherches approfondies. Il est évident que le problème majeur consiste dans la localisation imparfaite, souvent doutable, de plusieurs manuscrits français, y compris franciens.

Etudiant le syntagme nominal (les formes de substantifs et de leurs déterminants), nous avons remarqué que les textes manuscrits franciens possèdent les traits distincts suivants, importants à notre avis: (1) la coexistence de deux normes scripturales (étymologique et analogique) dans la représentation graphique de la déclinaison nominale; (2) l'homogénéité de l'usage linguistique, assurée par l'emploi de formes franciennes; (3) le respect de protographes.

3. Particularités des scripta franciennes

3.1. Coexistence de deux normes scripturales (étymologique et analogique) dans la représentation de la déclinaison nominale

Ayant constaté la variation de formes analogiques et étymologiques de substantifs, adjectifs et participes, dites 'casuelles', nous avons distingué deux types de normes scripturales dans la représentation graphique de la déclinaison nominale: la 'norme étymologique' et la 'norme analogique'. Le type analogique est propre aux scripta picardes, wallonnes, bourguignonnes (sauf celles d'Avallon et d'Autun), à celle de Metz (scripta lorraine), à celles de l'Île-de-France (surtout de scriptoriums). Le type étymologique est propre aux scripta normandes, anglo-normandes, lorraines (sauf celle de Metz), bourguignonnes d'Avallon et d'Autun, à celles de l'Île-de-France (surtout de chancelleries).

Dans les scripta de type analogique, on voit l'emploi préférentiel de formes unifiées d'après la déclinaison du type chevalier, c'est-à-dire, -s au CS sg. et CR pl. (chevaliers, peres, flors, bers ~ barons); -0 au CR sg. et CS pl. (chevalier, pere, flor, ber ~ baron). Dans les scripta de type étymologique, on voit l'emploi préférentiel de formes étymologiques, c'est-à-dire, -s au CS sg. et CR pl. (chevaliers); -0 au CR sg. et CS pl. (chevalier), -0 au CS et CR sg. (pere, flor, ber ~ baron); -0/-s au CS pl. (pere/s), -s au CS et CR pl. (flors, barons).

Il est important de préciser que: (1) la distinction de formes étymologiques vs analogiques est plutôt méthodologique, destinée à leur systématisation en ancien français, c'est-à-dire, en synchronie; (2) les formes étymologiques ne sont pas irrégulières, ou fautives, aussi bien que les formes analogiques ne sont pas régulières, ou correctes. Ce sont des variantes différentes, grammaticalement égales, lesquelles expriment correctement les mêmes significations grammaticales; (3) la variation touche seulement les formes du CS, à l'opposition de formes du CR qui sont d'une uniformité parfaite; (4) il ne s'agit que du désir de copistes de suivre un modèle donné, tandis que la réalisation concrète de ce désir serait différente. D'autant plus, la diversité de variantes étymologiques et analogiques, l'interférence de scripta et l'absence de la déclinaison systématique régulière dans l'usage parlé, compliquaient le travail de copistes.

Bien que la théorie de la déchéance progressive de la déclinaison bi-casuelle nominale allant d'un dialecte à l'autre, de l'ouest (l'anglo-normand) à l'est (le picard et le lorrain), à partir du XIe-XIIe siècle jusqu'à la fin du XIIIe-XVe siècle soit répandue, deux raisons importantes ne nous ont pas permis de l'accepter: (1) du point de vue théorique, la très longue coexistence (pendant 300, voire 400 ans!) de dialectes aux systèmes grammaticaux différents (avec déclinaison vs sans déclinaison) contredit la notion même de dialecte en tant que variété régionale d'une langue; (2) du point de vue pratique, le fait que les scripta de mêmes zones dialectales peuvent se distinguer par l'emploi de formes dites casuelles, tout en gardant l'usage syntaxique commun (c'est le cas des scripta bourguignonnes, lorraines, franciennes), contredit l'interprétation dialectaliste proposée. C'est pourquoi, nous avons lié le phénomène examiné à l'existence de deux normes scripturales, provoquée par différents facteurs. La tradition de reproduire, de deux façons différentes, la déclinaison nominale ruinée remonte à l'époque mérovingienne [Skrélina, Stanovaïa, 2019, р. 134-136; Stanovaïa, 2012].

La plupart de textes manuscrits litteraires franciens analysés (par exemple: les Miracles de Gautier de Coinci, ms P., B.N., f.fr. 2163; le Moniage Rainouart, le Moniage Guillaume, ms Arsenal 6562; Les Enfances Vivien, la Prise d'Orange, mss P., B.N., f.fr. 1449, L. Br.M., R 20DXI; Ami et Amile, Gaydon, ms P., B.N., f.fr. 860; Floire et Blancheflor, ms P., B.N., f.fr. 1447, et al.) sont du type analogique, avec une quantité de 'fautes' variant de 5% à 25%.

Il est à remarquer que nous employons le terme répandu 'faute de déclinaison' sans l'approuver, justement à cause de sa large diffusion. Vu des paradigmes irréguliers, qui ne permettent pas de classifier les formes en 'correctes' vs 'incorrectes', nous avons considéré comme 'correctes' toutes les formes possibles, par exemple: pere au CS sg. et peres au CS pl. sont 'correctes' par étymologie (< pater, patres, Nom. sg, pl), peres au CS sg. et pere CS pl. sont 'correctes' par analogie, etc.

La 'déclinaison' du type étymologique presque détruite, avec une quantite de 'fautes' variant de 80% à 95%, est propre à toutes les chartes franciennes analysées et aux textes manuscrits litteraires suivants: les Miracles de Notre-Dame de Chartres, attribués à Jean le Marchant (1252-1262), selon le manuscrit Chartres 1027, de la fin du XIIIe-début du XIVe siècle (orléanais, selon A. Dees [Dees, 1987] et DEAF); les Sept Sages de Rome, ms P., B.N., f.fr. 2137, de la fin du XIIIe siècle (non localisé, selon DEAF); Erec en prose, ms P., B.N., f.fr. 112, achevé en 1470 (picard, selon DEAF); les Enfances Vivien en prose, ms du XVe siècle, P., B.N., f.fr. 796 (non localisé, selon DEAF).

Etant donné que la 'déclinaison' unifiée, exemplaire, du type analogique, est une caractéristique saillante et bien connue des scripta picardes, le motif de la définition de plusieurs textes manuscrits franciens comme picards, devient tout à fait clair. Par exemple, nous avons étudié, d'après le manuscrit de Saint-Médard de Soissons (P., B.N., f.fr. 25532), considéré par nous comme francien, par d'autres chercheurs comme picard, les textes de Miracles de Gautier de Coinci et une variante du poème La Court de Paradis. Tous les textes étudiés présentent la norme

analogique, les emplois de formes du CR au lieu de celles du CS et vice versa, sont très rares - de 5% à 12%.

