FILMS SUR ATTILA
Prof. Grigori Tomski Académie internationale CONCORDE
g. tomski@gmail. com
L'article contient une analyse des principaux longs métrages sur Attila, créés par des cinéastes européens et américains. On montre montré qu'il n'y a aucun besoin de déformer la réalité historique comme les auteurs de ces des films pour créer de futurs films fascinants sur ce grand figure historique.
Mots-clés: Critique des films sur Attila, Fritz Lang, Die Nibelungen, Signe du païen Attila, le fléau de Dieu, La vengeance de Kremhild.
À la fin de l'année 2000, pendant une exposition de l'Art du JIPTO, un homme sérieux s'est arrêté pensif devant une composition inspirée des images des rochers de la Léna avec des cavaliers des steppes avec des bannières. J'ai rencontré ainsi Jean-Claude Baudot qui a créé, peu de temps avant cette visite avec sa femme l'actrice Cora Delbos, l'association cinématographique Chance Production. Il m'a dit que le thème de l'histoire des peuples des steppes est très intéressante pour le cinéma mondial, mais il n'y a encore aucun film digne d'attention sur Attila, la personnalité historique de ces peuples la plus célèbre et connue en Europe. Avait-il le droit de dire ainsi ? Passons en revue les quatre principaux longs métrages sur Attila, créés avant cette conversation.
Film dédié au peuple allemand (1924)
Film de Fritz Lang (1890-1976) Die Nibelungen, basé sur le poème épique germanique médiéval Chanson des Nibelungen, est sorti en Allemagne en 1924. Le film est composé de deux parties: Siegfried et Kriemhilds Rache (La Vengeance de Kriemhild). Attila et les Huns apparaissent dans la deuxième partie. L'inscription «dédié au peuple allemand» («dem deutschen Volke zu eigen ») arrive immédiatement après le titre du film. Le film a obtenu la plus grande reconnaissance du public et il est considéré comme l'un des plus grands succès commerciaux du cinéma allemand des années 1920. Le travail des opérateurs de Carl Hoffmann et Gunther Rittau est considéré comme l'un des plus remarquables au cinéma de l'époque.
Fritz Lang lui-même racontait souvent qu'en 1933, Joseph Goebbels, ministre de la propagandedu du Troisième Reich, lui a fait part de l'admiration du Führer pour Nibelungen etMétropolis, films qu'il a vus et aimés. Il se serait écrié « c'est l'homme qu'il nous faut pour créer le cinéma national-socialiste ! ». Goebbels a proposé donc à Lang de devenir le directeur du Centre cinématographique nazi. Que pourrait être tellement apprécié par Hitler et Goebbels dans le film Nibelungen ?
Le film idéalise le royaume des Burgonds avec sa capitale à Worms, qui existait au V siècle. C'était l'un des nombreux royaumes barbares germaniques, mais Guy Bornier ([1], p.16) note que dans le film : «c'est, selon Fritz Lang, l'univers de la culture raffinée, presque trop raffinée ... Les châteaux dominent l'espace, les ponts-levis surplombent le vide, les arcades, les piliers, les escaliers sont immenses.
En face, le monde des Huns, c'est l'Orient, c'est l'Asie... Le monde barbare des Huns se présente comme un mélange de traits empruntés aux Peaux-rouges, aux Asiatiques et aux Noirs d'Afrique. Face à la noblesse hiératique des Burgondes, les Huns deviennent des sous-hommes (Untermenschen), des hommes des cavernes.»
«Il fait se demander d'où proviennent ces traits indubitalement nationalistes. Une solution facile consisterait à accuser la femme de Fritz Lang de tout ce mal. Elle avait des opinions ultra-conservatrices ... Après 1933 et après le divorce d'avec Fritz Lang, elle prit parti pour les thèses nazis ... Dès la présentation du film, en 1924, elle affirmait que le film devait être comme le message de l'âme allemande ; pareil aux apôtres, il devait aller proclamer son message aux peuples du monde entier.» ([1], p. 22)
Dans le même temps, l'image d'Attila provoque un sentiment mitigé aux spectateurs : il «possedait tout, il avait maximun de ce qu'un homme peut posseder, le pouvoir. Mais il voulait aussi un bonheur personnel, humain, que roi et grand-maître ne doivent pas posserder; et ainsi, il détruit lui-même son pouvoir.» Stupéfié par la beauté de la princesse Kriemhild, sœur de Gunther, roi des Burgondes, il devient un instrument de sa vengeance pour
l'assassinat de son premier mari Siegfried par Hagen, guerrier vaillant mais perfide ([1], p. 19).
