Научная статья на тему 'Le role du juge dans la definition du droit penal'

Le role du juge dans la definition du droit penal Текст научной статьи по специальности «Языкознание и литературоведение»

CC BY
241
16
i Надоели баннеры? Вы всегда можете отключить рекламу.
Ключевые слова
CONSTITUTIONAL COURT / CRIMINAL CODE / PRACTICE / CHANGES / ABROGATION / PARLIAMENT / ROMANIA

Аннотация научной статьи по языкознанию и литературоведению, автор научной работы — Tanasescu Simina

Practice and approaches of the Constitutional Court of Romania towards criminal and criminal procedural legislation modification are reviewed. The author estimates rule-making efforts of the Court and influence on practice of courts and legislation. Romanian legislators and courts activity in criminal legal regulations making and realization is critically characterized.

i Надоели баннеры? Вы всегда можете отключить рекламу.
iНе можете найти то, что вам нужно? Попробуйте сервис подбора литературы.
i Надоели баннеры? Вы всегда можете отключить рекламу.

Текст научной работы на тему «Le role du juge dans la definition du droit penal»

S. Tanasescu*

LE ROLE DU JUGE DANS LA DEFINITION DU DROIT PENAL

Practice and approaches of the Constitutional Court of Romania towards criminal and criminal procedural legislation modification are reviewed. The author estimates rule-making efforts of the Court and influence on practice of courts and legislation. Romanian legislators and courts activity in criminal legal regulations making and realization is critically characterized.

Key words: Constitutional Court, Criminal Code, practice, changes, abrogation, parliament, Romania

En Roumanie la Constitution de 1991 a marqué au niveau juridique la rupture par rapport au passé communiste de l'Etat et son échafaudage institutionnel et politique. Une nouvelle hiérarchie de valeurs était consacrée par la nouvelle loi fondamentale et cela réclamait des instruments juridiques appropriés. La répression pénale, nécessaire dans tout Etat mais renouvelée en tant que buts, fonctions, formes et instruments, se devait d'être découplée de son précédent encrage idéologique et fondée entièrement sur des principes modernes, respectueux à la fois des objectifs propres à la loi pénale (prévention des crimes et réparation des dommages) et de la nouvelle religion in statu nascendi — la protection des droits humains. Dans cet esprit, la loi fondamentale adoptée par référendum le 8 décembre 1991 contenait — d'une manière symbolique dans le titre consacré aux droits fondamentaux — des principes généraux de droit pénal (la légalité des infractions et des peines ou la présomption d'innocence), et quelques dispositions de détail, plutôt de nature procédurale (sur la responsabilité pénale des dignitaires ou les garanties adaptées au régime juridique de quelques droits fondamentaux). La révision constitutionnelle de 2003 n'a rien changé à ce tableau général; elle s'est limitée à simplement aller plus loin dans le niveau de détail de certaines dispositions constitutionnelles.

Ainsi, les dispositions constitutionnelles de nature générale qui concernent le droit pénal se réfèrent au principe de la loi plus favorable1, la présomption d'innocence, et le principe de la légalité2, autant des règles juridiques fondamentales et structurantes pour la matière pénale, issues de la philosophie humaniste et moderniste née pendant le «siècle des lumières». L'avancée perçue comme considérable dans ce domaine n'était pas tant le contenu de ces principes, connu pendant le régime communiste aussi et consacré dans le Code pénal de l'époque, mais plutôt leur codification au niveau constitutionnel, fait qui témoignait de la volonté de faire respecter les règles juridiques de base, élémentaires pour tout Etat digne du qualificatif «Etat de droit» dont la Roumanie s'était targué dans le premier article de sa Constitution. Toujours au titre de dispositions générales on doit inclure la précision de l'article 23 paragraphe 13 de la Constitution selon laquelle «La sanction privative de liberté ne peut être que de nature pénale», importante garantie de la liberté individuelle rajoutée après la révision de 2003, qui a codifié une réalité estimé nécessaire pour la sécurité et la prévisibilité juridique. En effet, si dans le passé communiste les sanctions administratives pouvaient avoir aussi des conséquences au niveau de la liberté (prison contraventionnelle), suite au changement du système politique, uniquement la matière pénale est susceptible d'interférer avec la liberté personnelle de l'individu en raison de sa fonction de protection des valeurs essentielles pour la communauté. Pour notre part on estime que la disposition de l'article 53 de la Constitution, sur la restriction de l'exercice de certains droits fondamentaux, est aussi susceptible à être inclue dans la catégorie des dispositions constitutionnelles de

* Tanasescu Simina — Professeur Faculté de droit, Université de Bucarest, Ancien membre du Conseil Supérieur de la Magistrature (Bucarest, Romania). E-mail: [email protected].

nature pénale générale, dans la mesure où elle vise la possibilité de restreindre les droits fondamentaux pour «le déroulement de l'instruction pénale», ce qui est communément considéré par la doctrine de droit pénal comme la légitimation constitutionnelle de toute une série de mesures spécifiques à la poursuite pénale, entre autres la détention provisoire.

Toutes ces dispositions constitutionnelles représentent des garanties pour les droits fondamentaux et, en même temps, en tant que principes généraux pour la conduite de l'Etat en matière pénale, des limites pour le législateur pénal. A elles se rajoute une autre, qui fixe expressément les contours de la compétence législative en matière pénale: article 73, qui établit les catégories de lois qui peuvent être adoptées par le Parlement, précise que seulement le législateur organique est compétent en matière «d'infractions, peines et leur régime d'exécution».

Ce cadre général est complété par quelques dispositions de nature pénale de détail, qui peuvent être regroupées dans deux catégories: garanties spécifiques pour les droits fondamentaux et responsabilité pénale des hautes autorités étatiques.

Une seule disposition constitutionnelle concernant le domaine du droit pénal ne peut pas être rangée dans cette classification, mais elle fait partie des standards juridiques traditionnels dans tous les Etats, qui remontent avant même l'apparition de la théorie de la séparation des pouvoirs, à savoir la prérogative du chef de l'Etat d'accorder la grâce3.

Dans la catégorie des garanties spécifiques pour les droits fondamentaux mention à part doit être faite de l'article 22 qui interdit formellement la peine de mort. Une des plus importantes garanties du droit à la vie reçoit consécration constitutionnelle en Roumanie en tant que signe de la plus rigoureuse protection juridique possible de la valeur fondamentale que représente la vie humaine. Le fait que seulement l'effet vertical du droit à la vie a reçu rang constitutionnel, alors que l'effet horizontal reste au niveau du Code pénal témoigne d'une volonté de changement de la part de l'Etat roumain; néanmoins cela reste une disposition de détail dans la mesure où elle concerne un seul droit fondamental et ne représente pas un standard juridique de portée universelle, bien que la valeur protégée (la vie humaine) en soit une suprême. Toute une série de dispositions de procédure pénale sont consacrées en tant que garanties pour la liberté individuelle4 et l'inviolabilité du domicile5. Même si le texte constitutionnel concernant le droit à la défense (article 24 de la Constitution) ne fait pas référence expresse à la matière pénale, la doctrine et la pratique reconnaissent que sa portée joue notamment dans ce domaine, toujours en comparaison avec la période pré-constitutionnelle. Ainsi, les parties on droit à l'assistance d'un avocat, de leur choix ou commis d'office, pendant toute la durée du procès (corroboré avec le paragraphe 8 de l'article 23), et non pas seulement pendant la phase judiciaire du procès pénal comme cela était le cas auparavant. Finalement, malgré son langage archaïque, qui renvoie à la tradition juridique d'entre les deux guerres mondiales6, l'article 30 de la Constitution — qui porte sur la liberté d'expression — consacre une limitation pour les ingérences tolérées dans cette matière: seulement le législateur peut intervenir pour établir les infractions dans le domaine de la presse. Corroboré avec la disposition de l'article 73 de la Constitution, cette limite vise le législateur organique.