Les statistiques sont conformes à celles de textes manuscrits picards. Par exemple, la même quantité de 'fautes' - au total 12% - caractérise les textes de 77 Lais et 24 Jeus partiis de trouvères français du XIIIe siècle, d'origine régionale différente, fixés dans le manuscrit picard du début du XIVe siècle Siena H.X.36; de 5% à 15% - aux textes manuscrits Li jus de saint Nicolai de Jean Bodel (ms P., B.N., f.fr. 25566, fin du XIIIe s.) et Fabliaux par Jean Bodel (ms P., B.N., f.fr. 2168, fin du XIIIe s.), Huon de Bordeaux (ms Tours 936, milieu du XIIIe s.); de 15% à 25% - les Enfances Vivien, la Prise d'Orange, le Moniage Rainouart, le Moniage Guillaume (ms Boulogne-sur-Mer 192, achevé le 16 avril 1295), Aïol (ms P., B.N., f.fr. 25516, 2-ème moitié du XIIIe s.) et al.

Pour la même raison - le «soin» du copiste à rendre la déclinaison nominale excessivement correcte - que Cl. Régnier [Régnier, 1966, p. 39-40] a défini le manuscrit L., Br.M., R 20DXI comme picard, considéré par d'autres chercheurs, y compris nous-même, comme francien.

Cependant, l'usage linguistique des manuscrits en question est différent: homogène francien vs hétérogène picard et francien. C'est que, dans les manuscrits franciens (P., B.N., f.fr. 25532; Londres, B.L., R 20DXI) il n'y a que de formes franciennes, par exemple, de l'article fém. sg. la, tandis que dans les manuscrits picards littéraires, les formes picardes li, le de l'article fém. sg. sont employées, bien que rarement (5-35%), à côté de la forme francienne la. Il est à ajouter que l'emploi de formes picardes li, le de l'article fém. sg. représente un trait important, caractéristique de manuscrits picards, dans lesquels leur quantité peut atteindre 35% (39% «Somme» [Dees, 1987, p. 83]) dans les manuscrits littéraires, 90-99% dans les chartes.

C'est pourquoi, Ch.-Th. Gossen [Gossen, 1970, p. 121-122], afin de préciser la frontière entre les scripta franciennes et picardes, a rangé toutes les chartes examinées selon le pourcentage de formes picardes le, li vs la francienne la. L'examen de la liste démontre la dépendance évidente de pourcentages selon le lieu d'écriture de telle ou telle charte: la forme francienne la est prépondérante dans les chartes de Senlis, Soissons, Compiègne, Laon, en revanche, la forme picarde le ~ li est prépondérante dans les chartes de Lille, Tournai, Mons, Cambrai, Beauvais, Noyon, et al., la rivalité des formes francienne vs picarde est fixée dans les chartes d'Avesnes, Arras, Pontieux, Montreuil.

Selon nos données, dans les manuscrits littéraires picards, le nombre de formes picardes li, le varie de 5-15% jusqu'à 20-35%. Il faudrait remarquer, à cet égard, que les calculs purement méchaniques sont insuffisants, car ils ne permettent pas de distinguer les cas de l'emploi de formes picardes de l'article féminin vs ceux de l'emploi de certains susbstantifs féminins comme masculins. C'est que les masculins passifs en -e, par exemple: espace, navire, remede, reproche, crabe, evangile, etc., sont souvent employés dans les manuscrits français, y compris picards et wallons, comme les féminins; de même, les féminins passifs sans -e, par exemple: dent, jour, host, hart, linot, etc., sont souvent employés comme les masculins; le substantif féminin ymage s'emploie souvent comme masculin par analogie avec d'autres

masculins en -age. On le voit, par exemple, dans le texte Floire et Blancheflor, ms P., B.N., f.fr. 375, défini comme francien et comme picard, dans lequel les substantifs féminins ymage, grafe, oquison sont employés comme masculins et, par suite, avec les formes de l'article masculin. Donc, li, le peuvent être tant les formes de l'article picard fém., que celles de l'article masc. [Stanovaïa, 2012b].

Dans les chartes, les formes picardes li, le sont beaucoup plus fréquentes: la forme le est employée soit en minorité par rapport à la forme la qui reste souvent dans les titres: la contesse, la dame, la 9sel, etc. (15-35%), soit en majorité (50-60%), soit en majorité absolue (85-90%). Les statistiques d'A. Dees sur les scripta littéraires et administratives de «Somme» et «Nord» sont pareilles aux nôtres: ms littéraires: li = 27% «Somme»; 28% «Nord»; le = 39% «Somme»; 31% «Nord» [Dees, 1987, p. 8283]; chartes: li = 42% «Somme»; 96% «Nord», le = 90% «Somme»; 99% «Nord» [Dees, 1980, p. 39-40].

Les textes manuscrits en question (P., B.N., f.fr. 25532; Londres, B.L., R 20DXI), tout comme les autres manuscrits franciens examinés, ne contiennent pas de formes picardes de l'article. Il est évident qu'un seul trait linguistique, bien que aussi importante que la déclinaison nominale, n'est pas suffisant pour la localisation correcte de manuscrits: il faudrait prendre en considération plusieurs caractéristiques de l'usage linguistique.

3.2. Homogénéité de l'usage linguistique, assurée par l'emploi de formes franciennes

Au cours de nos études de la déclinaison bi-casuelle et du genre grammatical de substantifs en ancien français, nous avons relevé des formes morphologiques de substantifs, adjectifs, articles, pronoms et participes à travers les textes manuscrits franciens, picards, wallons, normands, anglo-normands, lorrains et bourguignons des IXe-XVe siècles. Par suite de la systématisation de formes, y compris selon la fréquence d'emploi, nous avons remarqué que dans tous les textes manuscrits examinés, sauf les franciens, il y a deux séries de formes fréquentes: (1) une série de formes dénommées comme 'franciennes', 'françaises', 'communes', 'interdialectales', 'littéraires', 'écrites', 'neutres', 'neutralisées', etc.; (2) une série de formes dénommées comme 'régionales', ou 'dialectales', caractéristiques au dialecte de la région où le manuscrit examiné a été exécuté.

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Les textes manuscrits franciens examinés diffèrent par la présence d'une seule série de formes dénommées 'franciennes', 'françaises', etc.

Il y a aussi d'autres formes, rares dans tous les manuscrits de la même région, d'origine et de nature différente: d'autres dialectes français, fautives et fantaisistes, franco-provençales et provençales, latines et latinisées, etc. Ces formes occasionnelles témoignent de l'interférence des scripta, de certaines orientations ou de certains goûts particuliers de copistes, mais leur présence ne joue aucun rôle dans la répartition essentielle: une série de formes 'franciennes', 'françaises', etc., une série de formes de dialecte de base.