Attila et Kriemhild
Heureux Attila avec son fils de Kriemhild
Hagen prédit une courte vie au fils d'Attila
Attila refuse à Kriemhild une seule fois, quand elle exige de tuer Hagen, qui est venu à la capitale des Huns sur son invitation avec Gunther et d'autres Burgondes, car l'hospitalité est sacrée pour les Huns. Mais Hagen tue son enfant lors de l'attaque des Huns sur l'ordre de Kriemhild. Après cela, la délégation burgonde devient hors la loi.
Le palais d'Attila brulant, où les Burgondes assiégés resistent désespérement
Le film Nibelungen : La vengeance de Kremhild produit une forte impression. Les Burgondes auraient pu être sauvés si Gunther avait livré Hagen à Kriemhild et Attila, mais il ne le fait pas à cause de son "âme allemande" ([1], p. 21). La fidélité à Attila gardent ses nobles vassaux germaniques : le margrave Rüdiger von Bechlarn avec ses guerriers et Dietrich von Bern.
Dans la scène finale, von Bern entre dans le palais brûlant et sort avec le roi Gunther blessé, que Hagen soutient. Kriemhild tue Hagen avec un coup d'épée et immédiatement après cela meurt de la main d'un écuyer, qui n'aime pas que les héros doivent mourir dans un feu ou d'un coup de femme. Attila ordonne que la dépouille de Kriemhild rejoigne celle de son Siegfried.
Bien sûr, dans un tel film, il est impossible de chercher même un brin de vérité historique. En outre, le film contredit sa source épique, Chanson des Nibelungen, dans laquel Attila est montré dans toute sa puissance et représente un bel exemple de chevalerie :
«Il est bien sûr noble, de haut lignage ... Tout d'abord, le comportement d'Etzel (Attila) envers les dames correspond aux exigences de la société courtoise ... Il ne partagera la couche avec Kriemhild qu'au jour de leur noce, précise le poète ...
Chez les Huns aussi, on s'efforce la mériter par les armes une belle jeune fille ... Les fêtes au royaume des Huns - les noces et la grande fête du solstice d'été sont plus brillantes encore que celles données à la cour de Worms ... C'est l'occasion d"un grand déploiement de richesse. Des tentes superbes ont été préparées de superbes tapis ... la salle qui doit accueillir
les Burgondes a été préparée avec une débauche de luxe : lits somptueux, larges et longs, superbes courtepointes d'Arras faites de soieries claires, couvre-pieds taillés dans les soies d'Arabie ... rehaussés de galons qui brillaient de vif éclat ... Le sens du beau ne s'exprime pas seulement par le luxe des aménagements et des vêtements, les arts ont leur place dans la cour du roi des Huns, en particulier la musique ... Dans cette société où les comportements sont soigneusement codées, tout manquement à l'étiquette est interprété de manière négative ... » ([2], p. 48-50).
Apparemment, cette divergence du film Nibelungen : La vengeance de Kremhild de sa source originale était évidente pour les Allemands, alors on l'a montré moins souvent que le film de Nibelungen : Siegfried. Fritz Lang lui-même a prit également une certaine distance du film que nous avons analysé. Au début des années 1960 il a refusé une offre de faire son remake.
Notons que le premier long métrage sur Attila de 1918 était également nationaliste, mais il a été créé dans l'intérêt de la propagande anti-allemande. Il a été créé sur l'initiative du gouvernement italien, qui a participé à la Première Guerre mondiale du côté de l'Entente, afin d'inspirer les Italiens à combattre les armées de l'Autriche-Hongrie et de l'Allemagne, en identifiant les Allemands aux yeux des spectateurs avec les «hordes d'Attila».
Exaltation du christianisme dans le film "Signe du païen" (1954)
http://www.dvdclassik.com/critique/le-signe-du-paien-sirk
Les Huns dans ce film ont une apparence normale par rapport au film Fritz Lang, certains portent même des casques et des armures.
Cependant, le film nous étonne par un mépris total des faits historiques, bien que l'histoire d'Attila et des Huns a été assez bien décrite encore au XVIIIe siècle dans le livre classique de Gibbon Histoire du déclin et de la chute de l'Empire romain qui reste pertinente jusqu'à présent [3].
Le rôle d'Attila est interprété par Jack Palance (1919-2006)
Le héros principal est le centurion Marcian, qui devient l'époux de la princesse Pulcheria et l'empereur de l'Empire romain d'Orient. Il est au début du film un émissaire de Valentinen, empereur de l'Empire romain d'Occident, qui est capturé par les Huns et déclare fièrement à Attila: «Votre horde sera détruite! Un Romain vaut vingt Barbares!»