Dans la deuxième catégorie, des dispositions qui concernent le régime juridique de la responsabilité pénale de certains dignitaires publics, on peut ranger l'immunité parlementaire7 et celle présidentielle8 qui la copie, ainsi que la responsabilité pénale du Président9 et celle des membres du Gouvernement10. Si les règles concernant l'immunité parlementaire ont trouvées application plusieurs fois depuis l'adoption de la Constitution, des fois assorties des explications de la part de la Cour Constitutionnelle (décision n°63/199711), celle concernant l'immunité et la mise en accusation du Président n'ont pas encore été mise en application. En effet, le Président de la Roumanie a été suspendu en 200712 sur la base de sa responsabilité politique (méconnaissance grave de la Constitution au sens de l'article 95) et non pas juridique (haute trahison au sens de l'article 96 de la Constitution, car l'infraction n'est pas définie

dans le Code pénal). Quant à la responsabilité pénale des membres du Gouvernement, la loi d'application (loi n°115/1999 sur la responsabilité ministérielle) à laquelle renvoie l'article constitutionnel est aujourd'hui le texte ressuscité de la même loi d'entre les deux guerres mondiales13; son texte a été modifié maintes fois et soumis assez souvent au contrôle de la Cour Constitutionnelle, si bien qu'en ce moment elle est pratiquement inapplicable14. Ainsi, par la décision n°93/1999 le juge constitutionnel a trouvé que la loi n°115/1999 était constitutionnelle par le biais d'un contrôle a priori, mais, par la suite, toute une série de décisions rendues sur la base du contrôle a posteriori ont déclaré inconstitutionnelles une grande partie des dispositions de la loi: par la décision n°665/2007 la Cour a trouvé que la loi doit être appliquée aussi aux anciens ministres contrairement à ses dispositions expresses dans le sens contraire, par la décision n°1133/2007 la Cour a constaté que la commission spéciale prévue par la loi afin de déclencher la procédure pénale contre les ministres était inconstitutionnelle, par la décision n°472/2008 la Cour a annulé le projet de loi qui voulait corriger la composition et la procédure de la commission mentionnée plus haut, alors que par les décisions n°989/2008 et n°990/2008 le juge constitutionnel a déclaré que la demande de lever l'immunité parlementaire d'un MP qui est aussi ministre doit être faite avec une majorité de deux tiers des membres de la Chambre.

Le changement fondamental accompli par la nouvelle constitution n'a pas été suivi immédiatement et dans toutes les matières par le nécessaire ajustement au niveau de la législation d'application; notamment en matière pénale le Code pénal et le Code de procédure pénale, adoptés tous les deux en 1968, sont restés en vigueur après l'arrivée de la nouvelle Constitution, inchangés jusqu'en 1997, mais révisés plusieurs fois depuis (et récemment remplacés par des nouveaux codes, adoptés en 2010 mais pas encore entrés en vigueur). Une telle situation ne pouvait pas perdurer, et l'assainissement de la législation pénale a commencé assez rapidement après la création de la Cour Constitutionnelle. Dans la confrontation entre le système de valeurs consacré par la Constitution et celui propre à une législation pénale pre-constitutionnelle les affrontements ont été nombreux et difficiles, soldés, en règle générale, avec le constat par le juge constitutionnel de l'abrogation implicite des normes pénales contraires à la loi fondamentale. (A) En égale mesure, le législateur pénal post-constitutionnel s'est vu confronté au filtre des règles fondamentales, mais sa marge de manœuvre a été mieux préservée par un juge constitutionnel conscient que la matière pénale constitue l'apanage exclusif du législateur organique. (B) Le facteur moins pris en compte a été le juge judiciaire, appelé à appliquer une législation pénale structurée selon une hiérarchie de valeurs différente par rapport à celle consacrée par la Constitution, mais avec laquelle il était plus familier, et qui, quelquefois, a réussi faire perdurer l'ancien esprit du droit pénal pre-constitutionnel. (C)

A. La survie du droit pénal pre-constitutionnel est le résultat du filtrage opéré par le juge constitutionnel

Nombreuses ont été les dispositions du Code pénal roumain de 1968 lesquelles, confrontées à la Constitution adoptée en 1991, ont dû céder le pas, mais on a préféré se concentrer sur deux situations-type, illustratives pour notre propos, à savoir la protection pénale du droit de propriété et le régime juridique de la détention provisoire. Dans les deux cas, les procureurs et les tribunaux ont manifesté des réticences à confronter la loi pénale à la Constitution, invoquant le principe de la plus stricte légalité qui s'impose en matière pénale avec un formalisme zélé, et feignant la crainte de se transformer en législateur s'ils devaient tirer les conséquences de l'inconstitutionnalité de certaines dispositions pénales pre-constitutionnelles. Tout en soulignant le rôle important qui revient aux organes d'application de la loi pénale, qui doivent tenir compte non seulement du formalisme juridique dans sa forme pure, mais aussi de la finalité de la loi pénale par rapport à la protection de tout un

système de valeurs, la Cour Constitutionnelle s'est employée à filtrer la loi pénale, n'hésitant pas, dans le passage, à reconfigurer son contenu.

a) Protection pénale de la propriété privée

Le Code pénal roumain a été adopté sous le régime de la Constitution de 1965, qui consacrait trois formes de propriété: la propriété socialiste, la propriété individuelle (qui appartenait aux paysans non coopérativisés dû aux conditions objectives liées à la position de leurs terres, et aux artisans qui avaient encore la propriété de leurs ateliers), et la propriété personnelle (qui comptait les biens personnels considérés comme «strictement nécessaires»). La summa divisio se faisait donc entre la propriété socialiste et celle personnelle, la propriété individuelle étant considérée comme résiduelle et vouée à la disparition. Selon cette logique, la protection pénale du droit de propriété était échelonnée sur deux degrés: répression plus sévère pour les agissements qui touchaient à la propriété socialiste et répression moins stricte pour ceux qui touchaient à la propriété personnelle. Toutefois, le Code pénal utilisait les notions d'infractions «contre les biens communs» et «contre les biens personnels», où la notion de «biens communs» était définie dans la partie générale du Code: «Par le terme 'commun' il est compris tout ce qui intéresse les organisations de l'Etat, les organisations de masse ou toute autre organisation qui déploie une activité utile de point de vue social et qui fonctionne conformément à la loi». Pour les infractions concernant lesdits «biens communs» les peines infligées étaient plus grandes que pour les infractions contre la propriété personnelle. Le critère de différenciation était donc le titulaire du droit de propriété.

La Constitution de 1991 opère avec une autre dichotomie, propriété publique et propriété privée, où la distinction est faite non pas selon le critère du titulaire, mais de la forme de propriété visée. La notion de «biens communs» est restée donc sans contenu, et une assimilation juridique entre l'ancienne propriété socialiste et la propriété publique n'était guerre possible, tout comme toute similitude entre la propriété personnelle et celle privée n'était pas imaginable. Par conséquent, les dispositions du Code pénal qui garantissait la propriété n'étaient plus applicables, alors qu'une protection pénale efficace pour les formes de propriété consacrées par la Constitution de 1991 n'était pas encore mise en place.

Au début des années '90 les tribunaux ont été confrontés à la délicate situation de ne pas savoir comment protéger pénalement la propriété et, dans le doute, ils ont continué à appliquer les dispositions du Code pénal15, en faisant la différence entre la protection pénale de la propriété privée de l'Etat16 et la protection pénale de la propriété privée des personnes physiques ou morales, malgré la prescription explicite de l'ancien article 41 alinéa 2 de la Constitution qui impose une protection égale de la propriété privée, sans distinction selon son titulaire. Dans une décision de principe n°1/1992, le Plénum de la Cour Constitutionnelle a fait savoir que la Constitution abroge implicitement toute disposition de la législation pre-constitutionnelle qui lui serait contraire, et cela même en matière pénale, où, pourtant, le principe de la légalité des infractions et des peines est de rigueur (et était invoqué par les tribunaux justement en faveur de leur jurisprudence contraire à la Constitution). En effet, la question plus générale de la possible abrogation implicite de la législation pre-constitutionnelle se trouvait dans ce cas-ci compliquée avec la spécificité de la matière pénale, à savoir le principe très stricte de la légalité des infractions et des peines.