Par exemple, dans tous les textes manuscrits examinés, on trouve les formes du démonstratif n ce, c', à côté desquelles dans les textes manuscrits wallons sont fixées les formes wallonnes che, ch', chu, chou; dans les picards - les picardes che, ch', chou, cou; dans les lorrains - les lorraines s/ce, s/c', s/cou, s/ceu; dans les anglo-

normands - les anglo-normandes ceo, co, ico; dans les normands - les normandes chu, che, ca, cen, chen, icen; dans les bourguignons - les bourguignonnes ceu, cou, cai. Dans les textes manuscrits franciens il n'y a que de formes ce, c'.

La corrélation de formes 'franciennes', 'françaises', etc. vs celles de dialecte de base varie selon les scripta, comme ceci est déjà démontré à la base des Atlas d'A. Dees (cf. la première partie [Stanovaïa, 2021]). Des scriptologues affirment que toute scripta est basée sur le dialecte de la région, mais les particularités dialectales ne se manifestent dans les manuscrits que partiellement, en leur donnant une «couleur» («coloris», «caractère») régionale plus ou moins forte. Pour souligner ce phénomène de l'hétérogénéité de l'usage linguistique de scripta françaises, Ch.-Th. Gossen a introduit l'ajout «franco-» dans les appellations de toutes les scripta: franco-picardes, franco-normandes, franco-lorraines, etc.

La quantité de formes de dialecte de base varie non seulement d'une scripta à l'autre, mais d'un texte manuscrit à l'autre, au sein de la même scripta, aussi bien que d'une forme à l'autre, au sein du même manuscrit: il arrive qu'une forme dialectale est majoritaire dans un seul texte manuscrit de la région, tandis qu'elle est minoritaire et même absente dans un autre.

Par exemple, à la base de textes manuscrits lorrains, nous avons relevé les formes de l'article défini: CS, CR sg m li, l', le, lo, lou, lu; CS, CR pl m li, les, lez, le, los; CS, CR sg f li, la, l', lai, le; pl f les. Cependant, chaque texte présente son choix de formes, par exemple: dans le Dialogus anime conquerentis ... (Epinal 209, fin du XIIe s.) uniquement lo, les; dans la Prise d'Orange (P., B.N., f.fr. 1448, fin du XIIIe s.) lo, lou majoritaires au CR sg, le - rare, lu absente, la au f, li sporadique, lai, le -absentes; dans Huon de Bordeaux (P., B.N., f.fr. 22555, XVe s.), le, lou en quantités égales, lo, lu absentes; dans Simon de Pouille (P., B.N., f.fr. 368, debut du XIVe s.) majoritaires sont les formes franciennes, les formes lo, lou, lu - sporadiques.

Bien que la quantité de certains dialectismes puisse atteindre son maximum de 22% à 90%, plusieurs formes dialectales sont rares, parfois même absentes, dans les textes manuscrits correspondants. Ceci prouve, une fois de plus, que les scripta ne coïncident que partiellement aux dialectes.

La quantité de formes de dialecte de base varie selon: (1) le genre du manuscrit: les chartes contiennent plus de formes de dialecte de base que les manuscrits littéraires; (2) la scripta: les scripta picardes contiennent le maximum de formes de dialecte de base, tandis que les scripta normandes - le minimum; (3) la date de l'exécution du manuscrit: la quantité de formes de dialecte de base augmente vers la fin du XIIIe-début du XIVe siècle et atteint son maximum dans les textes manuscrits du XVe siècle [Skrélina, Stanovaïa, 2019, р. 83-93; Stanovaïa, 2003].

3.2.1. Formes franciennes

Les manuscrits franciens ne contiennent que de formes 'franciennes', 'françaises', 'communes', 'interdialectales', 'littéraires', 'neutres', 'neutralisées', etc.

Par suite de nos études, nous avons conclu que ces formes-ci sont franciennes pour les raisons suivantes:

(1) toute scripta n'est pas une création artificielle. Sa base est constituée par le dialecte de la région correspondante. C'est pourquoi, dans les textes manuscrits picards, il y a les formes du dialecte picard, dans les textes manuscrits wallons -

celles du dialecte wallon, dans les textes manuscrits lorrains - celles du dialecte lorrain, etc. Il s'ensuit que les textes manuscrits franciens doivent avoir les formes du dialecte francien;

(2) dans les textes manuscrits franciens, il n'y a pas d'autres formes que celles dénommées de 'françaises', 'communes', etc. Comme nous nous sommes assurée de l'existence du dialecte francien, nous avons conclu que ces formes-ci sont en réalité franciennes, propres au dialecte francien. De ce point de vue, tout devient logique: chaque texte manuscrit français comporte une quantité variée de formes de dialecte de base, et chaque texte manuscrit francien, lui aussi, comporte les formes du francien comme dialecte de base.

Suite à ces raisonnements, on retourne à la question cruciale dans l'histoire de la langue française: pourquoi les formes franciennes sont employées dans tous les manuscrits français? Les réponses en sont différentes, et la négation du francien empêche considérablement de résoudre cette question épineuse.

3.2.1. Formes franciennes vs 'françaises', 'communes', 'interdialectales', 'interrégionales'

L'examen d'ouvrages fait voir qu'on ne détermine pas, normalement, l'origine régionale de toutes les formes fixées dans les textes manuscrits, mais uniquement de celles, dénommées de régionales, ou dialectales. Par suite, les autres formes, 'non-régionales', seraient par défaut 'françaises', ou 'françaises communes', pareilles à celles du français moderne.

Cependant, toutes les formes sont françaises a priori, car elles, toutes, appartiennent aux dialectes de la même langue française. Cela signifie que la distinction de formes 'françaises' vs 'régionales', ou 'dialectales, par exemple, picardes, wallonnes, champenoises, etc., serait correcte à condition que le picard soit un dialecte d'une autre langue, ou que le picard (le wallon, le champenois, etc.) constitue une langue à part, différente de la langue française.

Plusieurs chercheurs de XIXe-XXe siècles employaient communément le terme 'français', car ils considéraient le dialecte francien en tant que future langue française: voyant dans le francien l'origine du français moderne, on considérait et, par suite, on dénommait les formes franciennes de françaises (franciennes = françaises). De ce point de vue, tout semble correct et logique: on distingue les formes de différents dialectes de l'ancien français - picardes (wallonnes, champenoises, etc.) vs franciennes, dans l'avenir françaises. Dans tous les autres cas, l'opposition 'français' vs picard (wallon, champenois, etc.) témoigne de la confusion de concepts et de termes. Nous même, nous avons commis cette faute terminologique et conceptuelle, habituée aux termes répandus, employés fréquemment dans différents ouvrages sans précision nécessaire. 1

La définition de certaines formes comme 'communes', 'interdialectales', 'interrégionales', présuppose qu'il y a des formes communes à toute la langue française, ou à un groupe de dialectes français, et que cette 'communauté' ou

1 Nous exprimons nos remerciements les plus sincères à notre amie et collègue moscovite Tatiana P. Iljina, qui a attiré notre attention à cette confusion terminologique et conceptuelle, et qui nous a beaucoup aidée au cours du travail sur l'ouvrage présent.