Dans cette scène, exprimant évidemment la vision des auteurs du film, tout est falsifié de façon flagrante. Le vrai Marcian (Marcien) n'avait aucun rapport avec l'Empire romain de l'Occident, il était le garde du corps d'Aspar, commandant en chef barbare des armées de l'Empire romain d'Orient, qui a subi à plusieurs reprises les défaites écrasantes de la part des Huns. Marcien n'a fait sa carrière que grâce à la protection de son maître barbare. Notons que le général Aspar était un Alain, c'est-à-dire un homme d'origine des steppes, dont les ancêtres ont fui des Huns après la défaite.
La princesse Pulchérie, très religieuse et ascétique, dont la mère était de la tribu barbare des Francs, s'est transformée en une belle fille joviale qui veut apprendre de Marcian tout sur Rome: "les rumeurs du palais, comment les femmes s'habillent".
Dans la réalité Pulchérie toute sa vie gardait "sa virginité, qu'elle avait vouée et consacrée à Dieu".
Dans ce film, Attila formule ses intentions comme suit: "Je libérerai les peuples de l'Orient et de l'Occident du joug romain. Chacun va revenir à sa propre mode de vie".
Le fantasme des scénaristes va jusqu'au coup d'état avec l'abdication de l'empereur Theodosius, organisé par le couple amoureux de Marcian et Pulchérie, et la participation de Marcian à la défense en Italie de l'Empire romain d'Occident contre les Huns.
Attila est beaucoup tourmenté par les étranges prédictions des magiciens païens auxquels il s'adresse de temps en temps.
Il s'agit donc de la première tentative dans l'histoire du cinéma de l'explication du mystère de la rencontre d'Attila et de Léon. En effet, des générations de savants et d'autres experts de l'histoire se posaient la même question : «Pourquoi Attila n'a-t-il pas pris Rome et a quitté l'Italie après avoir rencontré le pape Léon ?»
En effet, le contenu des négociations entre Attila et Léon est l'un des plus grands mystères historiques.
Le film exalte de la foi chrétienne et fait l'éloge du pape romain Léon. À cette fin est imaginée, en particulier, l'existence d'une fille d'Attila, qui est très belliqueuse au début du film, mais se transforme en chrétienne pacifique et meurt du coup de son père perturbé par le fait qu'elle a transmis l'information à l'ennemi par la solidarité religieuse. Après cela, Attila voit en rêve une bataille avec une innombrable armée de fantômes, parmi lesquels sa fille. Il décide alors de quitter l'Italie. Mais les Romains organisent une embuscade le long de la route et tirent sur les Huns des flèches ! En réalité, ces Huns étaient des archers insurpassés, qui étaient rarement entrés dans des mêlées corps à corps.
Pendant le duel entre Attila et Marcian, une des femmes d'Attila capturées par la force le poignarde dans la poitrine. L'ombre du poignard ressemble à une croix chrétienne, que beaucoup de téléspectateurs ont sans doute perçus comme une trouvaille créative réussie des auteurs. Le film se termine par les mots mis par ses auteurs dans la bouche de l'Attila mourant: "Votre Dieu m'a vaincu !"
Dans cette situation, Attila rencontre le pape romain Léon, qui menace par un châtiment de Dieu et part sans attendre sa réaction, ce qui est inconcevable pour une mission diplomatique.
Film italo-français sur Attila (1954)
S'il est rarement possible d'attendre des films historiques véridiques des cinéastes hollywoodiens, peut-on espérer que le film italo-français Attila, le fléau de Dieu ne pèche pas trop contre des faits historiques mieux connus des Européens ?
Ce film est basé sur l'histoire de la longue amitié d'Aetius avec Attila, réécrite en sa faveur, et l'intrigue de la relation entre Attila et la princesse romaine Honoria. Le général Aetius est montré, de la manière traditionnelle pour les Européens, comme un défenseur inébranlable de Rome, mais qui était en réalité une création politique d'Attila et se distinguait par sa perfidie, bien décrite dans la monographie classique de Gibbon [3].
Attila (Anthony Quinn) dans un casque imaginé par les auteurs
Attila, portant les "jeans" ou les "collants", avec Aetius
Galla Placidia, mère du faible et nonchalant empereur Valentinien, est montrée comme une sage dirigeante qui parle beaucoup de la grandeur de Rome et méprise profondément des barbares. Les auteurs «oublient» qu'elle était la veuve du roi barbare Athaulf et continuait d'entretenir de bonnes relations avec le royaume des Wisigoths avec la capitale à Toulouse.
Dans ce film, l'invasion d'Attila de l'Empire romain d'Occident se produit à l'initiative de la princesse Honoria, qui correspond aux sources historiques.