En d'autres mots, les tribunaux faisaient savoir que si les dispositions pertinentes du Code pénal devraient être considérées comme abrogées implicitement17, il y aurait eu un vide législatif en matière pénale, ce qui leur semblait injuste, alors que si les dispositions du Code pénal étaient inconstitutionnelles mais applicables du fait qu'elles n'étaient pas encore abrogées expressément par le législateur, le juge n'avait pas d'autre choix que de les appliquer, faute de quoi il aurait pris des allures de législateur. Les juges estimaient invraisemblable qu'ils puissent agir en tant que législateur, de surplus en matière pénale, d'autant plus que le système politique avait changé et que le principe de légalité était

devenu une valeur en soi, alors que la légalité en matière pénale était de rigueur et avait été respectée même pendant le système communiste. La confrontation entre les usus judiciaires et les valeurs de la nouvelle Constitution se heurtait dans ce cas précis à la spécificité de la matière pénale, où le formalisme juridique semblait avoir été respecté même sous le régime communiste, et avait laissé des traces indélébiles sur la pratique judiciaire.

La Cour Constitutionnelle soutenait que la spécificité de la matière pénale ne pouvait pas dépasser l'importance de la réglementation constitutionnelle d'autant plus que respecter ad litteram le principe de la légalité des infractions et des peines amenait à des solutions concrètes contraires aussi bien à la lettre comme (et surtout) à l'esprit de la Constitution. Sans s'ériger en législateur, et sans demander aux juges eux-mêmes d'en faire autant, la Cour Constitutionnelle a fait savoir qu'une simple interprétation et adaptation des dispositions pertinentes du Code pénal à la nouvelle réalité, consacrée au plus haut niveau par le texte même de la loi fondamentale, aurait suffit pour résoudre le dilemme artificiellement posé par les juges.

Pour trancher, la Cour Constitutionnelle a constaté l'abrogation implicite de l'article qui obligeait à une protection pénale renforcée des «biens communs» pour autant que cette protection vise la propriété privée. En revanche, même si le juge constitutionnel ne l'a pas dit expressément, cette protection pénale renforcée a été considérée comme valide par rapport à la propriété publique. Une interprétation qui, pour approximative qu'elle était, suffisait pour atteindre le but de la constitutionnalité sans attribuer des compétences de législateur ni aux tribunaux, ni au juge constitutionnel. Par la suite, plus de 36 décisions de la Cour Constitutionnelle se sont efforcées d'imposer cette vision des choses: la protection pénale renforcée de la propriété privée de l'Etat par rapport à celle d'autres propriétaires privés est inconstitutionnelle; la répression pénale aggravée peut être appliquée seulement pour la propriété publique alors que les biens propriété privée de l'Etat sont protégés de point de vue pénal de la même manière que tout autre bien propriété privée. Pour justifier ce choix la juridiction constitutionnelle avait expliqué qu'il s'agit seulement d'interpréter la portée de l'article du Code pénal, et non pas de légiférer, bien qu'en réalité, délimiter la sphère de la protection pénale revient à définir la matière pénale. Suite à cette brèche, toute une série d'autres dispositions du Code pénal relatives à la notion de «biens communs» ont été déclarées implicitement et partiellement abrogées. Finalement, en 1997, le législateur organique est intervenu et, par une modification du Code pénal, a entériné la solution suggérée par la juridiction constitutionnelle en matière de protection pénale du droit de propriété.

b) Régime juridique de la détention provisoire

Dans sa version initiale, l'alinéa 4 de l'article 23 de la Constitution disposait: «La détention provisoire se fait en vertu d'un mandat émis par un magistrat, pour une durée de maximum trente jours. La personne arrêtée peut porter plainte au sujet de la légalité du mandat devant le juge, qui est obligé de se prononcer par un arrêt motivé. Seul le tribunal peut décider de la prolongation de l'arrestation». Le niveau détaillé de la disposition constitutionnelle était justifié dans la doctrine18 par la nécessité d'assurer les meilleures garanties possibles à la liberté individuelle, dans un effort d'harmonisation de la législation pénale roumaine avec les exigences des documents internationaux en la matière. En effet, beaucoup d'encre avait coulé au sujet de savoir si la durée de maximum 30 jours de la détention provisoire vise seulement le premier mandat émis, ou se réfère aussi aux décisions qui peuvent être prises suite au contrôle judiciaire prévu par la disposition constitutionnelle. Egalement, la pratique semblait hésitante sur le point de savoir si cette durée maximale doit être comptée à partir du moment où le procureur a émis le mandat ou à partir du moment où il a été saisi du dossier de l'affaire ou, encore, à partir du moment où le procureur en a saisit le tribunal de l'affaire. Des incertitudes ont plané aussi sur le point de savoir si le procureur peut émettre un mandat de détention provisoire, ou s'il est nécessaire, dans tous

les cas, un contrôle judiciaire sur une telle décision. La doctrine de droit constitutionnel avait conclu que la disposition constitutionnelle souhaitait assurer la plus large protection possible à la personne soumise à un mandat de détention provisoire, et, par conséquence, l'interprétation du texte et de l'esprit de la Constitution allait dans le sens que la durée du mandat et l'autorité compétente de l'émettre devaient être plutôt limitées19. Malgré cela, une partie non-négligeable de la pratique a continué d'appliquer le Code de procédure pénale sous prétexte qu'il n'a pas été formellement modifié par le législateur.

En effet, Le Code de procédure pénale, conçu sous d'autres auspices, permettait que la mesure de la détention provisoire prise pendant la phase de la poursuite pénale soit continuée, ininterrompue, tout au long du procès pénal et même jusqu'à la solution définitive de l'affaire par le juge. En d'autres mots, le Code de procédure pénale contredisait d'une manière flagrante la loi fondamentale.

Confrontée à ce problème déjà en 1994 (décision n°60/1994), la Cour Constitutionnelle avait constaté l'abrogation partielle et implicite de la disposition pertinente du Code de procédure pénale. Le succès presque inespéré de ce premier essai, ainsi qu'une contre-réaction assez forte de la part du Ministère Public qui a continué d'appliquer les dispositions du Code de procédure pénale, ont fait en sorte qu'une longue série de décisions a suivi. Suite à une première modification du Code de procédure pénale en 1997, la détention provisoire a été réglementée différemment : la mesure prise pendant la phase de la poursuite pénale pouvait être maintenue jusqu'à l'initiation de la phase judiciaire du procès pénal, alors que pendant la phase judiciaire le contrôle du juge était présent de toute manière. Dans une autre décision, n°546/1997, la Cour Constitutionnelle avait déclaré cette solution législative toujours contraire à la Constitution, mais le législateur n'a réagit qu'en 2003 (par l'Ordonnance d'urgence n°109/2003 pour la modification du Code pénal et du Code de procédure pénale), lorsqu'il a enfin simplement repris la disposition constitutionnelle dans le Code de procédure pénale.

Ces deux exemples, choisis parmi plusieurs, restent emblématiques pour l'attitude proactive adoptée par le juge constitutionnel, qui a obligé le législateur et le système judiciaire se confronter non seulement à la nouvelle hiérarchie de valeurs consacrée par la loi fondamentale, mais aussi aux instruments qui étaient disponibles pour la faire régner. Dans ce contexte il est intéressant d'observer que la matière pénale a présenté la particularité du tout-puissant principe de légalité, pris dans le sens le plus formel possible, jusqu'à sa transformation dans un obstacle plutôt qu'un appui pour la construction de l'Etat de droit. Cela a empêché la mise en valeur des principes généraux de droit pénal pourtant codifiés dans la nouvelle Constitution précisément afin de garantir une meilleure sécurité juridiques et une prévisibilité accrue pour les conduites humaines. Par rapport à la législation pre-constitutionnelle, si la lenteur du législateur était quelque peu prévisible, car la transition politique et économique, doublée par les divers processus d'adhésion aux institutions européennes (Conseil de l'Europe ou Union Européenne) constituaient autant de sources de pression, le rôle conservateur joué constamment par le système judiciaire est plus difficilement explicable. Néanmoins cette réalité objective peut être constatée aussi par rapport à la législation post-constitutionnelle, bien que le rôle principal dans la définition de la matière pénale revienne au législateur.