'interdialectité' de formes a assuré leur fréquence dans les manuscrits, et, par cela, leur survivance dans la langue française.

Cependant, toutes les recherches dialectologiques et scriptologiques témoignent de l'absence de formes qui soyent réélement communes à tous les dialectes et les scripta français. D'autre part, en effet, il y a des formes communes aux dialectes différents. Par exemple, 'la Ligne Joret', c'est-à-dire, l'alternance [k : s], distingue les dialectes du nord de tous les autres; la présence/absence de consonnes épenthétiques distingue les dialectes de l'est de tous les autres, etc. Donc, il y a des formes interdialectales, ou interrégionales, qui permettent aux chercheurs de distinguer les groupes de dialectes.

Déjà G. Fallot, qu'on pourrait à juste titre considérer comme fondateur de la dialectologie historique française, a étudié «la langue française, dans les provinces situées entre le Rhin et la Loire» qui sont réparties par lui en trois zones dialectales (picarde, normande, bourguignonne), correspondant aux trois groupes de dialectes. Par suite, le «normand» inclut les dialectes des régions suivantes: Bretagne, Maine, Perche, Anjou, Poitou, Saintonge; le «picard»: Artois, Flandre, Hainaut, Bas-Maine, Tiérache, Réthélois; le «bourguignon»: Nivernais, Berry, Orléanais, Touraine, Bas Bourbonnais, Île-de-France, Champagne, Lorraine, Franche-Comté [Fallot, 1839, p. 16].

Les études ultérieures ont relevé plusieurs traits importants permettant d'affiner la classification de dialectes français et, ensuite, de scripta françaises. Néanmoins, comme nous l'avons déjà démontré dans la première partie de l'ouvrage [Stanovaïa, 2021], jusqu'à présent, il n'y a pas une seule classification unanime, malgré les siècles de recherches, multiples et variées.

La raison en est que tout dialecte représente un complexe (ensemble) de traits particuliers, dont chacun est présent à la fois dans d'autres dialectes de la langue. De ce point de vue, toute forme française serait interdialectale, ou interrégionale. Par suite, pour distinguer un dialecte, on pourrait soit le comparer avec tous les dialectes de la langue, calculant les «indices de similarité» (la méthode dialectométrique, cf. [Videsott, 2013]), soit, au contraire, le délimiter consécutivement, trait par trait, d'abord, d'un groupe de dialectes vs les autres, ensuite, d'un dialecte vs les autres, etc. (la méthode de F. Brunot, A. Lodge, M. P. Kislitzina [Kislitzina, 2008] que nous avons adoptée et appliquée).

Cependant, selon les ouvrages examinés, la raison de déterminer les formes franciennes comme 'communes' et/ou 'interdialectales' serait autre. J. Picoche et Chr. Marchello-Nizia [Picoche, Marchello-Nizia, 1996, p. 24-25] décrivent le processus de formation du français comme l'«implantantion réelle dans les parlers régionaux des formes communes à côte des formes <...> dialectales». Ayant remarqué que les formes «communes» sont, selon les Atlas d'A. Dees, «presque toujours largement majoritaires», J. Picoche et Chr. Marchello-Nizia les rapportent au dialecte «françois» lequel, à son tour, est défini de la façon suivante: «le mot «françois» (le 'francien' des philologues du XIXe s.) ne s'applique qu'au parler d'une région et non à l'ensemble des parlers d'oïl alors désigné par le terme de 'roman'» [Picoche, Marchello-Nizia, 1996, p. 23].

Autrement dit, les formes «communes» et «françoises», identiques en même temps aux formes «interdialectales» («Jusqu'au XIIIe s., on peut affirmer l'identité, dans leur majorité, des formes 'françoises' et des formes interdialectales» [ibid., p. 25 - la mise en relief des auteurs. - L.S.]) qui «s'implantent» dans les parlers régionaux, sont en réalité les formes franciennes («françois» = «le 'francien' des philologues du XIXe s.»).

Il s'ensuit que la dénomination de formes de «communes» et «interdialectales» ne sous-entend pas qu'il s'agit de formes réellement communes à toute la langue française, ou à un groupe de dialectes français. Il s'agit toujours de formes franciennes et de leur emploi fréquent, ou «presque toujours largement majoritaire», dans les manuscrits.

3.2.2. Formes franciennes vs 'littéraires', 'écrites', 'neutres', 'neutralisées', 'supra-dialectales', 'supra-régionales'

La définiton de formes franciennes comme 'littéraires', 'écrites', 'neutres', 'neutralisées', 'supra-dialectales', 'supra-régionales' présuppose que ces formes-ci ont le caractère français sans spécifité régionale («sans marquage régional», de «faible marquage régional», de «marquage diatopique faible», «diatopiquement neutre», «moins divergent des autres», etc. cf. [Ernst, 2015, p. 79; Greub, Chambon, 2008, p. 2509; Glessgen, 2017; Glessgen, Schosler, 2018; Grubl, 2013; et al.], car le caractère 'neutre', 'supra-dialectal' ou 'supra-régional', est généralement reconnu comme un des traits importants de la langue littéraire écrite.

Cela signifie, à son tour, que c'est le français moderne (le français standard) qui constitue le point de repère pour la comparaison de formes selon l'échelle graduée: «marquage régional» neutre ^ faible ^ fort. Ce n'est que par rapport au français moderne que quelques formes, par exemple, cho, chu, chest, chis, etc., auront leur spécificité régionale, tandis que d'autres, par exemple, co, ce, cest, cist, etc., seront 'neutres', 'littéraires', 'écrites', 'supra-régionales', 'supra-dialectales', etc., et par cela opposées aux formes 'marquées', 'parlées', 'familières', 'régionales', 'dialectales', etc.

Cependant, il serait abusif d'analyser l'ancien français et ses dialectes du point de vue de la langue moderne normalisée et codifiée: quand la norme commune codifiée est absente - c'est le cas de l'ancien français - toute forme a priori est dialectale, c'est-à-dire, ayant sa spécifité régionale. Autrement dit, s'il y a un trait régional particulier, propre à une forme, par exemple, présente dans le dialecte bourguignon, mais absente dans le dialecte francien, ce trait et cette forme constituent, par leur présence ou l'absence, la spécifité régionale de chaque dialecte -du bourguignon et du francien.