Galla Placidia et sa fille Honoria (Sophia Loren)
Selon les auteurs du film, les relations de la princesse Honoria et Attila ont commencé pendant le séjour (stage) du jeune Attila à Rom
Puis, Honoria arrive au camp des Huns
Après la victoire dans une bataille, Attila parcourt le champ avec son jeune fils, en le faisant monter en selle devant lui. Un légionnaire blessé tire une flèche et tue le garçon. La mort du fils a boulversé profondément Attila.
La délégation du pape Léon, composée des hommes pacifiques en robes blanches et portant des croix, vient à la rencontre de l'armée des Huns.
Le pape parle longuement et majestueusement, mais sans aucun d'arrogance.
Son discours sur le sang des innocents et la compassion convainc Attila, qui est sous le stress de la mort de son jeune fils.Attila ordonne à
son armée de quitter l'Italie.
Le film se termine par l'image d'une croix qui apparaît dans le
cielEn
En 1952, l'église chrétienne a célébré le 1500e anniversaire de la rencontre historique du pape Léon avec Attila. Par conséquent, il n'est pas surprenant l'apparition à cette époque de l'idée de créer des films sur ce grand événement. Probablement le Vatican a participé directement ou indirectement à leur financement
Deuxième version de «La vengeance de Kremhild» (1967)
http://www. imdb.com/title/tt0060750/
Fritz Lang a décliné au début des années 1960 la proposition de faire un remake du film sur les Nibelungen. Le film a été réalisé par Harald Reinl (1908-1986). Bien sûr, dans les conditions de la décolonisation, il était impossible de montrer au spectateur mondial un film sur les superhommes et les créatures primitifs, bien que dans sa jeunesse, Reinl avait collaboré activement avec le célèbre Leni Riefenshial, célèbre propagandiste du troisième Reich.
Les auteurs du film n'avaient qu'à adhérer à l'esprit de la source originale: Chanson des Nibelungen, décrivant bien la puissantes des Huns, l'éclat et le raffinement de la cour d'Attila.
En effet, Attila (Herbert Lom) dans ce film est bien habillé et même a une coiffure soignée.
La réception d'Attila correspond plus ou moins à sa description dans l'épopée germanique.
Pour la décoration du palais, des éléments, qui rappellent le grand art animalier des steppes, ont été utilisés.
Dans la capitale d'Attila, un haut degré de tolérance religieuse est pratiqué.
Le personnage d'Attila dans ce film dans son ensemble correspond aux descriptions de l'épopée germanique :
«Par delà les comportements dictés par les conventions sociales et son rang de roi des Huns, Etzel (Attila) est un personnage profondément humain ...
Le poète médiéval a prêté au personnage d'Attila ... tous les traits du souverain idéal tel que le conçoit la société courtoise : puissance, noblesse, loyauté, tolérance, sens du beau et du faste. La souverain païen devient ainsi un modèle pour les seigneurs chrétiens.» ([2], p. 5253).
Les guerriers germaniques portent des excellentes armures, ce qui crée un sentiment de leur supériorité.
En réalité, au temps d'Attila, il n'y avait pas de supériorité culturelle des peuples germaniques sur ceux des steppes eurasiennes, et dans l'art militaire, les peuples sédentaires étaient encore longtemps des élèves des peuples des steppes.
Une image impressionnante du palais d'Attila en feu.
Il sera mieux à tous les égards si la troisième tentative d'adaptation des Nibelungen s'effectue avec la participation de représentants créatifs des descendants des peuples steppes.
Notons en conclusion que, en 1972, le film télévisé italien La tecnica e il rito (Technique et rituel), qui raconte l'arrivée de Attila au pouvoir, a été réalisé par Miklos Jancso (1921-2014). Les auteurs de ce film n'ont pas pretendu à la fiabilité historique de leur
création. Ils ne voulaient qu'analyser «le comportement du personnage historique: ambitieux, passionné, cruel, qui a utilisé tous les moyens, rationnels et irrationnels, secrets et ouverts, sentimentaux et diaboliques, pour obtenir un pouvoir personnel illimité». (http://cinematext.ru/movie/tehnika-i-ritual-la-tecnica-e-il-rito-1972/ )
Références
1. Borgnet G. Attila et le monde des Huns dans le film «Die Nibelungen» de Fritz Lang II Attila dans la réalité historique, la littérature et les beaux-arts, Actes du Colloque de Saint-Riquier (Décembre 2002). - Université de Picardie -Jules Vernes, Amiens, 2003 (Médiévales 29), p. 15-23.
2. Lesaffre M. Le personnage d'Etzel du Nibelungenlied II Attila dans la réalité historique, la littérature et les beaux-arts, Actes du Colloque de Saint-Riquier (Décembre 2002). - Université de Picardie -Jules Vernes, Amiens, 2003 (Médiévales 29), p. 43-53.
3. Gibbon E. Histoire du déclin et de la chute de l'Empire romain. - Robert Laffont, 1983.