B. La définition du droit pénal post-constitutionnel relève de la compétence discrétionnaire du législateur organique

La Constitution roumaine prévoit non seulement le principe de la légalité en matière de définition des infractions et des peines, mais précise aussi que cette tache incombe au législateur organique et non pas à celui ordinaire. La différence, imposée pour la première fois en Roumanie par la Constitution de 1991, entre les lois organiques et les lois ordinaires semble désormais acquise, bien qu'elle soit beaucoup moins claire qu'il ne parait à première

vue. En effet, l'article 73 de la Constitution révisée énumère certains domaines dans lesquels le constituant exige qu'une majorité absolue soit réunie lors de toute intervention parlementaire. A contrario, dans tous les autres domaines la majorité simple est suffisante pour légiférer. Mais tout le problème est là: d'un côté, la liste de l'article 73 n'est pas exhaustive, et il existe d'autres articles de la Constitution qui obligent le législateur de recourir à la loi organique, et de l'autre côté la Constitution reste silencieuse sur le point de savoir comment légiférer au cas où une seule loi mélange des dispositions de rang organique et ordinaire. En pratique, nombreuses ont été les situations où, parce qu'une loi contenait une infraction, elle a été adoptée en tant que loi organique malgré le fait que son domaine de réglementation relevait de la loi ordinaire (par ex. loi sur la protection de l'environnement ou loi sur le statut juridique des fonctionnaires publics, etc.). Par ce biais, la législation pénale spéciale a connu un essor inattendu pendant les derniers 20 ans, alors qu'à l'origine la disposition de l'article 73 de la Constitution était vouée à limiter l'appétit du législateur pénal par l'exigence d'une majorité accrue nécessaire pour pénaliser des conduites humaines.

En outre, la distinction entre les lois organiques et celles ordinaires était censée avoir une autre conséquence aussi: la délégation législative était prévue expressément par la version initiale de la loi fondamentale seulement dans le domaine de la loi ordinaire; de là à en conclure que la Constitution avait interdit la délégation législative dans le domaine de la loi organique il n'était qu'un pas. Pourtant, le juge constitutionnel n'a pas saisi cette occasion et, pendant la deuxième moitié des années '90, la délégation législative a réussi dépasser la production normative parlementaire. En effet, la Constitution avait prévu deux types de délégation législative, les ordonnances simples, résultat d'une loi d'habilitation, et les ordonnances d'urgence, qui nécessitaient seulement une approbation ultérieure du Parlement. Très rapidement les ordonnances d'urgence ont pris le devant en tant qu'instrument normatif. Ce phénomène s'est fait ressentir en matière pénale aussi, où les changements et adaptations les plus significatives du Code pénal ou du Code de procédure pénale ont été accomplis par des ordonnances d'urgence du Gouvernement (par ex. l'Ordonnance d'urgence n°109/2003 précitée).

De l'autre côté, le juge constitutionnel a été particulièrement respectueux de la marge discrétionnaire du législateur en matière pénale: «il est évident que le régime des peines constitue un problème de politique pénale que le législateur est le seul en mesure de résoudre selon les circonstances de chaque instant de la criminalité» (décision n°25/1999) ou «la liberté de réglementation dont dispose le Parlement vise la réglementation de la responsabilité pénale pour les agissements antisociaux qui touchent les valeurs prévues par la Constitution» (décision n°62/2007) ou encore «c'est au Parlement qu'il revient d'établir les infractions et leurs peines respectives, ainsi que les causes d'irresponsabilité» (décision n°140/2008) et encore «la réglementation de l'infraction de destruction qualifiée représente une option de politique pénale qui relève de la compétence exclusive du législateur» (décision n°176/2010).

Très rarement le juge constitutionnel s'est estimé compétent de véritablement censurer les choix opérées par le législateur en matière pénale, mais ces expérimentes n'ont pas toujours été couronnés de succès; bien au contraire, des décisions mitigées de la Cour Constitutionnelle ont été vivement contestées par la doctrine et la pratique, et ont produits des effets contraires à ceux souhaités, alors que la réaction du législateur ne s'est pas fait attendre et n'a jamais suivi la voie indiquée par le juge constitutionnel. L'exemple le plus il-lustratif reste à ce jour les infractions de diffamation et insulte (ex-articles 205-206 du Code pénal roumain), à l'origine incriminées par le Code pénal en tant que garanties de la dignité humaine, et des-incriminées par le législateur post-constitutionnel20 en tant que réaction au nombre croissant de condamnations que la Roumanie a subi devant la Cour Européenne des Droits de l'Homme pour la trop fréquente incarcération des journalistes sur cette base21.

Dans un effort de conserver dans le système normatif juridiquement valide ces garanties de la dignité humaine, la Cour Constitutionnelle avait constaté que leur abrogation était inconstitutionnelle (au vue de l'article 1 de la Constitution, qui déclare la dignité humaine en tant que valeur suprême de l'Etat de droit, démocratique et sociale que se veut la Roumanie contemporaine), et que, de ce fait, les infractions de diffamation et insulte étaient toujours en vigueur. (décision n°62/2007) Mise à part les interrogations de la doctrine sur les limites de la compétence de la Cour Constitutionnelle elle-même21, cette décision a eu le douteux effet d'augmenter l'insécurité juridique et l'imprévisibilité de la jurisprudence de droit commun en la matière, car une partie des tribunaux ont pris la décision de la juridiction constitutionnelle pour le nouveau Code pénal et ont continué de condamner pour diffamation et insulte, alors que d'autres ont préféré attendre une intervention du Parlement et se sont désistés de toutes les affaires de diffamation et insulte. Finalement, lorsque le nouveau Code pénal a été adopté22, l'insulte et la diffamation n'y figurent plus.

Cet exemple montre à quel point le législateur est souverain dans la définition de la matière pénale, et ce malgré des limites explicites tracées par la Constitution et même contre les explications plus que rationnelles fournies par le juge constitutionnel. Dans sa décision n°62/2007 la Cour Constitutionnelle avait bien souligné: «selon l'article 1 alinéa 5 de la loi fondamentale, le respect de la Constitution et de sa suprématie est obligatoire, d'où il résulte que le Parlement ne peut pas exercer sa compétence d'incriminer et de desincriminer des faits antisociaux sans respecter les normes et les principes consacrés par la Constitution. Par exemple, le Parlement ne pourrait pas, sans méconnaitre la Constitution, définir comme infractions des faits qui comporteraient des éléments de discrimination prévus par l'article 4 alinéa 2 de la Constitution. De la même manière le Parlement ne pourrait pas éliminer la protection pénale des valeurs qui ont rang constitutionnel, tel le droit à la vie, la liberté individuelle, le droit de propriété ou, comme dans ce cas-ci, la dignité humaine. La liberté de réglementation dont dispose le Parlement dans ces cas est exercée par la réglementation des conditions spécifiques à la responsabilité pénale pour les faits antisociaux qui touchent les valeurs prévue et garanties par la Constitution». Cette belle plaidoirie pour le respect du partage des compétences entre le constituant et le législateur dans le domaine de la définition de la matière pénale, ainsi que pour le respect des fonctions assignées au droit pénal dans tout système normatif n'ont pas eu d'écho. Le législateur a simplement ignoré la valeur ultime sur laquelle repose la construction constitutionnelle roumaine et a rayé la protection pénale de la dignité humaine. Désormais, sa protection juridique relève uniquement de la jurisprudence en responsabilité extra-contractuelle.