Par exemple, la différence bien connue qui distingue la zone dialectale picarde de la francienne, est liée aux résultats de la palatalisation [ke, ki > tse, tsi] en picard vs [ke, ki > tse, tsi] en francien. Dans les manuscrits, cette différence phonétique sonore est normalement exprimée par les graphies «ch» vs «c»: forme graphique francienne cest vs celle picarde chest.

En ancien français, les deux formes - en «c» [ts] et en «ch» [ts] - sont dialectales, qui se distinguent par deux traits spécifiques et qui caractérisent en même temps les deux dialectes - le francien et le picard. Plus tard, les formes franciennes en

«c» [ts > s] seront normatives, littéraires, françaises, tandis que les formes en «ch» [ts > s] resteront régionales, picardes. Mais, à l'époque de l'ancien français, les formes franciennes ne sont ni 'littéraires', ni 'supra-régionales', ni 'neutres' - ce sont les formes franciennes, aussi régionales, ou dialectales, que les formes picardes.

Il serait impossible, non plus, de les traiter comme 'neutralisées'. Le terme et la notion «neutralisation» sont élaborés dans la linguistique structurale, ou structuraliste, notamment par N. S. Troubetskoï (Grundzuge der Phonologie). La neutralisation signifie la disparition positionnelle (syntagmatique) d'une opposition systémique (paradigmatique), basée sur un trait (signe, marque) à valeur distinctive. Par exemple: il y a une opposition de formes grammaticales mur : murs, basée sur l'opposition de marques 0 : s et de valeurs grammaticales sg : pl. Dans le discours oral, cette opposition est neutralisée par suite de l'amuïssement de la consonne finale s [mur : mur]. La neutralisation signifie la disparition d'un trait distinctif qui aboutit à la disparition de l'opposition significative entre deux phonèmes, morphèmes, formes.

Transposant la théorie de neutralisation à la matière de formes régionales, on reçoit l'opposition suivante: cest : chest, basée sur deux traits distinctifs francien et picard [ts : ts]. Pour neutraliser cette opposition, il faudrait soit changer [ts] en [ts], soit [ts] en [ts]: c'est-à-dire, soit remplacer la forme francienne cest par la picarde chest, soit la forme picarde chest - par la francienne cest. Etant donné que les deux formes continuent leur existence dans la langue française moderne, mais en statut différent (la forme francienne cet - comme normative et littéraire, la forme picarde chet, ch't - comme régionale et usuelle), on retourne toujours au problème du choix de formes: franciennes vs celles de dialecte de base.

Sans aucun doute, pour définir les formes franciennes comme 'littéraires', 'écrites', 'neutres', 'neutralisées', 'supra-régionales', 'supra-dialectales', il faudrait proposer des critères nettes de classification. Cependant, dans les ouvrages, on emploie les termes en question sans précision, ni argumentation.

Par exemple, M.-D. Glessgen, analysant les chartes lorraines du XIIIe siècle, examine soigneusement chaque forme lorraine et confirme son origine régionale, démontrant une brillante érudition professionnelle: l'identification de chaque forme lorraine, bourguignonne, ou autre, est confirmée par les données de patois modernes, des Atlas d'A. Dees, d'ouvrages dialectologiques et scriptologiques différents. Au contraire, toutes les autres formes, d'ailleurs les plus fréquentes, sont déterminées tout de suite comme «supra-régionales» répondant «à un souci de normalisation évident» et non pas à l'influence d'un «supposé standard du 'français central'» [Glessgen, 2008, p. 465, 522].

Dans un autre ouvrage, M.-D. Glessgen, réfléchissant au caractère régional de la scripta parisienne, affirme dès le début: «il nous semble indéniable que celle-ci se caractérise pour différentes raisons par une certaine neutralité à l'intérieur du dyasystème, ce qui la rapproche <... > d'une scripta littéraire neutralisée» [Glessgen, 2017, p. 327]. Suivant la conception de F. Moren, M.-D. Glessgen distingue deux entités différentes: (1) «une scripta parisienne/de l'Ile-de-France localisable et datable», (2) «une scripta neutralisée, sans substrat géographique, née essentiellement d'un dialogue entre les différentes scriptae régionales, notamment par des effets de copie» [ibid., p. 327]. C'est justement dans la confusion de ces deux scripta -

«francienne» et «neutralisée», dénommée aussi de terme de 'français central' - que М.-D. Glessgen voit la raison de discussions et de l'absence de la «vision nette des évolutions linguistiques internes».

Se basant sur les remarques de H. Goebl et Y. Greub, que les copistes, recopiant les manuscrits, «par un mouvement mécanique», produisent «des textes plus neutres linguistiquement», М.-D. Glessgen présente le processus de diffusion de la scripta parisienne en tant que «variété exemplaire», accompagnée par «des phénomènes de neutralisation opérés lors des multiples copies des textes» [ibid., p. 334; voir aussi: Grubl, 2013].

Cependant, au cours de production de manuscrits, les copistes ne remplacent pas, «par un mouvement mécanique», certaines formes régionales par d'autres, «neutralisées». Selon A. Dain [Dain, 1964, p. 16], «le scribe rajeunit sa copie, la normalise, et au besoin la corrige».

D'autant plus, selon les données de L. Remacle, Ch.-Th. Gossen, H. Goebl et d'autres scriptologues, les chartes qui sont normalement les textes originaux, non copiés, contiennent jusqu'au 70-80%, et encore d'avantage, de formes franciennes, ou, suivant la terminologie 'nouvelle', «neutralisées». Donc, ce n'est pas justement le copiage répété au cours des siècles qui conditionne l'existence de textes manuscrits «neutralisés».

Plusieurs recherches, notamment textologiques, prouvent que les modifications, apportées par les copistes, sont beaucoup plus variées et différentes, et elles ne sont pas limitées par le «mouvement mécanique» de remplacement de formes dialectales par celles «neutralisées».

3.3. Attitude envers le (les) protographe(s)

3.3.1. Texte comme diasystème

Toutes les recherches textologiques présentent l'étude et la comparaison de variantes manuscrites (s'il y en a) des oeuvres littéraires, nécessaires pour établir et décrire 'la langue de l'auteur' et 'la langue du copiste'. Il s'ensuit que chaque texte manuscrit littéraire représente l'interférence au moins de deux systèmes linguistiques: celui de l'auteur et celui du copiste.