C. Le rôle du juge judiciaire dans la définition du droit pénal

Mais le législateur n'est pas le seul à jouir d'une très large marge de manœuvre dans ce domaine. Bien que dépourvu de toute compétence formelle dans la définition du droit pénal, et malgré une attitude extrêmement respectueuse de la légalité la plus formelle, en réalité le rôle du système judiciaire en matière pénale reste important. Pendant les années qui ont suivi l'adoption de la Constitution de 1991, et même après sa révision en 2003, le système judiciaire a été confronté à un environnement juridique assez complexe: une législation pénale dynamique mais dont la principale source (code pénal & code de procédure pénale) n'a pas changé de philosophie, assortie d'une consolidation constante et sans précédent de son indépendance fonctionnelle, budgétaire et organisationnelle en complément des nombreux changements institutionnels lesquels avaient pour but l'unification de la jurisprudence (mais qui ont fini plutôt dans le contraire). Le rôle du juge judiciaire dans la définition du droit pénal se fait ressentir autant sur le plan de l'interprétation et application de la loi (a), que sur celui de la mise en œuvre des sanctions (b), mais dans les deux domaines son influence a été loin d'être un facteur de progrès.

a) Interprétation et unification de la jurisprudence

En effet, le recours dans l'intérêt de la loi, introduit dans la compétence des Sections Réunies de la Haute Cour de Justice et de Cassation par la loi n°304/2004 portant sur l'organisation judiciaire, représente le principal instrument dont dispose le système judiciaire pour assurer l'interprétation et l'application unitaire de la loi. Cette voie de recours est à la disposition des collèges de direction des Cours d'appel ou du Procureur Général de la République, qui peuvent saisir la Haute Cour de Justice au cas où une même question de droit serait traitée dans des manières différentes par les tribunaux du pays. Il s'agit donc d'une voie extraordinaire de recours qui permet non pas de résoudre des problèmes concrets (la solution rendue par la Haute Court n'est pas applicable dans les affaires qui ont conduit à l'emploi de cette procédure), mais d'assurer que le système normatif valide est uniformément interprété et appliqué sur l'ensemble du territoire (la solution rendue par la Haute Cour est obligatoire pour tous les tribunaux dans la solution de cette même question de droit dans le futur). La doctrine discute toujours de la valeur de source de droit de telles décisions de justice23. Cette discussion doctrinaire n'est pas complètement dépourvue d'intérêt, notamment en matière pénale, et un parmi les exemples les plus illustratifs concerne une confrontation directe entre la Cour Constitutionnelle et la Haute Cour de Justice, mais dont l'origine reste le législateur.

Ainsi, par la décision n°486/1997 la Cour Constitutionnelle a constaté que les dispositions de l'art.278 Code procédure pénale (résolution de ne pas commencer la poursuite pénale prise par le procureur) sont constitutionnelles seulement dans la mesure où elles n'arrêtent pas toute personne qui serait mécontente de cette solution adoptée par le procureur de s'adresser à la justice. Le Ministère Public dans son ensemble avait difficilement encaissé cette nouvelle forme de contrôle judiciaire sur son activité, d'autant plus qu'elle n'était pas prévue par la législation pénale d'origine communiste; en effet, la Constitution de 1965 faisait de la «procurature» la quatrième branche du pouvoir étatique, chargée de «veiller au respect de la légalité socialiste». Les conséquences institutionnelles d'une telle configuration fonctionnelle se retrouvaient dans la législation pénale, qui assurait une large marge de manœuvre aux procureurs, sans aucun contrôle judiciaire sur la plupart des activités déployées dans la phase de la poursuite pénale. Paradoxalement, c'est avec l'aide du pouvoir judiciaire que le Parquet allait s'en sortir de cette situation, même si au passage le système judiciaire a dû balayer aussi bien le législateur comme le juge constitutionnel.

La loi n°281/2003 a modifié le Code de procédure pénale et a introduit un nouvel article 2781, lequel permet d'introduire une action en justice à toute personne concernée par une telle résolution prise par un procureur, et fixe la compétence du tribunal à trancher le litige. Entre autres, l'article 2781 alinéa 8 lettre c) du Code de procédure pénale précise que:

«Le tribunal prononce une des solutions suivantes:.

c) admet la plainte par une décision interlocutoire, casse la résolution ou l'ordonnance attaquée et, lorsque les preuves existantes au dossier sont suffisantes pour trancher le litige, retient l'affaire pour la juger, les dispositions concernant le jugement en première instance et les voies de recours étant appliquées d'une manière appropriée».

Par la décision n°73/2005 le juge constitutionnel a constaté que la nouvelle disposition du Code de procédure pénale était constitutionnelle. En fait, une personne physique avait soutenu que ces dispositions obligent le juge du tribunal à méconnaitre les règles du procès équitable dans la mesure où ils l'obligent à exprimer son opinion avant dire droit dans une affaire, par le fait que la décision interlocutoire qu'il doit prononcer pour admettre en principe la plainte laisse entendre la solution de condamnation qu'il est par la suite presqu'obligé de prononcer. Il est donc impossible de soutenir qu'un tel magistrat rempli les conditions d'impartialité requises pour rendre justice d'une manière équitable, selon les exigences de l'article 6 de la CEDH, car «le parquet doit soutenir l'action pénale, et le tribunal n'est pas en mesure de se substituer au parquet en tant que titulaire de l'action pénale dans

le cadre de telles affaires parce que le tribunal doit rester impartial, un facteur d'équilibre aussi bien pour le respect des droits de la société, représentée par le procureur, tout comme de l'inculpé». La Cour Constitutionnelle a rejeté cette exception d'inconstitutionnalité car, lorsqu'il décide sur de telles plaintes, le tribunal ne tranche pas le litige sur le fond, mais analyse seulement la légalité et le bien fondé des solutions prononcées par le procureur sur la base des preuves administrées pendant la poursuite pénale et des éventuelles preuves présentées par les parties afin de soutenir leur plainte. Pour trancher le fond du litige les règles de procédure concernant le jugement en première instance et les voies de recours doivent être appliquées d'une manière appropriée. Par conséquent, l'impartialité de la justice n'est pas méconnue non plus, car une fois que le tribunal a été investi par la plainte qu'il a jugée admissible, c'est toujours le procureur qui va soutenir l'action pénale, et dans le cadre du procès sur le fond de l'affaire, il peut demander soit l'acquittement soit la condamnation de l'inculpé. Donc le jugement qui tranche sur la plainte a un autre objet que le jugement sur le fond de l'affaire et il ne peut pas y avoir substitution du Ministère Public par le tribunal saisi de la plainte.

Dans la doctrine il y a eu des nombreuses discussions sur le point de savoir si une dichotomie si nette peut exister entre le jugement sur l'admissibilité de la plainte et le jugement sur le fond de l'affaire pénale. En réalité, lorsque le tribunal qui tranche sur la plainte contre la résolution du procureur décide qu'elle est bien fondée, il est obligé déclencher l'action pénale lui-même, ce qui n'arrive que très exceptionnellement dans le système juridique roumain. Le détail qui fait que les tribunaux n'ont pas l'habitude de déclencher l'action pénale, car ils n'en ont pas les moyens d'effectuer la poursuite pénale nécessaire dans une telle hypothèse, n'avait pas été pris en compte ni par le législateur, ni par le juge constitutionnel. La conséquence directe a été une avalanche des contestations de la constitutionnalité de l'article 2781 alinéa 8 lettre c) du Code de procédure pénale.

Dans la pratique, certains tribunaux ont estimé que le juge qui a tranché le litige portant sur la plainte est incompatible pour juger aussi le fond de l'affaire, alors que d'autres ont estimé qu'il ne l'est pas. Saisie avec un recours dans l'intérêt de la loi, la Haute Cour de Justice et de Cassation a décidé dans son arrêt n°XV/200624 d'unifier la pratique dans le sens de la première mentionnée. Par la suite, dans l'arrêt n°XVLIII/200725 -rendu aussi sur la base d'un recours dans l'intérêt de la loi-, la Haute Cour a décidé que le juge qui décide de retenir la plainte sur le fond ne peut pas procéder immédiatement au jugement du fond de l'affaire, mais doit le renvoyer au procurer afin de commencer ou recommencer la poursuite pénale (et non pas retenir l'affaire et la trancher directement, sans qu'une poursuite pénale existe dans ces dossiers). Finalement, par l'arrêt n°XXXIV/200826 -rendu aussi pour l'unification de la pratique divergente-, la Haute Cour de Justice et de Cassation a décidé que lorsqu'une demande de changement de l'encadrement juridique est effectué dans le cadre des procédures prévues par l'article 2781 alinéa 8 lettre c) Code de procédure pénale la plainte ne peut pas constituer l'acte de saisine du tribunal, car l'action pénale doit obligatoirement être introduite par le procureur.