Les stemma, ou stemmes, composés par suite de ces études, présentent, sous une forme schématique, les rapports établis par des chercheurs entre les 'variantes', 'rédactions', 'versions', 'remaniements', 'dégradations', etc., d'un 'archétype' (texte original), fixés dans les manuscrits conservés. En même temps, les stemma comportent les indications sur les manuscrits intermédiaires, non conservés, mais présupposés en tant que protographes, dont les copistes se sont servis au cours de la production de manuscrits conservés.

Selon les stemma que nous avons examinés au cours de nos recherches, il vaudrait mieux parler de l'interférence de plusieurs systèmes linguistiques: celui de l'auteur et ceux des copistes. C. Segre réfléchissant aux particularités de l'exécution de manuscrits, aux mécanismes de transmission des textes, aux facteurs conditionnant la variation textuelle, a remarqué que «le mélange linguistique représenté par les transcriptions médiévales constitue un type particulièrement développé et intéressant de diasystème» qu'on pourrait représenter de la façon suivante: «le diasystème sera le résultat du compromis entre le système du texte (S1) et le système du copiste (S2):

D = S1 + S2. Mais cette même copie sera à son tour recopiée par un autre copiste, avec son système (S3); il en résulte: D = (S1 + S2) + S3, et ainsi de suite. L'établissement du stemma coïncidera alors avec une stratigraphie des divers systèmes qui coexistent dans un texte» [Segre, 1976, p. 286].

Il est important de souligner qu'un texte manuscrit littéraire n'est pas conçu comme un simple résultat de copiage, mais comme un compromis linguistique atteint par des copistes médiévaux qui «travaillent normalement entre deux pôles d'attraction: l'effort pour respecter l'exemplaire qu'ils copient et la tendance à suivre leurs propres habitudes linguistiques» [Segre, 1976, p. 285]. Suivant «leurs propres habitudes linguistiques», les copistes pouvaient se comporter différemment: comme auteurs, comme compilateurs ou remanieurs, et comme transcripteurs [Walters, 1985].

De ce point de vue, il serait difficile de comprendre, comment les modifications apportées par les copistes, auraient provoqué la «neutralisation»: chaque copiste, cherchant un compromis linguistique «entre deux pôles d'attraction», devait soit copier les formes protographiques, soit les modifier selon ses «propres habitudes linguistiques». De toute façon, cela provoque l'hétérogénéité de textes résultatifs.

Cette conclusion purement logique est confirmée par les études textologiques empiriques, visées à distinguer, dans chaque variante manuscrite, les formes du 'dialecte de l'auteur' et celles du 'dialecte du copiste', afin d'établir ensuite le 'dialecte' du texte archétypique et de localiser les textes manuscrits conservés, examinés par des chercheurs.

Au contraire, pour «neutraliser» le 'dialecte de l'auteur' et les 'dialectes' de tous les copistes qui ont rédigé, au cours des siècles, de multiples manuscrits intermédiaires non conservés et ultimes conservés, il faut que tous les copistes remplacent les formes dialectales par les formes «neutralisées», lesquelles, comme nous l'avons déja démontré, sont en réalité franciennes, corrélantes normalement avec les formes correspondantes du français moderne.

A cet égard, il n'y a rien d'étonnant que dans l'histoire tant traditionnelle que 'nouvelle', on définit souvent le 'dialecte de l'auteur' comme francien, et on décrit le «caractère français/francien» de plusieurs textes manuscrits littéraires. M.-D. Glessgen l'atteste lui-même et critique la bibliographie du DEAF, où le dialecte de plusieurs oeuvres littéraires est défini comme francien. Pour que personne n'ait l'idée «erronée que ce francien posséderait une tradition ancienne remontant jusqu'à la première époque des textes français» [Glesgen, 2017, p. 333], M.-D. Glesgen définit comme «fortement neutralisées» toutes les formes, relevées par suite de l'étude de textes manuscrits parisiens, et il conclut que dès le début, «l'écrit se caractérise (comme à l'époque pré-textuelle) par une forte volonté de dédialectisation grapho-phonétique, morphologique et lexicale» [ibid., p. 384].

En réalité, tous les textes manuscrits français, y compris les franciens, possèdent des caractéristiques saillantes, conditionnées en grande partie, par les habitudes linguistiques de copistes, influencés, dans leur travail, d'une part, par le (ou les) texte copié, et de l'autre, par les normes admises dans telle ou telle scripta. On le

voit assez nettement à travers les manuscrits qui sont toujours marqués par la personnalité du copiste.

Les recherches textologiques, décrivant des différences entre 'la langue de l'auteur' et 'la langue du copiste', prouvent que la quantité et la qualité de modifications apportées, varient selon les copistes et les scripta, ce qui, à son tour, permet de distinguer les normes scripturales, réglementant le travail de copistes, y compris l'attitude envers les protographes - quoi et en quelle mesure, peut-on «rajeunir, normaliser et au besoin corriger».

3.3.2. Le respect de protographes par des copistes franciens

Réunissant les données des éditeurs de textes manuscrits examinés avec nos propres remarques, nous avons supposé que les copistes franciens ont trouvé l'équilibre «entre deux pôles d'attraction»: respectant les protographes, ils les «rajeunissaient, normalisaient et corrigeaient» juste «au besoin» et avec modération.

Par exemple, Cl. Régnier [Régnier, 1966, p. 12-15, 38-40, 72-77] a caractérisé les textes manuscrits franciens (mss P., B.N., f.fr. 774; P., B.N., f.fr. 1449) exécutés, selon lui, dans le même atelier au milieu du XIIIe siècle, comme les variantes les plus anciennes, d'après l'usage linguistique, et les plus proches de l'archétype, du point de vue littéraire. D'autre part, il a défini le texte manuscrit L., Br.M., R 20DXI comme picard, à cause du «soin» apporté à la correction de toutes les 'fautes de déclinaison'. En même temps, il a remarqué que ce texte ne présente que quelques modifications «formelles», corrigeant et rajeunissant le modèle, et que le copiste, «par préoccupation de purisme», a voulu «transposer son modèle dans la langue commune, <...> mais il n'a pas su éliminer tous les traits dialectaux» dont: la forme unique cis pour cil, cist; épenthèse de -e- (meteront, penderoie), parfait en -isent (quisent, misent, prisent); les flexions -ions, -iez à l'Imparfait et au Conditionnel.

Il est à ajouter que selon N.A. Katagoshchina [Katagoshchina, Gouritchéva, Allendorf, 1976, p. 143], la flexion picarde à l'Imparfait et au Conditionnel serait -iens, selon P. Bec [Bec, 1971, p. 26-27] et Cl. Buridant [Buridant, 2019, p. 382] - -iemes; Cl. Buridant remarque à la fois que [yons] apparaît au début du XIIIe siècle, «notamment dans les textes picards».