Malgré le caractère technique des détailles de procédure pénale, il devient clair que, pour ne pas contredire directement ni le législateur, ni la Cour Constitutionnelle qui avait confirmé la constitutionnalité du choix du premier, la Haute Cour de Justice et de Cassation a construit une jurisprudence qui, en réalité, modifie le contenu de la norme juridique sous le prétexte d'une interprétation rendue nécessaire par des pratiques divergentes. En effet, la Haute Cour s'est érigée en législateur sans l'avouer, mais en pratiquant la politique des petits pas et aidée par l'effet obligatoire des arrêts rendus sur la base des recours pour l'intérêt de la loi, elle a simplement maintenu en vigueur une solution législative abrogée par le Parlement.

Il est intéressant à observer qu'en adoptant cette position la Haute Cour se met dans une situation où elle semble s'opposer à l'Etat de droit, en refusant un moyen de contrôle

sur l'activité du Ministère Public qui, en même temps, est un instrument de protection des droits humains, sous couvert du fait que le déclenchement de l'action pénale directement par les tribunaux était une exception sous l'empire du Code de procédure pénale de 1968. Il est également intéressant à noter que dans ce cas-ci le système judiciaire semble, apparemment, plus enclin à préserver la marge de manœuvre du Ministère public que de formellement respecter le principe de légalité bien qu'il s'agisse de la matière pénale où il a toujours manifesté de scrupules. Pour notre part on estime que dans ce cas-ci il ne s'agit pas tellement de l'aisance qui est procurée par des pratiques bien établies et mieux connues, mais plutôt de la crainte du système judiciaire de se voir dévolu des taches et compétences nouvelles. Le déclenchement de l'action pénale directement devant le tribunal n'est pas interdit, mais représente l'exception dans le système pénal roumain, et le système judiciaire n'a pas acquiescé à ce que cette exception devienne plus large, même si la loi fondamentale aurait pu le permettre. Dans toutes ces considérations la confrontation avec la Constitution et son nouveau système de valeurs n'a pas effleuré l'esprit des juges et procureurs, qui se sont bornés à raisonner selon des critères totalement étranges à la mission de l'autorité judiciaire dans un Etat de droit. Cette résistance latente a fini, dans quelques situations comme celle décrite plus haut, à faire du système judiciaire un participant à la définition de la matière pénale, même si un diffus, informel, mais extrêmement puissant;

b) Mise en œuvre des sanctions

Comme on a pu constater, en Roumanie le juge ordinaire n'est pas forcément un partenaire ni pour le pouvoir constituant, ni pour le législateur, mais lorsqu'il s'agit de la mise en œuvre des sanctions pénales (peines) son rôle est incontournable. Les accents qu'il a tendance à mettre sur la fonction répressive de la peine peuvent, parfois, être équilibrés soit par le juge constitutionnel, soit par le constituant, mais des telles revirements sont plutôt rares et dépendent toujours de l'intervention explicite du législateur, absolument nécessaire pour mettre en œuvre les concepts et valeurs constitutionnels.

A titre d'exemple, la révision constitutionnelle de 2003 a élargi la portée du principe de la loi plus favorable de la matière pénale à la matière contraventionnelle27. Toutefois, bien avant cette intervention du pouvoir constituant, le juge constitutionnel avait rendue possible une interprétation extensive de cette exception du principe de l'application des lois dans le temps. Par une jurisprudence constante, bien que sur des lois diverses, la Cour Constitutionnelle a assimilé en matière de sanction plus favorable les contraventions aux infractions, et ce malgré le fait qu'en Roumanie, depuis les années '50, les contraventions ont été dépénalisées28, et traitées selon les règles de la procédure civile.

Dans un premier temps, c'est justement ce détail qui a joué en faveur de l'application du principe de la loi plus favorable en matière de contraventions, même si le juge constitutionnel ne l'a pas formulé de cette manière. Lorsque le législateur avait remplacé la prison contraventionnelle par la sanction des travaux communautaires29 il avait pris le soin de préciser, dans les dispositions transitoires, que la nouvelle loi s'applique aussi aux décisions de justice définitives mais pas mises en exécution jusqu'à la date de l'entrée en vigueur de la nouvelle loi. Il est intéressant à remarquer qu'une exception d'inconstitutionnalité de cette disposition transitoire a été soulevée d'office par un tribunal, qui a fait valoir que, selon le principe de l'application des lois dans le temps, la nouvelle loi ne pouvait être applicable qu'aux contraventions nées après son entrée en vigueur; l'exception constitutionnelle de la loi plus favorable ne visant que la matière pénale, et les contraventions ne faisant plus partie de cette matière depuis 1954, le tribunal exprimait sa perplexité devant un législateur qu'il tenait pour techniquement et juridiquement mal préparé. Dans sa décision n°236/1999 la Cour Constitutionnelle a fait jouer précisément le fait que les contraventions étaient gouvernées par la procédure civile, et, en matière de procédure civile, la loi nouvelle est d'application immédiate. Par ailleurs, la Cour a fait savoir que l'application dans le temps vise la mise en exécution d'une loi par rapport aux situations juridiques pendantes; le moment

auquel il faut se rapporter dans ce cas précis n'est par celui de l'accomplissement de la contravention, ni celui du début du rapport de la responsabilité administrative, mais bien celui du rapport juridique d'exécution de la décision de justice, or par rapport à ce moment l'apparition de la loi est certainement ultérieure si l'hypothèse de la loi est correctement lue (c'est-à-dire si la décision de justice est définitive mais pas encore mise en exécution).

En faisant valoir la nature civile de la procédure contraventionnelle, le juge constitutionnel a abouti à ce qu'une sanction plus favorable puisse être accessible même aux personnes qui avaient subi des condamnations aux sanctions contraventionnelles (plus lourdes), de facto arrivant à élargir la portée de l'exception prévue par la Constitution uniquement pour la matière pénale. En passant, on se doit de remarquer que le tribunal qui avait soulevé d'office l'exception d'inconstitutionnalité avait utilisé une interprétation stricte et étroite du principe de la sécurité juridique, selon laquelle le législateur peut s'attendre à l'application d'une nouvelle loi uniquement par rapport aux situations juridiques nées après son entrée en vigueur, facta pendentia restant soumises à l'ancienne loi afin de garantir la meilleure application des lois dans le temps. En revanche, le juge constitutionnel a employé une vision plus moderne et dynamique du principe de l'application des lois dans le temps, selon laquelle facta pendentia sont soumises au régime juridique valide à chaque instant.

L'ordonnance du Gouvernement n°2/2001 a remplacé le décret-loi n°31/1954, et elle a maintenu les contraventions dans la sphère de l'illicite administratif et non pas pénal, mais elle a rajouté l'exception de la loi plus favorable. Un autre tribunal a soulevé d'office l'exception d'inconstitutionnalité car les exceptions aux principes généraux du droit, même constitutionnelles, restent de stricte interprétation. Le fait que l'application du principe de la loi plus favorable à la matière contraventionnelle ne résultait plus de l'interprétation d'une loi spéciale, mais était rendue obligatoire par les dispositions de la loi-cadre concernant les contreventions ne suffisait pas au tribunal pour l'accepter en tant qu'exception du principe plus général de l'application des lois dans le temps. Dans sa décision n°197/2003 la Cour Constitutionnelle a dû rappeler que, bien que la Roumanie fait partie des pays qui ont dépénalisé les contraventions, elle reste partie à la CEDH, et selon la jurisprudence constante de la Cour Européenne des Droits de l'Homme, ce qui est important dans la qualification juridique des faits est le but préventif et répressif de la sanction et non pas tant la qualification formelle (pénale ou contraventionnelle) qui leur est donnée dans chaque système juridique national. De ce point de vue, la différence qui existe dans certains systèmes juridiques nationaux entre crimes, délits et contraventions n'est pas pertinente. Par le biais de l'application prioritaire des traités internationaux dans le domaine de la protection des droits fondamentaux, l'exception de la loi plus favorable en matière pénale pouvait donc être élargie pour inclure aussi la matière contraventionnelle, même en absence d'une disposition expresse dans ce sens de la Constitution.

Un raisonnement semblable a été utilisé par le juge constitutionnel pour justifier l'application de la présomption d'innocence en matière contraventionnelle, bien que cela n'a été fait que dans les considérants des décisions et non pas dans le dispositif. (décision n°183/2003 et décision n°251/2003).

On se doit toutefois de remarquer le contraste de cette jurisprudence constitutionnelle avec une première décision (n°90/1999) que la Cour avait rendu, et dans laquelle elle affirmait que toute nouvelle loi qui ne prévoit plus certaines contraventions ou qui leur assortit des sanctions moins lourdes qu'auparavant est contraire à la Constitution, car la loi fondamentale a prévu l'exception de la loi plus favorable seulement en matière pénale, et «ni l'article 6 de la CEDH, ni la jurisprudence de la Cour Européenne des Droits de l'Homme ne permettent d'arriver à la conclusion que le régime juridique des sanctions contraventionnelles se confond totalement avec celui des sanctions pénales».

Toutefois, par la suite la Cour Constitutionnelle s'est employée à rendre possible une application de l'exception de la loi plus favorable à la matière contraventionnelle, et ce

d'une manière constante. (voir aussi décision n°318/2003). En guise de victoire, la révision constitutionnelle de 2003 a codifié cette jurisprudence. C'est uniquement à partir de cette date que les tribunaux ont systématiquement eux-aussi appliqué le principe de la loi plus favorable en matière contraventionnelle.

Par ailleurs, le juge constitutionnel roumain s'est toujours bien gardé d'entrer sur le terrain de l'application de la loi, fût-elle pénale. «Les éventuelles erreurs d'application de la loi ne peuvent pas constituer des griefs d'inconstitutionnalité, et, donc, ne peuvent pas être censurées par le juge constitutionnel» (décision n°824/2010, mais aussi décision n°281/2010 ou décision n°1649/2009). Cela revient à dire que le juge ordinaire est libre d'individualiser les sanctions pénales, sans que le constituant, le législateur ou le juge constitutionnel puisse en intervenir. Dans ce contexte il faut toutefois préciser que l'individualisation des peines, notamment des peines complémentaires, par le juge ordinaire a déjà a fait l'objet des critiques aussi bien de la part du juge constitutionnel comme du juge européen. L'exemple des infractions d'insulte et de diffamation mentionné plus haut est illustratif pour la situation dans laquelle ce n'est pas tant la loi comme son application qui sont contestées et contestables. Néanmoins, lorsqu'il s'agit de réparer de telles situation le législateur semble plutôt maladroit et sur-réagir au lieu de chercher les causes réelles du phénomène contestataire.

* * *

La répression pénale est un des domaines les plus sensibles dans l'ensemble de la politique d'un Etat. Alors que la Constitution adoptée en 1991 et révisée en 2003 avait fixé un cadre protecteur des droits fondamentaux, et que le juge constitutionnel s'est attelé à la lourde tache de l'assainissement de la législation pre-constitutionnelle selon les standards établis par la loi fondamentale, le système judiciaire fait semblant de ne pas avoir compris le changement radical intervenu non seulement au niveau de la législation, mais même de sa raison d'être, et, contre vents et marées, se manifeste comme un véritable frein à la réforme générale de l'Etat.

1 Article 15 L'universalité: «(2) La loi ne dispose que pour l'avenir, à l'exception de la loi pénale ou contra-ventionnelle plus favorable».

2 Article 23 La liberté individuelle: «(11) Jusqu'à ce que la décision judiciaire de condamnation devienne définitive, toute personne est présumée innocente. (12) Aucune peine ne peut être établie ou appliquée que dans les conditions et sur la base de la loi».

3 Article 94 Les autres attributions: «Le Président de la Roumanie exerce également les attributions suivantes: d) il accorde la grâce individuelle».

4 Article 23 La liberté individuelle: «(2) La perquisition, la détention ou l'arrestation d'une personne ne sont permises que dans les cas et selon la procédure prévus par la loi. (3) La garde à vue ne peut pas dépasser vingt quatre heures. (4) La détention provisoire est ordonnée par le juge et seulement pendant le procès pénal. (5) Pendant la poursuite pénale, la détention provisoire peut être ordonnée pour maximum trente jours et peut être prolongée seulement pour des périodes de maximum trente jours, sans que la durée totale dépasse un intervalle de temps raisonnable, à savoir une période maximale de 180 jours. (6) Dans l'étape du jugement, le tribunal, dans les conditions prévues par la loi, est tenu de vérifier périodiquement et sans pouvoir dépasser un délai de soixante jours, la légalité et le bien-fondé de la détention provisoire et d'ordonner sans retard la mise en liberté de la personne mise en examen si les motifs ayant conduit à la détention provisoire ont cessé ou si le tribunal constate qu'il n'y a pas de nouvelles raisons qui justifient le maintien de la privation de liberté. (7) Les décisions du tribunal portant sur la détention provisoire sont soumises aux voies de recours prévues par la loi. (8) La personne détenue ou arrêtée est informée immédiatement, dans la langue qu'elle comprend, des motifs de sa détention ou de son arrestation, et dans le plus bref délai, de l'accusation portée contre elle; l'accusation est portée à sa connaissance uniquement en présence d'un avocat, de son choix ou commis d'office. (9) La mise en liberté de la personne détenue ou arrêtée est obligatoire si les motifs ayant déterminé ces mesures ont cessé, ainsi qu'en d'autres situations prévues par la loi. (10) La personne en état de détention provisoire a le droit de demander sa mise en liberté provisoire, sous contrôle judiciaire ou sous caution».

5 Article 27 L'inviolabilité du domicile: «(1) Le domicile et la résidence sont inviolables. [...] (2) Il peut être dérogé, par la loi, aux dispositions prévues à l'alinéa (1) dans les situations suivantes: a) pour exécuter un mandat d'arrestation ou une décision judiciaire; (3) La perquisition est ordonnée par le juge et est opérée

dans les conditions et les formes prévues par la loi. (4) Les perquisitions de nuit sont interdites, sauf en cas d'infractions flagrantes».

6 Article 30 La liberté d'expression: «(8) Les délits de presse sont établis par la loi».

7 Article 72 L'immunité parlementaire: «(2) Les députés et les sénateurs peuvent être poursuivis et traduits en justice en matière criminelle pour des faits qui n'ont pas de rapport avec les votes ou les opinions politiques exprimées dans l'exercice de leur mandat, mais ils ne peuvent être perquisitionnés, détenus ou arrêtés sans l'autorisation de la Chambre dont ils font partie, après avoir été entendus. La poursuite et la traduction en justice en matière criminelle ne peuvent être faites que par le Parquet auprès de la Haute Cour de Cassation et de Justice. La compétence de jugement incombe à la Haute Cour de Cassation et de Justice. (3) En cas d'infraction flagrante, les députés ou les sénateurs peuvent être détenus et subir une perquisition. Le ministre de la Justice informe aussitôt le président de la Chambre de la détention et de la perquisition. Au cas où la Chambre saisie constate que la détention n'est pas fondée, elle décide immédiatement de la révocation de cette mesure».

8 Article 84 Les incompatibilités et immunités: «(2) Le Président de la Roumanie jouit de l'immunité. Les dispositions de l'article 72 alinéa (1) sont applicables de manière analogue».