Selon l'Atlas des textes littéraires d'A. Dees, la flexion -ions à l'Imparfait est rare dans les scripta littéraires picardes du XIIIe siècle: «Somme» = 16% (-iens, -iemes = 84%) et exclue en «Wallonie», «Hainaut», «Moselle» = 0%; en revanche, elle est majoritaire dans la plupart de scripta: «Charente», «Vendée», «Oise», «Aube», «Meuse», «Nièvre», «Angleterre» = 100%, «Région parisienne» = 89%, «Normandie» = 80%, «Haute-Marne» = 69 [Dees, 1987, p.443]. Les formes du parfait en -isent seraient plutôt lorraines: «Moselle», «Meuse» = 100%, elles sont aussi présentes dans les scripta: «Wallonie» = 80%, «Somme» = 79%, «Hainaut» = 75%, «Ardennes» = 50%, «Oise» = 33%, «Marne» = 17%, «Haute-Marne» = 6% [Dees, 1987, p. 417]. Les formes avec -e- épenthétique sont présentes dans les scripta: «Somme» = 51%, «Nord» = 50%, «Wallonie» = 41%, «Hainaut» = 25%, «Angleterre» = 20%, «Aisne» = 17%, «Haute-Marne» = 5% [Dees, 1987, p. 371].

Selon nos données, la forme cis est, en effet, relativement plus fréquente dans les manuscrits picards et wallons que dans les manuscrits franciens, elle est rare dans

les manuscrits lorrains et absente dans les manuscrits normands, anglo-normands et bourguignons.

Il s'ensuit que les particularités susmentionnées ne sont pas manifestement picardes, afin de s'en servir pour la localisation de manuscrits.

Au contraire, le manuscrit Boulogne-sur-Mer, B.M. 192, défini par Cl. Régnier [Régnier, 1966, p. 12-15, 78-81] comme «nettement picard», présente la variante «profondément» modifiée. Apparemment, le copiste picard a changé tout, à commencer par l'assonnance remanié en rime. Il a modifié tout le récit, «afin de l'adapter à des modèles littéraires nouveaux, à l'évolution de l'esthétique et du goût»; il a ajusté l'«organisation interne» du poème, afin de «construire un récit logique et cohérent qui motive les actes des personnages, il évite les moyens simplistes et le merveilleux»; enfin, il a apporté «l'élément romanesque», différent par sa nature au genre de la chanson épique.

Il est évident que les copistes franciens et picards ont démontré une attitude différente envers les protographes. Le copiste picard s'est comporté en remanieur, influencé par un seul «pôle d'attraction» - ses propres «habitudes linguistiques», dictées et prescrites par les normes scripturales picardes. Les copistes franciens des manuscrits P., B.N., f.fr. 774; P., B.N., f.fr. 1449; L., Br.M., R 20DXI, qui ont suivi les protographes plus fidèlement, se sont comportés en transcripteurs, influencés par deux «pôles d'attraction», ce qui, à son tour, serait dicté et prescrit par les normes scripturales franciennes.

Prenant en considération: (1) l'attitude envers les protographes, manifestement différente chez les copistes picards et franciens, (2) l'homogénéité de l'usage linguistique, assurée par l'absence de formes sûrement picardes (article f. sg. li, le; démonstratifs en ch-; possessifs f. sg. me, te, se), (3) la 'norme analogique' de la représentation graphique de la déclinaison nominale, nous avons rapporté le manuscrit L., Br.M., R 20D.XI aux franciens. En même temps, nous avons supposé qu'on pourrait expliquer la présence de quelques formes, définies par Cl. Régnier comme picardes, par le protographe picard.

Dans d'autres ouvrages, nous avons trouvé des remarques pareilles qui révèlent la différence de normes scripturales franciennes et picardes.

L. Walter [Walter, 1985], par suite de l'étude de romans de Chrétien de Troyes selon trois manuscrits picards, dont, en particulier, le susmentionné P., B.N., f.fr. 375 à la localisation discutable, a noté les «modifications les plus radicales», et elle a conclu que les copistes picards ne se sont pas limités par «une mise ensemble mécanique de textes», mais «se donnent des fonctions amplifiées». Ainsi, Perrot de Nesle qui a rassemblé la collection de textes, a créé un prologue pour tout le manuscrit, il a composé et il a ajouté une série de sommaires rimés, placée en tête du manuscrit. Jehan Madot, lui, a ajouté des vers à la fin du Roman de Troie, devenu ainsi non seulement transcripteur, mais auteur de la version manuscrite, co-auteur et continuateur de l'œuvre de Benoît de Sainte-Maure.

J.-L. Leclanche [Leclanche, 1980, p. 7-42] a caractérisé la variante du manuscrit francien (P., B.N., f.fr.1447) comme la plus proche de la «leçon originale». Les remaniements de texte ne sont pas considérables, et ils ne présentent que quelques changements «formels», corrigeant et rajeunissant le modèle avec

«modération» et «tendence vers le conservatisme». En même temps, il a noté le «souci de régularité» de la flexion nominale du copiste francien qui «remanie le texte pour en supprimer des 'incorrections' ancrées à la rime», bien qu'il ne reconnaisse pas toujours les «constructions anciennes». Le copiste picard (ms P., B.N., f.fr. 375), au contraire, «régularise la syntaxe d'accord», et il corrige avec «vigilance» toutes les 'fautes de déclinaison'. D'autre part, il «veille avec efficacité à donner à son texte un coloris dialectal uniforme», présentant «une bonne illustration de l'adaptation de la scripta picarde à l'usage littéraire, caractéristique de ces scriptoria du nord de la France à la fin du XIIIe siècle» [ibid., p. 25-28].

J. Rychner [Rychner, 1960, 1, p. 68-79] a noté moins de 'fautes de déclinaison' dans le manuscrit francien (P., B.N., f.fr. 837), de la fin du XIIIe siècle, que dans un autre manuscrit francien (P., B.N., f.fr. 24432), du premier tiers-milieu du XIVe siècle, bien que le copiste du XIVe siècle sache «parfaitement se servir de la déclinaison, quand elle lui est utile». En même temps, refléchissant aux modifications apportées par ce copiste du XIVe siècle «à la grammaire du fabliau original», J. Rychner a conclu que «la langue» du copiste «accuse, certes, une époque plus récente <...> mais ses traits ne se sont pas encore fixés, puisque l'ancien usage subsiste à coté d'eux». Cela signifie que le copiste francien du XIVe siècle a rajeuni le protographe, mais de sorte que «l'ancien usage subsiste». Comparant les variantes du point de vue littéraire, J. Rychner a noté «l'intention» du copiste francien à redonner à ses textes «un style plus expressif, versification plus simple, plus orale».

Apparemment, les copistes franciens se trouvaient souvent dans la situation génante, car ils devaient trouver le compromis entre la nécessité, d'une part, de régulariser l'emploi de formes nominales dites 'casuelles' selon le type analogique, et de l'autre, de conserver les formes 'fautives' protographiques, nécessaires pour garder les assonances et les rimes correctes.

En revanche, les copistes picards, choisissaient toujours la «belle régularité» de formes nominales, ce qui à son tour, a conditionné le fait bien connu: parmi les variantes manuscrites des oeuvres littéraires, les picardes se distinguent, d'une part, comme les moins 'fautives' dans l'emploi de formes de CR au lieu de celles de CS, mais de l'autre, comme contenant le maximum de 'fautes' d'hypercorrection, c'est-à-dire, de formes de CS employées au lieu de celles de CR.

Tous les chercheurs soulignent l'attention extrême de copistes picards à rendre la déclinaison nominale particulièrement régulière. Ch.-Th. Gossen [Gossen, 1971], parmi les faits témoignant du «conservatisme» et du «formalisme» de copistes picards, a indiqué la présence de formes du CS dans les manuscrits picards jusqu'à la fin du XVIe siècle, et il a caractérisé les manuscrits picards comme exemple «d'un mirage linguistique», où très rarement «la réalité linguistique triomphe le formalisme des scribes» [Gossen, 1962, p. 289].

Résumant les faits, nous avons supposé que les copistes franciens suivaient mieux les protographes, «rajeunissant, normalisant et corrigeant» les formes et les textes juste «au besoin». C'est pourquoi, les variantes franciennes sont souvent qualifiées comme les plus anciennes et les plus proches des archétypes. D'autre part, les textes fixés dans le même manuscrit peuvent différer par des formes occasionnelles, gardées par les copistes comme traces de protographes. C'est ainsi

qu'on pourrait expliquer les discussions susmentionnées sur la localisation de textes différents, fixés dans les mêmes manuscrits franciens.

Néanmoins, il faudrait souligner que les formes morphologiques franciennes sont en majorité, tandis que la quantité de formes occasionnelles, probablement protographiques, est insignifiante. C'est que, les copistes franciens, eux aussi, redonnaient aux manuscrits exécutés le caractère unifié francien, en remplaçant les formes protographiques par les franciennes. L'homogénéité de l'usage linguistique, assurée par l'emploi majoritaire de formes franciennes, constitue la particularité très importante de textes manuscrits franciens.

Les scripta picardes possédaient des normes rigoureuses, suivant lesquelles les copistes picards apportaient beaucoup de modifications dans les manuscrits exécutés, «rajeunissant, normalisant et corrigeant» souvent considérablement les formes et les textes entiers. Par suite de ces modifications («picardisation»), tous les textes fixés dans le même manuscrit, ont obtenu un caractère unifié picard bien distinct. Cependant, l'usage linguistique n'est pas homogène vu l'emploi de formes picardes et franciennes.

Il faudrait souligner que tous les textes manuscrits français examinés, sauf les franciens, sont pareils, car ils contiennent des formes franciennes et celles des dialectes de base, dont les quantités varient selon le genre (littéraire ou administratif), les normes scripturales et les époques de l'exécution. Les textes manuscrits franciens se distinguent par l'usage linguistique homogène, assuré par l'emploi majoritaire, ou même absolu, de formes franciennes.

4. Conclusion

Étant donné que les textes manuscrits conservés, exécutés par les sujets parlants et écrivants de l'époque étudiée, constituent l'unique matière d'étude objectivement donnée, l'argument majeur des critiques du francien - l'absence de textes franciens écrits avant 1200 - devient mal fondé, vu la quantité restreinte de premiers textes manuscrits français.

Les premiers manuscrits en français apparaissent dans les scriptoriums et les ateliers du centre de la France au XIIIe siècle. Le fonds de textes manuscrits franciens est suffisant pour les recherches approfondies. L'opinion paradoxale de certains chercheurs affirmant l'absence totale d'attestations écrites du francien, est liée à la localisation imparfaite et souvent discutable de plusieurs manuscrits français, y compris de franciens. C'est que la localisation d'un manuscrit dépend, presqu'entièrement, de points de vue de chercheurs, qui tournent dans le cercle vicieux de problèmes interdépendants: classification de scripta et de dialectes -contours de zones scripturales et dialectales - localisation de textes manuscrits.

Obligée de réviser et de vérifier la localisation discutable de textes manuscrits examinés, nous avons élaboré et utilisé encore deux méthodes d'étude et de localisation de textes manuscrits - 'horizontale' et 'verticale' - lesquelles nous ont permis de relever les traits importants de textes manuscrits franciens, et par suite, des scripta franciennes: (1) la coexistence de deux normes scripturales (étymologique et analogique) dans la représentation graphique de la déclinaison nominale; (2) l'homogénéité de l'usage linguistique, assurée par l'emploi majoritaire de formes

franciennes; (3) le respect de protographes que les copistes franciens modifiaient avec modération.

La plupart de textes manuscrits litteraires franciens analysés sont du type analogique, avec une quantité de 'fautes' variant de 5% à 25%. La 'déclinaison' du type étymologique presque détruite, avec une quantite de 'fautes' variant de 80% à 95%, est propre à toutes les chartes franciennes analysées et aux certains textes manuscrits litteraires.

L'examen de plusieurs ouvrages a démontré l'absence de critères nettes de classification de formes définies comme 'françaises', 'communes', 'interdialectales', 'interrégionales', 'littéraires', 'écrites', 'neutres', 'neutralisées', 'supra-dialectales', 'supra-régionales', etc. Par suite de nos études, nous avons conclu que les formes en question sont en réalité franciennes, propres au dialecte francien en tant que dialecte de base des scripta franciennes.

Les textes manuscrits franciens se distinguent par l'usage linguistique homogène, assuré par l'emploi majoritaire, ou même absolu, de formes franciennes. Tous les autres manuscrits français présentent l'usage linguistique hétérogène, car ils contiennent des formes franciennes et celles des dialectes de base, dont les quantités varient selon le genre (littéraire ou administratif), les normes scripturales et les époques de l'exécution.

Les copistes franciens ont trouvé l'équilibre «entre deux pôles d'attraction»: respectant les protographes, ils les «rajeunissaient, normalisaient et corrigeaient» juste «au besoin» et avec modération. Par suite, les textes d'oeuvres différentes fixés dans le même manuscrit francien peuvent différer par des formes occasionnelles, gardées par des copistes comme traces de protographes. Néanmoins, la quantité de formes occasionnelles, probablement protographiques, est insignifiante.

Tenant compte de l'absence de description systématisée du dialecte et des scripta franciens, nous sommes persuadée que plusieurs problèmes importants, examinés en bref dans le présent ouvrage, attireront l'attention de chercheurs et deviendront l'objet de nouvelles études.

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