9 Article 96 La mise en accusation: «(1) La Chambre des Députés et le Sénat, réunis en séance commune, peuvent décider, à la voix d'au moins deux tiers du nombre des députés et des sénateurs, de mettre le Président de la Roumanie en accusation pour haute trahison. (2) La proposition de mise en accusation peut être initiée par la majorité des députés et des sénateurs et doit être immédiatement portée à la connaissance du Président de la Roumanie afin qu'il puisse donner des explications sur les faits qui lui sont imputés. (3) A partir de la date de mise en accusation et jusqu'à la date de la démission, le Président est suspendu de droit. (4) La compétence de jugement incombe à la Haute Cour de Cassation et de Justice. Le Président est démis de droit à la date où la décision de condamnation demeure définitive».

10 Article 109 La responsabilité des membres du Gouvernement: «(2) Seuls la Chambre des Députés, le Sénat et le Président de la Roumanie ont le droit de demander l'engagement de poursuites pénales à l'encontre des membres du Gouvernement pour les faits commis dans l'exercice de leurs fonctions respectives. Si les poursuites pénales ont été demandées contre eux, le Président de la Roumanie peut décider de les suspendre de leurs fonctions. La traduction en justice d'un membre du Gouvernement entraîne la suspension de ses fonctions. La compétence de jugement appartient à la Haute Cour de Cassation et de Justice. (3) Les cas de responsabilité et les peines applicables aux membres du Gouvernement sont réglementés par une loi portant sur la responsabilité ministérielle».

11 Dans cette décision la Cour Constitutionnelle a expliqué le fait que l'immunité est un accessoire du mandat parlementaire, et par conséquence, elle suit le régime et la vie juridique de ce dernier. La perte de l'immunité n'est valable que pendant le mandat parlementaire concerné ; un nouvel mandat engendre une nouvelle immunité, si bien que les procédures pour l'enlever doivent être reprises à zéro au cas où la poursuite pénale commencée n'a pas été clôturée avant la fin du mandat précédent. Toutefois, les actes de procédure de la poursuite pénale entamée pendant le précédent mandat ne doivent pas être refaits, car ils concernent la même personne. Le juge constitutionnel a ainsi distingué entre actes et procédure de la poursuite pénale, qui restent gouvernés par les règles de la procédure pénale, et les particularités de cette procédure dans un cadre constitutionnel, dont la fonction n'est pas d'entraver le cours du procès pénal, mais de protéger la personne du parlementaire.

12 Voir notre «Chronique», Annuaire International de Justice Constitutionnelle 2008, p. 824 et s.; S.Tanasescu, «Réussite de la procédure de suspension et échec de la déchéance du Président de Roumanie», Revue française de droit constitutionnel n°73/2008, p.181 et s.

13 Dans le même sens voir St.Deaconu, «Raspunderea penala a membrilor Guvernului», dans Raspunderea în dreptul constitutional, (coord.E.S.Tanasescu), Bucuresti, C.H.Beck, 2007, p.26 et s .; R. Carp, «Raspunderea penala, civila si contraventionala a membrilor Guvernului», Dreptul n°4/2002, p.130 et s. Pour des commentaires généraux et prémonitoires voir aussi A.Tuculeanu, «Unele consideratii asupra raspunderii juridice a membrilor Parlamentului si a membrilor Guvernului în lumina Constitutiei României», Dreptul n°7/1995, p.15 et s.; T. Dra-ganu, «Responsabilitatea penala a ministrilor în lumina Constitutiei din 1991», Analele Universitatii Crestine «Dimitrie Cantemir», seria Drept, 1997, p.15 et s.

14 Cf. St. Deaconu, «Raspunderea penala a membrilor Guvernului», Dreptul n°1/2007; p.167 et s.

15 Par exemple Cour Suprême de Justice, sentence pénale n°1394/9.07.1992 publiée dans Dreptul n°8/1993, p. 89—90; Cour Suprême de Justice, sentence pénale n°2490/24.11.1992 publiée dans Dreptul n°8/1993, p. 90— 91; Tribunal de grande instance Constanta, décision pénale n°316/8.04.1992 publiée dans Dreptul n°10/1992, p. 94—95; Tribunal de grande instance Constanta, décision pénale n°71/28.01.1993 publiée dans Dreptul n°7/1993, p. 73—74.

16 Par exemple la Cour d'Appel, le Tribunal de grande instance et tous les tribunaux de première instance du département de Bacàu n'ont fait aucune différence dans l'individualisation de la peine selon la nature juridique de la propriété (publique ou privée) endommagée par l'infraction à partir du moment où il s'agissait des vols contre des sociétés commerciales. (Tribunal de grande instance Bacàu, décision pénale n°29/13.01.1993 — société commerciale à capital entièrement privé et Tribunal de grande instance Bacàu, décision pénale n°306/8.04.1993 — société commerciale à capital entièrement détenu par l'Etat, confirmées par la Cour d'Appel Bacàu en tant qu'instance de recours, décision pénale n°8/23.09.1993 — décisions non publiées).

17 Seulement pour remplacer un mot dans l'ensemble de la loi pénale (le terme de «malice» avait été remplacé avec celui de «police» par le Décret-loi n°12/1990 publié dans le J. Off. n°7/12.01.1990) le législateur avait pris le soin d'adopter un acte normatif qui précisait la terminologie à utiliser pour le future. D'autant plus pour l'abrogation d'un article du Code pénal le législateur aurait dû être attentif et minutieux et ne pas accepter des abrogations implicites.

18 Costica Bulai, Deciziile Curtii Constitutionale si practica legislativa a Parlamentului în România // URL: http://www.ccr.ro/default.aspx?page=events/2003/bulai.

19 Pour une vue d'ensemble sur l'historique de l'interprétation et la révision de l'article 23 de la Constitution voir A.Crisu, «Comentariu la art. 23» dans Constitutia României — comentariu pe articole, (coord. I. Muraru&S. Tanasescu), Bucuresti, C. H. Beck, 2008, p. 217 et s.

20 Loi n°278/2005 pour la modification du Code pénal et d'autres lois pénales, publiée dans le J. Off. n°601/12 juillet 2006.

21 Voir notre «Chronique», Annuaire International de Justice Constitutionnelle 2008, p. 811 et s.

22 D. C. Danisor & S. Raduletu, «Competenta Curtii Constitutionale. Insulta. Calomnia. Controlul normelor de abrogare», Curierul judiciar n°3/2007, p. 4—25 ; E. S. Tanasescu, «Insulta si calomnia. Dezincriminare. Demni-tate umana. Protectia valorilor constitutionale. Abrogare partiala. Vid legislativ. Competenta Curtii Constitutionale. Efectele deciziilor Curtii Constitutionale»; Curierul judiciar n°4/2007, p. 1—14.

23 B. Diamant, E. Blându, C. Turianu, «Discutie cu privire la caracterul deciziilor civile ale CSJ, date in Sectiile unite, ca urmare a introducerii unor recursuri în interesul legii», Dreptul n°7/2003, p. 73.

24 http://www.scj.ro/Decizii%20SU%5CDecizie%20XV%202006.html.

25 http://www.scj.ro/Decizii%20SU%5CDecizia%20Nr.%20XLVIII%20%2848%29.html.

26 http://www.scj.ro/Decizii%20SU%5Cdecizie%20XXXIV%202008.html.

27 Dans la rédaction originale le texte de l'article 15 alinéa 2 de la Constitution lisait «la loi dispose seulement pour le futur à l'exception de la loi pénale plus favorable».

28 Par le décret-loi n°31/1954 et le décret-loi n°184/1954 les dispositions du Code pénal relatives aux contraventions ont été abrogées et les contraventions ont été considérées comme des déviations de nature administrative, engendrant une responsabilité administrative. Le «petit pénal» des-incriminé, il a été soumis, comme toute la responsabilité administrative, aux règles procédurales de nature civile et non plus pénale.

29 Loi n°82/1999, publiée dans le J.Off. n°278/20 juin 2000.

LU S I

Ш

iНе можете найти то, что вам нужно? Попробуйте сервис подбора литературы.

ci

Ш

m о

m <

a с

Ш

0

1 .0 с;

ш IS I

m <

a

о

i Надоели баннеры? Вы всегда можете отключить рекламу.